Home » Press Reviews / في الصحافة

Press Reviews / في الصحافة

 

 

 

HOMELAND (IRAQ YEAR ZERO)


This slideshow requires JavaScript.


DhQb8

« Homeland : Irak année zéro » : Bagdad, ville ouverte

LE MONDE | 09.02.2016 à 06h49  Par Mathieu Macheret

Une scène du documentaire irakien d'Abbas Fahdel, "Homeland : Irak année zéro", divisé en deux parties ("Partie 1 : avant la chute" et "Partie 2 : après la bataille").
Une scène du documentaire irakien d’Abbas Fahdel, “Homeland : Irak année zéro”, divisé en deux parties (“Partie 1 : avant la chute” et “Partie 2 : après la bataille”). NOUR FILMS
L’AVIS DU « MONDE » – CHEF D’ŒUVRE

Tout au long de l’année 1991, le critique Serge Daney consacre, dans ses colonnes de Libération et d’ailleurs, de nombreux articles à la couverture médiatique, plus précisément télévisuelle, de la guerre du Golfe. « Ce qui a frappé tout le monde face à ce télé-Irak bombardé, écrit-il alors, c’est la disparition des images », car, précise-t-il plus loin, « nous entrons dans une période où l’image n’existe plus que du point de vue du pouvoir, c’est-à-dire d’un champ sans contrechamp ».

Ce contrechamp eût été, selon l’auteur, de montrer, non pas « le fantasme de la guerre en direct », ni ces visuels robotiques de missiles pleuvant sur les toits de Bagdad, mais la vie de tous les jours et ses lieux, intérieurs et extérieurs, foyers, rues, « boîtes de nuit », pour attester que l’« autre », le peuple irakien, avait bien un visage, et pas forcément celui de Saddam Hussein.

DES CENT VINGT HEURES DE RUSHES ACCUMULÉES, LE CINÉASTE TIRE UNE GRANDE FRESQUE QUI NOUS PARVIENT PRÈS DE DIX ANS APRÈS LES FAITS

Abbas Fahdel, Franco-Irakien installé en France depuis ses 18 ans, qui fut l’élève de Daney à l’université, a pris son invective au sérieux. Douze ans plus tard, en février 2003, alors que la coalition menée par les Etats-Unis s’apprête à lancer une nouvelle offensive contre l’Irak, sous le prétexte de dénicher des « armes de destruction massive », le cinéaste revient au pays avec une caméra légère et se met à filmer les membres de sa famille. Partout, tout le temps, et à travers eux ce quotidien irakien, dont nous savions si peu de chose, qui faisait jusqu’alors tant défaut.

Lire l’entretien : Abbas Fahdel : « Je me sens comme un survivant »

Deux mois après l’assaut américain qu’il a vécu depuis la France, Fahdel reprend le tournage, retrouve les mêmes personnes, les mêmes lieux, ébranlés par un choc terrible dont il est encore difficile de prendre la mesure. Le film qu’il tire des cent vingt heures de rushes accumulées, grande fresque qui nous parvient près de dix ans après les faits, est découpé en deux parties, selon la chronologie du tournage : un « avant » et un « après » ce point aveugle qu’est la guerre.

Résignation angoissée

La première partie, « Avant la chute », nous accueille le matin, au réveil de la famille, entre le crépitement du poêle, la chaleur du thé et la télévision qui crache un spot de propagande, où Saddam Hussein apparaît en petit père des armées. Ce qui sous-tend le volet, c’est évidemment l’imminence du conflit, qui plonge chacun dans une sorte de résignation angoissée, ravive le souvenir encore proche de l’embargo (1990-1996), qui avait si durement frappé la population, voire celui plus lointain de la longue guerre avec l’Iran (1980-1988). Alors, on creuse un puits dans le jardin, on fait des provisions de nourriture et de médicaments, on consolide les vitres avec des bandes de scotch, on joue à la guerre, mais surtout, on attend.

Une scène du documentaire irakien d'Abbas Fahdel, "Homeland : Irak année zéro", divisé en deux parties ("Partie 1 : avant la chute" et "Partie 2 : après la bataille").
Une scène du documentaire irakien d’Abbas Fahdel, “Homeland : Irak année zéro”, divisé en deux parties (“Partie 1 : avant la chute” et “Partie 2 : après la bataille”). NOUR FILMS

Un autre sentiment, très vite, prend le relais, celui que ce mode de vie, qui se perpétue malgré tout, ne disparaisse bientôt dans la déflagration de la guerre. Dans la plus pure tradition du documentaire, Fahdel recueille alors tout ce qu’il peut, sans autre intervention de sa part qu’un sous-titrage contextualisant (pas de commentaire). C’est la belle séquence du marché, où la caméra largue les amarres familiales, pour aller « collectionner » les établis, les visages, les matières, les produits, les épices, le chant élégiaque d’un mendiant aveugle. C’est aussi le merveilleux passage des vacances à Hit, dans la belle-famille, où les enfants, au soleil couchant, jouent sur les rives du Tigre, à proximité de majestueux vestiges assyriens (qu’en restera-t-il ?). Dernières heures d’une existence résiduelle dont la perte annoncée se noie dans les reflets mordorés du crépuscule.

LE FILM CONSIDÈRE LA FAMILLE COMME LE POINT D’ANCRAGE D’UN LARGE DÉPLOIEMENT VERS LE PAYSAGE SOCIAL, NATUREL, CULTUREL DE L’IRAK

La seconde partie, « Après la bataille », est consacrée, comme on peut s’y attendre, aux stigmates des affrontements, aux béances flagrantes qu’ils viennent de creuser dans le tissu social : bâtiments délabrés, traces d’incendies, ruines omniprésentes, quartiers résidentiels détruits. Le revers de la propagande baasiste, c’est désormais l’occupation américaine, avec les longues rangées de véhicules militaires qui sillonnent ou bloquent les rues, et les injonctions plus ou moins conciliantes des soldats. Dans les détonations éclatant à toute heure, dans la menace qui circule de gangs nés du chaos, qui tirent à vue, enlèvent femmes et enfants, se profile, comme en germe, l’origine délétère de l’organisation Etat islamique.

Homeland ne considère pas tant la famille comme refuge, mais surtout comme le point d’ancrage d’un plus large déploiement, vers le paysage social, naturel, culturel de l’Irak, assemblant, dans un montage extraordinaire, un rhizome de rencontres, de discours, d’affects, de refoulements, de craintes, d’aspirations, et même de déni (l’épisode des juifs convertis à l’islam).

Il y a là tout un héritage néoréaliste, rossellinien (si cher à Daney), comme l’indique le sous-titre du film (en référence à l’Allemagne année zéro, de Roberto Rossellini, 1948). A ce titre, les images, d’apparence fragile, domestique, qui prêtent si peu le flanc à l’épate, ne sont si belles, si justes, qu’à mesure de leur anonymat, de leur dépouillement, par cette façon de ne jamais ornementer ni « griffer » le réel d’un auteurisme surplombant.

Un monde peuplé d’enfants

Mais ce qui frappe le plus, ici, c’est à quel point l’Irak que nous montre le film est un monde peuplé d’enfants. Ils semblent surgir de partout, faire du moindre tas de gravats leur terrain de jeu, et la caméra de Fahdel éprouve pour ceux-ci un véritable tropisme. Mieux, le cinéaste réserve à son neveu d’une dizaine d’années, le petit Haidar, le rôle principal d’Homeland, le laissant peu à peu devenir une sorte de guide, d’éclaireur, d’enquêteur, d’indicateur, partout où la caméra passe. Idée sublime que de confier les rênes du film, non pas à la raison adulte, ni même à une autorité certifiée, mais à un petit garçon rayonnant, enjoué, terriblement lucide.

Plus le film avance et plus il se referme sur lui comme un mausolée – puisque Haidar fut raflé par une rafale de tirs perdus (ce qu’on apprend dès la première partie). Raison pour laquelle Abbas Fahdel a mis si longtemps à affronter ces images, et qui achève de conférer à ce geste documentaire, d’une ampleur et d’une urgence inouïes, une terrassante densité émotionnelle.

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/cinema/article/2016/02/09/homeland-irak-annee-zero_4861669_3476.html#kDusdxPsMBGtX413.99


Jeune Afrique

Jeune Afrique : “ce documentaire donne ainsi à voir très exactement ce que le cinéma, mais aussi l’ensemble des médias du monde entier, tous plus ou moins embedded (“embarqués”), ne nous ont jamais montré.”

6838676-10450587
Cinéma

Homeland : Irak année zéro Abbas Fahdel

En filmant les siens avant et après la guerre, Abbas Fahdel montre l’Irak tel qu’on ne l’a jamais vu. Un beau documentaire au souffle romanesque.

Entre février 2002 et avril 2003, Abbas Fahdel, exilé à Paris, revient filmer ses proches et ses amis en Irak. Après vingt ans d’absence, il y a ceux qu’il retrouve et ceux qu’il découvre, une joyeuse nuée de neveux et nièces. Parmi eux, l’espiègle Haidar, 13 ans, devient vite l’un des formidables « personnages » de ce documentaire en deux volets ­bâti comme une fiction. « Avant la chute » saisit l’attente d’une guerre annoncée à grands coups de semonces par l’Amérique des faucons. « Après la bataille » raconte la décomposition d’un pays libéré de son tyran, mais livré au chaos.

Le titre — et son clin d’oeil à Roberto Rossellini — l’atteste : le cinéaste, longtemps critique, connaît ses classiques, d’Ozu à Jean Rouch. A se familiariser avec les uns et les autres, à partager leur intimité (vaisselle à la bougie quand l’électricité est coupée), à les regarder se préparer à un énième conflit (creuser un puits, accumuler des provisions), on a le sentiment d’avoir enfin accès à cette simple et rare réalité : l’Irak des Irakiens. L’exilé filme, comme s’il ­voulait les retenir, des instants banals et fragiles. On devient vite des habitués de la maison. On apprend à aimer ses habitants, dont la joie de vivre irrigue toute la première partie. La vie sous Saddam n’est pourtant pas une partie de plaisir : le mutisme du foyer devant les chaînes officielles le prouve. Les scènes « comiques » — « J’espère qu’ils ne vont pas utiliser d’armes de destruction massive… », s’inquiètent de petits Bagdadis en guettant le premier missile américain — succèdent à de purs moments d’élégie : un vieil homme qui pleure sur une chanson d’amour, symbole d’un patrimoine bientôt englouti.

La deuxième partie débute deux semaines après la guerre. Les GI n’ont pas l’air si terribles et la famille, qui a suivi la chute du raïs depuis son refuge campagnard, reprend espoir. Sur les toits de Bagdad, les antennes satellites poussent comme des champignons, et, dans les charniers, les cadavres de la dictature commencent à faire surface. La suite, hélas, est accablante. Les libérateurs se muent en occupants ­paniqués. L’Irak n’est plus administré, les pillards envahissent la ville. Abbas Fahdel ne joue ni avec les siens, ni avec nos nerfs : on a su très vite que Haidar, le neveu vif-argent, ne s’en sortirait pas. Mais, quand il disparaît soudain, cette guerre lointaine devient un peu la nôtre. Homeland : Irak année zéro nous laisse avec l’impression tragique qu’un grand film de guerre a miné le film de famille. Et tout fait exploser. — Mathilde Blottière

Mathilde Blottière


MEDIAPART_charte_graphique.ai

“Homeland : Irak, année zéro” un grand voyage documentaire, intime et politique

Homeland, Irak année zéro, le documentaire monumental (au sens propre) du réalisateur franco-irakien Abbas Fahdel n’est pas seulement un film qui nous donne à voir la guerre comme jamais on l’a vue, à hauteur d’une famille irakienne prise entre le marteau Saddam et l’enclume Bush. c’est aussi un film documentaire qui ouvre, avec quelques autres, une vraie nouvelle voie …

Homeland : Irak année zéro, le documentaire monumental (au sens propre) du réalisateur franco-irakien Abbas Fahdel n’est pas seulement un film à voir. C’est un film à respirer, à palper, à sentir, à laisser venir, la tête bien calée sur le haut du dossier. C’est un film avec lequel on est par le regard mais aussi avec tout son corps, parfois encombrant durant la longue durée de ce voyage documentaire. On le gratte, on le bouge, on le repositionne, mais jamais l’œil ne quitte la surface de l’écran, frontière poreuse avec l’autre monde, l’autre vérité, l’autre point de vue. Devant ce film incroyablement simple et direct, on comprend enfin ce qu’est l’Histoire vécue au revers intime des images de l’Histoire médiatisée en direct. Sans s’identifier au point de vue du filmeur, le spectateur se met à la place d’Abbas Fahdel pendant les 5 heures 34 (en deux parties) que dure le film.

C’est peut-être un peu long pour un film mais c’est si court pour un tel voyage ! Je me souviens de l’impression extraordinaire de sa performance (plus que de sa projection – trop plat) dans le grand auditorium de l’Institut du Monde Arabe lors d’une avant-première mémorable, il y a quelques semaines. J’avais eu l’impression de sortir d’un avion en pleine nuit, dans le froid parisien, après avoir vraiment découvert l’Irak. Découvert aussi qu’en Irak vivaient des irakiens qui n’étaient pas les ennemis des américains mais des hommes, des femmes, des enfants souvent pris entre le marteau de Saddam et cette enclume de Bush.

On n’a jamais filmé la guerre de cette manière, avec une telle simplicité, c’est-à-dire comme elle est vécue depuis le tapis central d’une maison où toute la famille se demande en permanence ce qui va se passer. Mais c’est ça (je pense) la guerre. C’est quand les murs de sa maison deviennent provisoires, quand les vitres sont en attente de tomber, quand son lieu de travail se transforme en cible, quand la faim attendue nous pousse à faire des provisions, quand on fait des masques à gaz avec des couches. Les jeux de guerre avec des armes de fortune occupent de plus en plus les enfants, et de manière de plus en plus réaliste au fil du film. La guerre est un monstre à apprivoiser au quotidien, c’est la possibilité de voir surgir la mort à tout moment, n’importe où. Comme nous le montrera la fin du film. Comme nous le découvrons amèrement depuis le 13 novembre. Même si nous ne sommes pas en guerre, même si nous n’en parlons pas, son imaginaire court dans le métro et les rues de Paris. Le film nous la montre sur la table de la cuisine.

La guerre n’est jamais là très vite, elle arrive, elle est devant nous. Elle est toujours invisible en soi-même, elle vient, elle est passée et tout est différent.

La première partie nous le rappelle avec une immense minutie visuelle et psychologique. La seconde nous le détaille … Et toujours avec la délicatesse qu’on sent dans les propos attentifs et simples du réalisateur, qui n’est pas là pour lui mais pour cette chose qui est le lieu de rencontre de tout : le film et ses deux parties : avant/après la bataille.

Ainsi, on fréquente son film plus qu’on ne se contente de le regarder. La distorsion du temps, sur ces deux dimensions du cycle et de l’écoulement, ouvre dans la largeur un espace où le cadre s’oublie. On est dans ce monde rendu plus proche par la familiarité du cinéaste avec les personnes filmées et la familiarité que ce parti pris nous octroie avec les lieux. La rythmique des plans à la fois tableaux composés et flux spontanés, propose au regard une pulsation de vie qui parfois se fige dans la peur ou la contemplation. Le spectateur, passager clandestin à bord du regard du filmeur, dans le scaphandre de son corps presque invisible, voyage autant qu’il est possible dans un Irak tendu puis dans un Irak brisé. On passe avec lui, sa famille et son peuple, de l’ordonnancement au chaos. Et le tragique n’est pas loin, la mort est annoncée par des cartels jaunes qui se distinguent des sous-titres et désamorcent tout effet hollywoodien. La mort n’est pas l’objet d’une spéculation narrative, elle est écrite dans le sujet même, et le savoir du monteur ne joue pas avec l’innocence du filmeur, mais vient au contraire informer l’image et le spectateur, au moment où se nouent les liens tragiques. La guerre, c’est parler avec des morts en puissance, avec des personnages de tragédie. Dans ce passage initiatique, on surnage grâce à la rigueur éthique des cadrages, jamais intrusifs mais jamais indifférents, grâce à la tension de l’écoute attentive qui transforme la vie de famille en monument historique et grâce aux mouvements brefs et précis de ce regard qui garde. Qui monte la garde auprès des siens. Un zoom et c’est l’amour, l’intérêt, la tendresse qui nous rapprochent des êtres filmés. Un Insert ou un gros plan et l’on se moule dans la construction d’un espace pictural, dont l’architectonique est en soi un défi à la destruction annoncée des bâtiments. Un plan pris par une fenêtre ou par-dessus des objets interposés, et l’on devient un observateur curieux sans être un voyeur, conscience visuelle qui vise toujours l’au-delà, le plus tard, l’après tout ça … Et tous les plans tirés des scènes de rue de son enquête en ville, auprès des commerçants, viennent répondre à notre désir de voir l’Irak tel qu’on ne nous l’a jamais montré, tel qu’on ne l’a jamais imaginé.

Ce qu’on voit en revanche, dans la seconde partie, Après la bataille,  grâce à ces deux niveaux de récit : le bilan social et politique de la bataille et les effets de la guerre sur les individus, c’est que la guerre a été une arnaque, un vol, un acte de piraterie. Loin de l’imaginaire guerrier des films hollywoodiens sur l’Irak, terrain de jeu vidéo pour les marines’s ou les GI’s, Abbas Fahdel nous montre simplement des soldats américains, gamins gentils mais naïfs, assis à attendre sur leurs chars. Le pillage fait rage, les meurtres pour une voiture hors d’usage sont quotidiens, la population doit s’armer pour faire face à l’absence de protection, mais la présence américaine n’est qu’une façade hollywoodienne. Les américains vivent reclus dans des quartiers sécurisés, une seule chose semble compter pour eux : leur propre vie et le pétrole. Que le reste de l’Irak meure… on voit très bien de quel chaos sont sortis les zombies de Daesh. On comprend vite qu’on est très clairement devant une guerre mafieuse menée par un cartel texan dont le seul objectif militaire est de s’arroger des puits de pétrole. La société irakienne ne les intéresse pas, ne les concerne pas, n’existe pas. Et tout s’effondre. L’évidence de cette destruction m’a fait penser à Suite française d’Irène Némirovski, écrit dans le temps même de l’exode, qui donnait une idée précise et inédite de ce qu’est une société qui implose dans la guerre.

Avec ce film direct et affectif, Abbas Fahdel nous emmène vers un cinéma horizontal, reposant sur la relation aux sujets filmés, pris comme des sujets et jamais comme des objets, ce qui implique une caméra à l’écoute. Son objet n’est pas la réalité telle qu’on peut la filmer, mais la réalité telle qu’elle est parlée par les sujets  eux-mêmes, conscients de participer au film et repérant le dispositif. C’est la grande différence avec Frederick Wiseman, William Klein, les frères Mayles qui cherchent une objectivité visuelle fondée sur une invisibilité théorique du filmeur… Ici, le filmeur se dévoile, enquête, attend, il est « avec » il n’est pas « entre ». C’est ce qui rapproche Abbas Fahdel de Jonathan Nossiter dans Résistance Naturelle ou encore d’Emad Burnat dans Cinq caméra brisées. Ce cinéma direct et naturel qui repose sur la manière dont une relation affectueuse cristallisée dans le cadrage peut servir de conducteur subjectif et éthique afin de mettre le spectateur au cœur du film, à table avec les convives et conscient de sa présence spectatorielle. C’est la richesse avant-gardiste de ces productions spontanées, nées de ces nouvelles possibilités légères de réalisation et de montage, quand elles sont entre les mains d’artisans qui savent mettre en scène leur regard pour le partager sans se mettre en avant … à tout hasard. C’est la force nouvelle des films qui ne savaient tout à fait qu’ils en seraient et finissent par inventer, grâce au soutien de distributeurs audacieux, un nouveau cinéma, dix fois plus libre et plus généreux.


le-figaro-logo

Homeland : Irak année zéro, du sang et des larmes

http://www.lefigaro.fr/cinema/2016/02/09/03002-20160209ARTFIG00226–homeland-irak-annee-zero-du-sang-et-des-larmes.php

le monde


h15_logo_echoshome

« Homeland » : la chute de Bagdad

Adrien Gombeaud / Journaliste | Le 09/02 à 07:00, mis à jour le 10/02 à 12:30
« Homeland » : la chute de Bagdad ©Nour Films

Le quotidien d’une famille de Bagdad en 2003 ou la grande histoire à échelle humaine. Un documentaire à la fois intime et immense.

« Homeland » dure plus de cinq heures trente, mais il possède le générique le plus court qui soit. En effet, Abbas Fahdel a assuré la réalisation, les prises de vue et le montage. Il s’agit pourtant bien d’un grand film, un témoignage exceptionnel sur une page récente de notre histoire.

Au cours de l’année 2003, Fahdel a filmé sa famille à Bagdad. L’ensemble est constitué de deux volets que sépare l’intervention militaire occidentale. « Avant la chute », la première partie, décrit le quotidien ordinaire de la petite bourgeoisie iraquienne. Une maison, des enfants qui vont à l’école et à l’université, la propagande. Et la guerre qui approche. On creuse un puits dans le jardin. On prépare du pain. On tend des couvertures devant les fenêtres pour se protéger des éclats de verre…

Dès les premières minutes, Haidar, 11 ans, aimante la caméra. Malicieux, gouailleur, il attend l’attaque, se réjouit à l’idée de ne plus aller à l’école et de se réfugier à la campagne avec ses cousins. Il a quelque chose d’un Petit Nicolas bagdadi. A cette nuance près : au bout d’un quart d’heure, un carton annonce qu’il mourra fauché par une balle après la chute du régime.

Au début de la seconde partie, « Après la bataille », les émissions à la gloire de Saddam Hussein ont été remplacées par des clips R&B. Bagdad n’est plus que ruines. Face à une armée d’occupation débordée et impuissante, le chaos a tout gagné, la rue appartient aux pilleurs et aux criminels. La vie continue tant bien que mal : on passe ses diplômes, on s’organise, on retrouve aussi des visages familiers dont le petit bouquiniste si attachant et bien sûr Haidar à peine moins insouciant.

Les guerres du Golfe nous laissent le souvenir flou de combats désincarnés : de cieux striés de lumières, d’écrans verdâtres, de génériques de CNN. Or, loin des satellites, au plus près des habitants, il y avait la caméra qu’Abbas Fahdel tenait serrée tout contre lui et tout contre les siens. Il lui aura fallu plus d’une décennie pour trouver la force de monter et partager ces images essentielles. Elles nous rendent enfin la guerre visible. Cependant, la beauté de « Homeland » tient aussi du contraste entre un pays démembré et une famille unie. Les ruines de Badgad sont les nôtres. Le sous-titre est d’ailleurs emprunté au film de Rosselini « Allemagne, année zéro ». Autre siècle, autres décombres, autre enfant et même épilogue. Aujourd’hui, Haidar aurait 24 ans.

En savoir plus sur http://www.lesechos.fr/week-end/cinema/films/021684531410-la-chute-de-bagdad-1198922.php?30zB41hI7TzJ8zd5.99


libération

«HOMELAND», L’IRAK EN PERTE DE RÉGIME

Par Jean-Pierre Perrin9 février 2016 à 17:41

Un documentaire émouvant sur le quotidien d’Irakiens avant et après l’invasion américaine.

Avec les abominations commises par l’Etat islamique aujourd’hui, on a oublié celles que perpétrait Saddam Hussein quelque dix ans plus tôt. Si les premières sont menées aujourd’hui au nom du califat, les secondes le furent au nom du parti. Mais, entre le raïs et le calife, peu de différences si ce n’est que la dictature du premier, qui régna vingt-cinq ans, fut d’une cruauté extravagante et grotesque, comme en témoigne l’excellente série de la BBC The House of Saddam, irremplaçable documentaire-fiction sur la nomenklatura baasiste. Survint l’invasion américaine et Hollywood colla à l’événement avec des films, comme Green Zone, avec en arrière-plan le singulier conflit entre la CIA et le Pentagone, puis Démineurs, qui magnifie l’un des plus durs boulots au monde, et surtout American Sniper, le film de Clint Eastwood sur la vie d’un Black Seal (les commandos d’élite de l’US Navy), qui fut démoli par un pan de la critique française (dont Libé) – peut-être ne voulait-elle pas voir le conflit tel qu’il fut -, mais adulé par les reporters qui le suivirent, justement pour cette raison.

Il manquait la guerre racontée par les Irakiens à un réalisateur irakien – Abbas Fahdel. C’est chose faite avec Homeland, qui raconte, avec les yeux d’une famille aisée de Bagdad, ce que fut son quotidien pendant deux ans. Soit un documentaire de cinq heures et demie, divisé en deux parties : la première consacrée aux semaines qui ont précédé la prise de la capitale, la seconde à celles qui ont suivi. Même si, comme le dit Abbas Fahdel (que Libé avait rencontré en novembre), «l’Irak est invivable», son film est comme irradié par sa joie d’être aux côtés des siens, dans les épreuves, dans les chagrins, dans les joies – la naissance d’un enfant ou la réussite d’un examen.

Dans la première partie, on voit peu l’Irak, la caméra s’attachant à décrire l’attente interminable de la guerre au sein de la famille. D’où un certain ennui qui finit par contaminer le film même si tous les membres se révèlent des acteurs exceptionnels. La seconde partie, parce que le chaos s’installe, que les gangs apparaissent dans un Bagdad abandonné aux ténèbres en dépit de l’occupation américaine, est beaucoup plus dramatique. Et puis, la parole commence à percer les murs du silence bâtis par la dictature. Les Irakiens trouvent les mots pour dire ce que fut le défunt régime. Puis les gestes, comme ces gifles aux portraits du dictateur. «Voyez comme les Irakiens sont hypocrites ! lance une jeune étudiante. Hier, ils étaient obligés de lui écrire [pour son anniversaire, ndlr] ; maintenant, ils crachent sur lui.» S’ensuivra la montée du ressentiment à l’égard des «libérateurs» qui, multipliant les bavures et se montrant incapables de rétablir l’ordre, vont muter en occupants.

D’un bout à l’autre, le film est traversé par des moments d’une grande émotion, comme la visite de l’Office du cinéma, brûlé par les pillards qui ont détruit la mémoire du cinéma irakien. Un réalisateur ramasse une bobine et la berce comme un enfant. Dans ce geste, toute l’universalité du cinéma même sous la plus affreuse dictature : «On peut se venger d’un régime mais pourquoi se venger de la culture ?» Question, hélas, sans réponse.

Jean-Pierre PerrinHomeland : Irak année zéro documentaire d’Abbas Fahdel

http://next.liberation.fr/cinema/2016/02/09/homeland-l-irak-en-perte-de-regime_1432181


MEDIAPART_charte_graphique.ai

“Homeland ” : le grand docu intimiste sur la guerre d’Irak

Chronique documentaire d’une famille irakienne avant et pendant l’occupation américaine. Une somme élégiaque.

Ce documentaire fleuve de 5h34 en deux parties (Avant la chute et Aprèsla bataille) est le grand œuvre d’Abbas Fadhel. Né en Irak mais vivant en France depuis des décennies, Fadhel n’a cessé de filmer son pays d’origine (des documentaires et une fiction). Dans ce Homeland, à ne pas confondre avec une série américaine du même nom, le cinéaste retourne en Irak, une fois en 2002 et une autre en 2003, avant et après le déclenchement de la guerre par les Etats-Unis (mars 2003).

Il filme essentiellement sa famille, mais aussi, énormément, l’arrière-plan, le quartier, la ville, les rues, les universités, les commerces, les immeubles détruits (dont les impressionnants décombres des studios de cinéma). En gros, ce film c’est “la maison et le monde”. La maison, c’est plutôt la première partie, frères, neveux et nièces, etc. Home sweet home, rires, routine, insouciance, avec tout de même le spectre de la guerre qui se profile à l’horizon.

Guerre d’occupation

Le monde, c’est le second volet, où les joies et les jeux (des enfants) persistent, mais où le danger rôde partout dans Bagdad et a chamboulé le quotidien. La force et la beauté de ce home-movie, impeccable chronique de la vie quotidienne à Bagdad en temps de guerre, c’est de mêler constamment le familier et l’insignifiant à l’horreur et à la mort. Pas de bataille rangée, pas de combattants en armes – hormis bien sûr les troufions américains omniprésents qui affichent une certaine sérénité. C’est une guerre d’occupation plus que de conquête.

Le corollaire de cette présence américaine, de cette invasion accompagnée par des bombardements et des destructions, qui ont semé le chaos en Irak, c’est l’absence de règles et de garde-fous. Plus de Saddam, de parti Baas, ni de répression. La liberté de la presse règne (on est passé de 3 quotidiens à 58), et beaucoup de langues se délient sur les méfaits du dictateur déchu dont tout le monde semble content d’être débarrassé. Cela n’empêche pas la situation d’être désastreuse : problèmes d’alimentation, de travail, désorganisation, absence des institutions, et donc insécurité permanente.

Voile funèbre

L’Irak est devenu un no man’s land violent. Pillages, attaques et meurtres dus à des bandits isolés ou à diverses factions sont devenus la norme. Une inquiétude permanente et insidieuse plane tout le long de la deuxième partie, et se soldera d’ailleurs par un choc tragique. L’événement en question survenant à la toute fin nimbe ce qui a précédé (les 5 h 30) d’un voile funèbre. Le home-movie modèle est en même temps un tableau de l’enfer. Le destin d’une famille aimante et heureuse peut être brisé en une seconde par une chute de roquette ou une balle perdue. Le cinéaste prend lui-même de tels risques. Pourtant il cadre avec une étonnante sûreté, pose un regard extérieur et curieux sur la réalité de l’Irak (souvent derrière les vitres d’une auto).

Un travail double donc, subjectif et objectif à la fois, accompli avec une économie de moyens liée au budget insignifiant de ce documentaire qu’on imagine autoproduit, mais tirant le maximum de plus value esthétique de son matériau brut. Elégance du filmage et fluidité du montage. Le grand film intimiste sur la guerre d’Irak.


Article et interview dans La Vie

Article et interview dans La Vie 2


critikat

Homeland : Irak année zéro

réalisé par Abbas Fahdel

Chronique familiale

Après une tournée des festivals mondiaux passée cet été par Lussas où nous l’avions rencontré, Abbas Fahdel voit enfin Homeland, Irak année zéro sortir sur les écrans français. La durée hors norme du film (près de six heures), si elle laisse au spectateur le temps de faire connaissance avec un pays et ses habitants, a de quoi inquiéter les programmateurs. Nour Films, son courageux distributeur, a fait le choix de segmenter le film en deux séances distinctes, respectant la logique interne de ses deux parties. Avant la chute et Après la bataille disent déjà à quel point le temps est la matière d’un film qui gravite autour d’un hors champ tragique, celui de la seconde guerre du Golfe, et qu’il aura fallu dix ans pour terminer.

Abbas Fahdel revient dans son pays natal qu’il a quitté depuis vingt ans. Il y il filme ses proches pendant près d’un an, de février 2002 à mars 2003. Avant le début des attaques américaines, il observe le quotidien d’une famille ordinaire sous la dictature de Saddam Hussein. Un quotidien où les jeunes adultes s’apprêtent à connaître leur deuxième guerre. Si Fahdel commence son film en nous invitant à la table de sa famille, c’est bien sûr une façon de renouer avec ceux qu’il a quittés si longtemps, tout comme d’inviter le spectateur à se sentir chez eux comme chez soi. Mais c’est aussi que, sous Saddam Hussein, il est dangereux de filmer autre chose que les conversations badines d’une famille unie. L’attente de la guerre donne au temps un air de perpétuelle hésitation. La famille du cinéaste se prépare à la guerre comme elle l’avait fait vingt ans plus tôt, creusant un puits dans son jardin ou protégeant ses fenêtres en prévision du choc des bombardements. En regardant dans un souk des statues d’artisans du passé fixés dans la simplicité de leur activité, la sœur du cinéaste remarque que c’est à cela qu’ils en reviendront, repasser les vêtements avec un fer chauffé au charbon, si le conflit est déclaré. La guerre ne se contente pas de faire balbutier l’histoire dans des situations identiques. Elle fige le temps, arrête l’évolution du pays pour le ramener à une époque du tout artisanal, transformant les hommes en paysans, quel que soit leur parcours. L’après-guerre ouvre les portes de la maison familiale pour aller sur les routes, dans les quartiers, rendre compte des ravages de la guerre et des absurdités de la présence militaire américaine. L’impression que, dans une époque comme dans l’autre, le temps s’est arrêté, est sans doute renforcée par l’écart de dix ans qui a passé entre le tournage et le montage du film, essentiellement dû à l’événement traumatique qui a empêché Fahdel de regarder ses rushes pendant une décennie. La mort de son neveu Haidar, âgé de douze ans et atteint d’une balle perdue survient dans le dernier plan.

Visite guidée dans les ruines

C’est Haidar, enfant qui grandit avec le film, qui nous guide dans les ruines de son pays paraît tout droit sorti du néoréalisme italien auquel le sous titre d’Homeland nous renvoie. Si l’on comprend la référence directe au film allemand de Rossellini, le garçon nous rappelle davantage le sourire du jeune Napolitain de Paisa que le désespoir suicidaire d’Edmund perdu dans les décombres de Berlin. Il se fait aussi cousin éloigné des personnages d’Abbas Kiarostami, lorsqu’il emboîte le pas du cinéaste pour devenir son relais à l’écran, livrant ses réflexions percutantes sur l’état de son pays ou interviewant ses habitants. Dans la violence de villes détruites et sous contrôle ennemi, on est sans cesse surpris par la vie qui résiste, comme les quelques naissances survenues dans la famille pendant la guerre en attestent. La difficulté à rentrer chez soi quand toutes les routes sont plus ou moins arbitrairement barrées par l’occupant n’empêche pas les étudiants de retourner à l’université ou les hommes d’aller travailler.

C’est encore la piste néoréaliste que suit le film lorsqu’un frère du réalisateur visite avec tristesse son ancien studio de cinéma, détruit par les bombardements. Cette scène agit comme un rappel à l’intérieur du film, des conditions de dénuement dans lesquelles s’effectue le tournage. Comme le néoréalisme italien que la destruction de Cinecittà a poussé à tourner en extérieur, Homeland, dans sa seconde partie, est presque exclusivement un film qui court les rues à la rencontre de leurs occupants. Cet homme qui comprend « qu’on se venge d’un régime, mais pas de la culture » met le doigt sur ce que Homeland a de si précieux : il invente les images d’un peuple, confisquées par celles de la propagande de Saddam Hussein, omniprésent sur les écrans de télévision, comme par la télévision occidentale qui a servi le discours d’une guerre invisible, sans corps et sans morts.

Des images, des visages

En arrivant à Paris pour y étudier le cinéma, Abbas Fahdel a suivi les cours de Serge Daney. Dans son articleRegarder (la guerre en Irak), le critique de Libération condamne le règne du visuel, flux sans regard qui nie toute existence à l’autre. À retardement, ce qui le rend encore plus touchant et tragique, Homeland semble répondre à ce que Daney appelait de ses vœux : ne pas s’en tenir aux ciels nocturnes zébrés d’éclairs sous le feu des bombardements permanents, mais chercher des visages. Ainsi est Homeland : un portrait de famille. Celle, à proprement parler, du cinéaste, seules personnes qui pouvaient accepter d’être filmées pendant la dictature. Celle, au sens plus large du peuple irakien. Alors que des témoins offrent à nos regards les portraits d’un proche assassiné injustement pendant l’occupation, ils racontent que l’armée américaine leur a interdit de porter le deuil. On comprend alors, en voyant les derniers plans de la tombe de Haidar, qui nous a servi de guide tout au long de cette chronique, que Homeland, sans jamais s’appesantir sur l’horreur et la douleur, est aussi un caveau de famille, un film mémorial du peuple irakien.

http://www.critikat.com/actualite-cine/critique/homeland-irak-annee-zero.html


Logos_FRANCE24_RVB_2013.svg

Culture

‘Homeland, Iraq Year Zero’: Monumental film charts destruction of a nation

Text by Benjamin DODMAN 

Latest update : 2016-02-11

A mesmerizing and deeply moving portrayal of the Iraq War as seen by Iraqis, Abbas Fahdel’s six-hour masterpiece is essential viewing for anyone hoping to understand the devastating implications of the US-led invasion.

In 1991, Iraq became a hapless party to the birth of televised warfare, as Western TV crews scrambled to get the best rooftop views of Tomahawk missiles raining down on Baghdad. The spectacle resumed, on a much larger scale, in 2003. Then came the big-budget movies. But somehow, 25 million Iraqis, a people unfortunate enough to have experienced both Saddam Hussein’s tyranny and the wrath of the Bush dynasty, were largely absent from the show.

Fahdel’s hugely rewarding documentary, which opened in French cinemas on Wednesday, is a reminder that one could watch a dozen of Hollywood’s obscene takes on the Iraq war and still have no clue as to what it meant to be at the receiving end of the war on terror. There is no “shock and awe” in his 334-minute epic, no American sniper picking off swarms of faceless insurgents – just ordinary Iraqis struggling to get along with their lives even as their world collapses.

“Homeland, Iraq Year Zero” was shot with a lightweight camera before and after the US-led invasion in 2003, while the Iraqi director, who lives in France, was staying with his family in Baghdad and the countryside. It is split into two parts, subtitled “Before the fall” and “After the battle”. The only thing Fahdel doesn’t show is the actual bombing that played night and day on Western media.

The film’s somewhat unoriginal title, juxtaposing two cinematic references, announces the director’s twin endeavor: exploring the flipside of the war on terror as he documents Iraq’s descent into chaos, with the neo-realistic poignancy of a Roberto Rossellini. As in the Italian director’s “Germany Year Zero”, much of this chaos is seen through the eyes, gestures and devastatingly lucid observations of a child.

Before the fall

We meet the filmmaker’s 11-year-old nephew Haidar and his siblings in the haven of their Baghdad home in 2002, in those anxious months when George W. Bush and his British ally Tony Blair were busy fabricating a pretext to invade Iraq. The immanence and inevitability of war pervades the movie’s first part, hanging like a cloud over Fahdel’s family as they go about their routine, drinking tea, playing games, studying for exams and gazing indifferently at Saddam Hussein’s omnipresent propaganda on TV.

War preparations – digging a water well, making dried bread, putting sellotape on windows that still bear the traces of previous conflicts – feel like a familiar drill. This is a nation steeped in war, from the devastating conflict with Iran in the 1980s to the Bush wars, passing by the “war with no name” – a reference to the brief bombing campaign former US president Bill Clinton ordered in 1998, dubbed “Monica’s War” by many Western commentators due to its concomitance with the Monica Lewinsky scandal.

Fahdel’s handheld camera bears witness to Iraq’s many layers of destruction, from ancient Assyrian ruins to children maimed by war and the crippling embargo of the 1990s. Its melancholic gaze – alternating between tender close-ups and longing shots of Iraq’s blue skies and ochre landscapes – appears to question whether, this time, the cradle of human civilization might be reduced to dust.

The director’s decision to tell the viewer, as the film unfolds, which of his relatives will eventually be killed, gives the footage a haunting quality, turning the protagonists into walking ghosts. “It’ll be a short war,” warns the extraordinarily prescient Haidar. “But intensive and destructive.”

After the battle

Part two resumes three weeks after the US-led blitzkrieg that toppled the Baathist regime. The fearsome shadow of Saddam Hussein has been replaced by ubiquitous columns of US armoured vehicles. There is a brief sense of relief as people begin to speak out against the deposed regime and dare to hope of a better future. Satellite dishes sprout on rooftops and the critical food rations are handed out for free.

But the mood sours as Iraq’s foreign occupiers prove incapable of running the country and guaranteeing basic security. With Iraq’s bureaucracy and security services disbanded, looters are free to plunder and torch people’s homes and public buildings, murdering and kidnapping as they please. Soon, the foreign invader is seen as a greater scourge than the brutal, unloved regime it toppled, and reports of American abuses draw cries of revenge.

Providing a little context but no commentary, Fahdel documents the widespread destruction wrought by the US bombing and the ensuing chaos. Guided by Haidar and his siblings, he gives a voice to the desperate folks who have lost their homes, jobs and families. It is hard not to squirm in one’s seat when the camera gazes at a throng of grinning children, each holding aloft ammunition picked up in the street and expertly naming the gun type as though it were a Lego model.

Undaunted spirit

Both a war film and a peace film, Homeland is a damning indictment of the catastrophic errors that dragged Iraq and the wider region into its present misery. It sets the stage for the rise of the Islamic State (IS) group and its bandwagon of bloodshed, hatred and destruction. It is also a deeply moving celebration of the people and culture the IS group has set about to enslave and destroy.

At a preview of his film in Paris, Fahdel said Homeland was born out of his urge to draw a portrait of Iraq before it was too late. The sense of impending destruction he felt in 2002, on the eve of the war, inspired his focus on the tiny details of life. Every shot of a scuttling cat, a drowning bee, a bustling bazaar, a date picker perched atop a palm tree, feels like a testament to a doomed world. “The film ends tragically,” he said. “But the situation now is far worse.”

But amid all the misery, there is an undaunted spirit running through the film. It survives in the wicked sense of humour of Iraqis long accustomed to corruption, oppression and war. It thrives in the unbroken enthusiasm of Haidar and his friends, able to make a game out of the slightest dirt mound. It radiates from young girls’ dogged insistence on completing their education even as their world teeters on the brink.

It took more than a decade for Fahdel to get over his family’s tragedy and look back at the 120 hours of footage he accumulated over 17 months. It would take him another two years to edit and produce the film, a task he undertook alone after production companies turned him down. He said it was his duty to complete the movie and help rebuild Iraq’s “audio-visual memory”. Those lucky enough to view this essential film will feel much the richer.

http://www.france24.com/en/20160210-homeland-iraq-year-zero-film-review-abbas-fahdel-baghdad-bush-saddam-hussein


MEDIAPART_charte_graphique.ai

HOMELAND : IRAK ANNEE ZERO Partie 1 : Avant la chute / Partie 2 : Après la bataille Un film de Abbas Fahdel, Nour Production, 2016.

Il y a un peuple irakien. Le peuple irakien est un peuple martyr. Ces deux énoncés peuvent paraître deux banalités. Bien sûr, il y a un peuple irakien, qui en doutait ? Il a subi trente ans de dictature, trois guerres et un embargo. C’est un peuple martyr. Encore faut-il que ces énoncés prennent forme dans la conscience.

Il y a un peuple irakien. Le peuple irakien est un peuple martyr. Ces deux énoncés peuvent paraître deux banalités. Bien sûr, il y a un peuple irakien, qui en doutait ? Au cours des cinquante dernières années, il a subi trente ans de dictature, trois guerres et un embargo, son territoire fait l’objet d’une guerre civile impitoyable. Rien de nouveau à dire que c’est un peuple martyr.

Encore faut-il que ces énoncés prennent forme dans la conscience. Tout n’est pas langage. Il faut en finir avec le « linguistic turn ». Les énoncés flottent dans l’air, ils sont toujours un peu déjà là, « words, words, words », jusqu’au moment où ils trouvent, ou sont trouvés par, le juste catalyseur qui les projette dans notre conscience où ils se constituent en réalité. On dit « prendre conscience ». C’est-à-dire être saisi par le réel.

Dans sa douceur, sa fluidité, entre défilement de routes et scènes de la vie familiale, le film de Abbas Fahdel, est d’une rare violence. Quand, dans ma vie, ai-je vu un film où l’on suit un jeune garçon, tout sourire et humour, dont la présence éclaire le climat de guerre d’un sentiment que « la-vie-continue-en-dépit-de-tout », pour assister – quoique sans image explicite – à sa mort ? Non jouée, mais réelle. Heidar est mort. Le neveu du réalisateur, qui l’a suivi et guidé dans ses pérégrinations cinématographiques à Bagdad, se fait tuer d’une balle perdue de mitraillette. On avait beau être averti dès le premier volet du diptyque, on se disait qu’on avait peut-être mal lu, ou que cela resterait extérieur au film, puisque, après tout, il avait survécu à la « guerre » proprement dite. Mais non. Le film nous confronte brutalement à la mort de cet enfant – et, aussitôt, à l’impossibilité de filmer plus.

Avais-je déjà vu quelque chose d’aussi violent ? Jamais. Au point que l’on en voudrait presque au réalisateur d’avoir osé mettre cela dans un film. Fallait-il  instrumentaliser la mort de son neveu pour faire œuvre malgré tout ? N’est-ce pas flirter avec le « snuff movie », quelle que soit la justesse des intentions ? Etait-il bien loyal d’utiliser ce ressort hyper-pathétique pour forcer le barrage de nos consciences ? Il faut que Fahdel nous explique que cet événement est celui qui a rendu impossible la poursuite de ce film, et impossible son montage pendant plus de dix ans, puisqu’il relate des événement de 2003, pour admettre le procédé, pour y voir un hommage, et peut-être une manière de donner un sens à l’événement, lui donner une chance d’être ressaisi autrement que dans son insupportable brutalité qui n’admet pas de représentation. Il y a quelque chose comme un « A la guerre comme à la guerre ». « Voilà ce qui s’est passé. J’ai choisi de le montrer parce que cela s’est passé ». « Cette mort est l’effet de la guerre, et si montrer cette mort peut aider à faire saisir ce qu’a été cette guerre à un public européen ou américain, alors j’ai raison de la montrer. »

Plus qu’une instrumentalisation, le film prend une valeur d’accusation : combien d’enfants morts, combien de Heidar – combien de Aylan Kurdi – faudra-t-il pour que vous nous regardiez ? Pour que vous nous voyiez tels que nous sommes – « if you prick us, do we not bleed ? » – : non pas comme une figure lointaine d’un « autre » hostile ou curieux à observer, mais comme une classe moyenne vivant dans une banlieue pavillonnaire et regardant « Mr Bean » à la télé. Une famille aspirant simplement à travailler – dans des hôpitaux, des écoles, des administrations, dans l’art ou le business –  et à élever ses enfants. Non pas des fous sanguinaires ou des sauvages, ni des « damnés de la terre » comme damnés par essence, mais des gens normaux. Des occidentaux en vérité – et tant pis pour l’anthropologie : si la pensée de l’altérité doit servir d’alibi pour cautionner l’indifférence, alors choisissons l’ethnocentrisme qui rend sensible au malheur des autres.

La mort de Heidar est le traumatisme narratif par lequel le film nous frappe au cœur. Apparemment il nous faut un « shoot » de cette force pour que des images parviennent à notre conscience dans l’océan des images où nous baignons. Mais le film prend et lève parce qu’il parle de bien d’autres choses. La magie de la présence opère à travers la représentation, à mesure que nous sommes emmenés dans les lieux de Bagdad.

C’est l’anti-« Démineurs ». De son titre original The Hurt Locker, le film de Kathryn Bigelow (2008) signifie littéralement quelque chose comme : « là où on est coincé et où ça fait mal ». On pourrait le traduire par « la guéhenne ». Film entièrement centré sur les Américains, il thématise explicitement l’incapacité à communiquer avec les Irakiens, relégués au rôle de « hostiles ». Les seules tentatives pour créer des liens se soldent par de terribles échecs, que ce soit le gentil médecin qui essaye de communiquer avec la foule et s’évapore dans une explosion, ou, là encore, le petit garçon qui meurt dans les bras du sergent James (Jeremy Renner). L’armure de protection anti-explosion du démineur devient la métaphore de l’impossible relation avec le monde extérieur, comme un scaphandre dans un monde sous-marin – qui est un monde souterrain et brûlant : la guéhenne, c’est-à-dire l’Enfer.

Au-delà de son apparent réalisme, le propos allégorique du film de Bigelow est relativement clair. Or, précisément, c’est de l’allégorie qu’il faut sortir – et de la caverne aux simulacres en même temps – pour voir « le réel ». On peut toujours dire qu’un documentaire n’est pas plus « réel » qu’un film de fiction. Mais c’est faux. Un documentaire est une construction, le réel y est construit, soit. Mais toute construction n’est pas une fiction. Dans Démineurs, on voit mourir un enfant, mais il ne meurt pas vraiment. Dans Homeland, on ne voit pas mourir Heidar, mais il est vraiment mort. Le documentaire lutte contre la fiction. Le « Homeland » irakien contre le « Homeland » américain : le petit documentaire auto-produit qui essaye de montrer une vraie famille irakienne, contre la série-phare de la chaîne « Showtime », où la famille américaine se regarde en miroir déformant à travers les aventures du père de famille revenu d’Irak et converti au Mal.

Homeland, le documentaire, croît dans la conscience comme une bulle, dont la circonférence finit par se fondre dans l’espace de mes représentations du monde réel, donnant une place nouvelle à ce qui n’existait jusque-là que comme une abstraction : « les gens en Irak ».

Il est vrai que le monde mondialisé est bien exigeant avec nous. A quelle génération a-t-on demandé tant d’empathie avec tant de « gens » dans le monde ? Comme le disait quelqu’un dans le public, il faudrait voir le même film pour les Syriens, pour les Palestiniens, pour les Lybiens (bien oubliés en ce moment, l’éveil sera rude), pour tous les peuples en souffrance, à chacun de définir ses causes. On pense à Mafrouza, le documentaire-fleuve d’Emmanuelle Demoris, filmant la vie des gens qui habitaient les caves de cette nécropole en marge d’Alexandrie. Là aussi, le film faisait surgir une réalité et tendait à abolir les frontières de l’altérité – à les modifier en une altérité du prochain, plutôt qu’une altérité du lointain, créant de la communication, de la circulation entre ceux qui voient et ceux qui sont vus. Mais Mafrouza nous parlait d’un microcosme spécifique, aussi bien dans l’espace que dans le temps, puisque le site fut rasé peu après le film.

Bagdad n’est pas un microcosme. Homeland, précisément, la rend à sa dimension cosmopolitique. Il en retisse les liens avec les « gentes », au sens où l’on parle du « droit desgens » : le tissu des peuples qui couvrent la planète et forment le monde.

Signe des temps, Boussole, le roman de Mathias Enard (Actes Sud, 2015), tisse lui aussi les liens de l’Europe avec cet « Orient » dont tous les Edward Said du monde n’arrivent pas à purger l’« Occident ». Il s’agit beaucoup de la Syrie dans le roman d’Enard, et de mettre au jour toute l’histoire commune qui relie un « Orient » et un « Occident » dont la polarisation constitue en fait un système identitaire bien plus que l’opposition entre des essences culturelles hétérogènes : « Entretemps, il y avait eu Félicien David, Delacroix, Nerval, tous ceux qui visitèrent la façade de l’Orient, d’Algésiras à Istanbul, ou son arrière-cour, de l’Inde à la Cochinchine ; entretemps, cet Orient avait révolutionné l’art, les lettres et la musique, surtout la musique (…) la révolution dans la musique au XIXe et XXe siècles devait tout à l’Orient, il ne s’agissait pas de « procédés exotiques », comme on le croyait auparavant, l’exotisme avait un sens, il faisait entrer des éléments extérieurs, de l’altérité, (…) un large mouvement qui rassemble entre autres Mozart, Beethoven, Schubert, Liszt, Berlioz, Bizet, Rimski-Korsakov, Debussy, Bartok, Hindemith, Schönberg, Szymanovski, des centaines de compositeurs dans toute l’Europe, sur toute l’Europe souffle le vent de l’altérité, tous ces grands hommes utilisent ce qui leur vient de l’Autre pour modifier le Soi, pour l’abâtardir, car le génie veut la bâtardise, l’utilisation de procédés extérieurs pour ébranler la dictature du chant d’église et de l’harmonie, pourquoi est-ce que je m’énerve tout seul contre mon oreiller maintenant, sans doute parce que je suis un pauvre universitaire sans succès avec sa thèse révolutionnaire dont personne ne tire aucune conséquence. » (Boussole, p. 120).

Le roman de Mathias Enard voit large. Il a une visée très ample, littérature, architecture, musique, c’est dans toute la culture qu’il piste la compénétration de mondes qui ont fini par appartenir au même monde, dans leurs différences mêmes. Il y aurait aussi à faire l’histoire de tous ceux qui ont voyagé contre le voyage, de Rimbaud à Nizan, de Levi-Strauss à Enard, pour en finir avec l’altérité, pour psychanalyser l’exotisme, pour faire advenir de la présence (ce qui n’est pas la même chose que du même) en deçà des représentations du lointain.

Donc il y a un peuple irakien. Le film construit en diptyque, présente un Avant et un Après la deuxième guerre du Golfe, entre février 2002 et avril 2003, avec une ellipse pendant la période de la guerre. Comme dans Le Désert des Tartares, le réalisateur, après avoir attendu le déclenchement d’une invasion tant annoncée, était rentré en France quelques semaines avant son déclenchement. Très traditionnel dans sa forme, adoptant sans complexe le format de la vidéo familiale, ou même touristique, parfois même de manière complaisante, le film vaut surtout par ce vis-à-vis temporel. Sans doute ne faut-il pas trop de recherche formelle quand les circonstances filmées sont si puissantes par elles-mêmes. Le contraste entre l’ordinaire et l’extraordinaire n’en est que plus poignant.

La vie quotidienne dans le premier volet est traversée de part en part d’une incroyable tension. Tout paraît prémonitoire puisque nous savons, nous spectateurs, que la guerre imaginée par les protagonistes va effectivement avoir lieu. On regarde chaque détail, chaque visage, chaque paysage, et l’on se demande ce qui, et qui, sera encore debout, après. Et il ne s’agit pas d’acteurs. Les visages des enfants dansant devant la caméra, comme dans n’importe quel film de vacances, prend la valeur très forte d’un témoignage de vie, d’une vie que l’on sait hautement menacée, et qui nous jette au visage : où sont-ils aujourd’hui, 13 ans après le film, dans l’Irak d’aujourd’hui, ces enfants qui nous font des grimaces ? Abus de pathétique ? Sans doute. Mais ce ne sont pas des acteurs, ce sont de vrais enfants. Les filmer, les garder dans le film, ce n’est pas seulement pour nous que cela vaut, c’est pour eux aussi, pour eux d’abord peut-être. Ce film aura peut-être été leur tombeau, c’est-à-dire leur vaisseau vers notre regard. Et le cinéaste semble remplir son arche et remplir son arche, et tant pis pour ceux qui n’en peuvent plus de tous ces enfants, parce que ces images sont peut-être tout ce qu’il reste d’eux aujourd’hui.

Le deuxième volet est tout aussi étonnant. Pour des raisons inverses. La « guerre », finalement, a duré à peine un mois (20 mars-15 avril 2003). Tout le monde est encore là. Les vitres n’ont pas volé en éclat. Tout est pareil, mais tout est différent. Une deuxième fois, mais différemment de la première. On voit les gens qui se réveillent dans les décombres de trente ans de dictature impitoyable. Tout un système de vie est inversé. Les anciens baathistes sont mis au ban. Les portraits de Saddam sont arrachés des manuels scolaires. L’armée d’occupation est partout, mais l’insécurité règne. L’état de guerre hobbesien s’immisce peu à peu dans la vacance de la souveraineté, et l’on sent qu’entre les bandes armées et l’armée américaine, l’espace possible pour une vie civile ordinaire est de plus en plus restreint.

L’apparente normalité recouvre une situation absolument critique. Rétrospectivement, il est frappant de voir que les Irakiens à l’époque, en 2003, pouvaient espérer une véritable normalisation à court terme. Au bout du compte, l’invasion aurait mis fin à l’ère Saddam Hussein et permis l’avènement d’un régime républicain, rendant l’Irak au Concert des Nations. On mesure d’autant mieux l’étendue du désastre aujourd’hui. De ce point de vue, le documentaire est très lourdement à charge contre les Etats-Unis. Sans avoir besoin de l’expliciter, c’est à eux qu’il semble s’adresser en premier. Il renvoie aux Américains, abreuvés d’images de leurs propres militaires, l’image en miroir d’une famille irakienne middle-class dévastée par la guerre qu’ils ont apportée – a priori pas du tout ce qu’ils s’attendaient à voir au milieu de « Desert Storm ».

On aurait tort de croire cependant que les citoyens américains soient si peu sensibles à l’illégitimité de cette invasion – y compris hors des milieux intellectuels new-yorkais. Car il y a aussi un « autre côté » aux Etats-Unis. Dans The Other Side (Roberto Minervini, 2015), un autre documentaire, lui aussi un diptyque, consacré à des junkies de la Louisiane du Nord et à une milice paramilitaire du Texas, le discours sur la guerre en Irak n’est pas forcément celui auquel on s’attendait. Où l’on voit que le patriotisme à l’américaine ne fait pas nécessairement bon ménage avec les décisions de l’Etat fédéral, lui-même perçu comme un envahisseur. Un instructeur paramilitaire développe ainsi tout une théorie critique contre le « nation-building » à l’étranger. Il met très sérieusement en garde ses camarades contre le décret prochain de l’état d’urgence par Obama et l’invasion des Etats-Unis par les Casques bleus. D’où la nécessité d’un entraînement militaire dominical intensif. Avec une obsession : « We have to protect our families ». Le film de Fahdel, si cet instructeur le voyait, ne viendrait en rien bousculer ses représentations. Il viendrait sans doute au contraire conforter ses sentiments anti-fédéraux et l’idée que ces pères de famille texans sont, eux aussi, une sorte d’Irakiens de l’intérieur.

Emmanuel Pasquier. Février 2016.


DhQb8

L’Irak au cinéma : un lent cheminement vers l’image de l’autre

irak-titre

Depuis près d’un an qu’il fait le tour du monde, Homeland : Irak année zéro collectionne les prix en festivals, suscitant partout où il passe émotion vive et longs débats. Divisé en deux parties de près de trois heures chacune, cette chronique de la vie d’une famille irakienne pendant les semaines qui ont précédé, puis celles qui ont suivi l’invasion américaine de 2003, adopte la forme simple du cinéma direct, guidée par un point de vue humaniste, un amour des personnages, une modestie évidente face à la lame de fond dévastatrice de la guerre en marche. Le film n’en accomplit pas moins un geste décisif dont la valeur morale et la force politique se mesurent à la conviction qu’avait son auteur, Abbas Fahdel, au moment de le faire, d’agir au nom d’une impérieuse nécessité. « Je souffrais de la représentation qu’on donnait de l’Irak en Occident,confiait-il au Monde dans un entretien donné à l’occasion de la sortie du film. Je n’y retrouvais ni le pays ni les hommes. Vingt-cinq millions d’Irakiens étaient sans visage ».

Ces phrases résonnent avec les arguments que développait Serge Daney en 1991, dans la série d’articles qu’il signa, dans Libération, sur la guerre du Golfe à la télévision. « L’ennuyeux avec le film War in the Gulf, c’est qu’un des acteurs inscrits au générique n’est jamais là. Ni dans les rares images qui nous arrivent, ni dans celles dont l’absence, depuis des mois, devrait nous peser, on ne voit le peuple irakien. On parle de lui, on le plaint, on parle en son nom, mais on ne le voit pas. Comme s’il y avait trop intérêt à le faire passer le plus vite possible au rang de victime ou de martyr, ce qui est une bonne opération pour les politiques de tout bord. Car cet après-guerre dépend déjà de la façon dont les uns et les autres feront le plein des deux seules matières premières de la région : à savoir le pétrole d’un côté et le martyre de l’autre » (« L’Acteur manquant », Libération, le 18 février 1991).

Le peuple très vivant de « Homeland »

Réfugié en France depuis le début des années 1980, Abbas Fahdel a tourné Homeland auprès des siens. Lorsqu’il arrive, quelques semaines avant l’invasion, la tension est palpable. Les adultes ont en mémoire la précédente guerre du golfe, l’énergie est mobilisée par des opérations spécifiques – sécher le pain, calfeutrer les fenêtres, accumuler des réserves d’eau… – mais la guerre est encore à venir, et sa terrible dramaturgie n’a pas encore figé les postures des uns et des autres. Les personnalités ont tout loisir de s’épanouir devant la caméra, révélant au public occidental des frères humains, un peuple en vie, dont l’existence n’avait jusqu’à présent pas été figurée à l’écran.

Les médias, corsetés par les impératifs d’une propagande tentant d’empêcher l’éclosion d’un mouvement contestataire semblable à ceux qu’avaient inspirés les images de la guerre du Vietnam, ont relayé le fantasme de la guerre propre, sans morts, menée à coups de frappe chirugicale, par le biais de pools de journalistes tenus à distance du théâtre des opérations en 1991, remplacés en 2003 par le système à peine plus autonome, du journalisme embedded. Ni la télévision, ni le cinéma n’ont beaucoup montré l’Irak autrement que comme un champ de bataille.

La guerre résumée à de « terribles détails »

Par rapport à la description qu’en faisait Serge Daney, en 1991, la représentation du peuple irakien dans les médias a peu évolué de fait. Avec ses figures de mères éplorées, d’hommes hébétés, de victimes civiles érigées en martyrs, The Dreadful Details d’Eric Beaudelaire en propose une forme de synthèse. Dans ce célèbre diptyque qui provoqua des remous lors de sa présentation, en 2006, au festival de photojournalisme Visa pour l’image, dont l’aspect cinématographique souligne le caractère « mis en scène » (il a de fait été réalisé en studio, à Hollywood), le photographe articule une imagerie du champ de bataille issue de la tradition picturale classique et les clichés avec lesquels les médias représentent les conflits armés contemporains. Les victimes irakiennes y figurent ainsi au milieu d’une scène de carnage dont l’enjeu reste indéchiffrable, où les soldats américains sur le qui-vive, incapables d’identifier l’origine de la menace, apparaissent prêts à tirer sur tout ce qui bouge, tandis qu’un journaliste occidental embedded a naturellement trouvé sa place, et qu’un Irakien posté au balcon du premier étage, filme l’action avec un téléphone portable.

Battle for Haditha (2007)

Tout le storytelling de la guerre d’Irak est là, qui a structuré à des degrés divers un vaste corpus de films sur le conflit irakien. Réalisés à Hollywood dans leur grande majorité, ces oeuvres adoptent naturellement le point de vue de l’Amérique qui se donne le plus souvent, en l’occurrence, comme embedded. De Battle for Haditha de Nick Broomfield (2007) à Démineurs de Kathryn Bigelow (2008), de Green Zone de Paul Greengrass (2010) à American Sniper (2014) de Clint Eastwood, l’image secouée, captée avec une caméra qu’on dirait « embarquée », est devenue la norme de ce cinéma.

Au cinéma, héros archétypaux

et conflit illisible

Sam Mendes

Face au soldat hébété, traumatisé par l’absurdité du conflit invisible qu’était la guerre du Golfe (Jarhead, la fin de l’innocence de Sam Mendes, 2005), qui portait encore la mémoire des (anti-)héros des films sur le Vietnam, le peuple irakien est aussi invisible qu’il l’était dans le flux d’images vides que crachaient en continu les chaînes d’information pendant la guerre du Golfe.

Dyptique The Dreadful Details d’Eric Beaudelaire

Les héros américains évoluent aux confins du patriotisme et de la psychose, accros aux shoots de danger et de violence que leur procure la guerre (Démineurs etAmerican Sniper). Les Irakiens, eux, n’existent qu’en tant qu’ils représentent une menace potentielle – figures sans visage repérées via le viseur d’un fusil, kamikaze camouflé, ou repentant, femme voilée suspecte (que cache-t-elle sous sa longue robe noire ?), sniper déshumanisé (par opposition au sniper américain assailli d’affects contradictoires)…

Et rien n’interdit d’envisager les personnages du beau documentaire Of Men and War de Laurent Bécue-Renard, comme des projections de ceux de Bigelow et Eastwood – qu’il s’agisse des vétérans américains souffrant de stress post-traumatique ou des fantômes des civils qu’ils ont massacrés, ces hommes, femmes et enfants qui reviennent nuit après nuit hanter leurs cauchemars.

Ces films, comme d’autres, insistent sur le côté illisible du conflit, la nature incertaine de l’ennemi, la perte de repères aussi bien physiques que moraux à laquelle sont confrontés sur place les soldats américains, qui aboutit à faire tant de victimes parmi les civils. C’est toute l’idée de cette scène d’American Sniper, où tandis que se fendille la carapace du super-sniper interprété par Bradley Cooper, et qu’il annonce à sa femme au téléphone qu’il est prêt à rentrer, le combat se trouve progressivement enveloppé dans un gigantesque nuage de sable. D’où viennent les tirs ? Qui est l’ennemi ? Plus rien n’est clair, sinon qu’il faut tirer pour éviter de tomber soi-même.

Le cinéma ne s’est pas contenté de remettre en scène l’imagerie des médias officiels. Entre 1991 et de 2003, Internet est né, et avec lui la possibilité de faire ses propres images et de les partager. Le monumental stock d’images qui s’est soudain retrouvé à la disposition de tous a changé non seulement la manière dont on pouvait percevoir la guerre, mais sa nature même, comme en a attesté l’onde de choc provoquée par la révélation des sévices infligés aux détenus de la prison d’Abou Ghraib.

Comme le dit un des intervenants de Standard Operating Procedure (2008), un documentaire réalisé par Errol Morris sur ce sinistre épisode : « Vous pouvez tuer des gens, leur tirer dessus, leur faire exploser la tête… Tant que ce n’est pas photographié, vous ne risquez rien. Si des photos existent, en revanche, vous êtes cuits ». C’est le cœur de l’intrigue de La Vallée d’Elah (2007) de Paul Haggis, où l’aura d’un soldat américain récemment mort se désintègre – et avec elle tout l’honneur de l’armée américaine et le bien-fondé d’une guerre qui fut promue comme un combat du bien contre le mal – quand refont surface des images le montrant en Irak en train de se livrer à la torture.

Le point de vue de l’Amérique

Le rôle d’internet

Nick Broomfield

Kathryn Bigelow

Clint Eastwood

Errol Morris

Jarhead (2005)

Démineurs (2008)

American Sniper (2014)

Standard Operating Procedure (2008)

En reconstituant l’histoire d’un viol commis par des soldats américains (la même, à peu près, que celle qu’il avait mise en scène en 1989, dans le contexte vietnamien, dansOutrages) sous la forme d’un collage d’images de toute nature piochées sur Internet (télé française, informations irakiennes, images amateur filmée par les marines…), Brian de Palma redéfinit avec Redacted le cinéma comme une machine à recycler des images – et délégitime relativement, dans le même geste, toute instance productrice de discours, à commencer par la propagande américaine. Pas plus que les autres, toutefois, ce film n’a été capable de figurer le peuple irakien autrement qu’avec le visage archétypal de la victime. Contrainte par l’absence d’images documentaires, la fiction était impuissante à lui en esquisser un autre – qui fût singulier et vivant. Les six heures de Homeland, de ce point de vue, changent radicalement la donne. Elles pourraient bien inspirer de nouveaux récits, qui rendent enfin justice à l’existence du peuple irakien.

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/cinema/visuel/2016/02/12/l-irak-au-cinema-un-lent-cheminement-vers-l-image-de-l-autre_4864175_3476.html#mfhLhXESdDcCs7vZ.99


logoParisien-292x75

“Homeland: Irak, année zéro”: chronique bouleversante d’un Irak qui bascule

Le réalisateur Abbas Fadhel (c) brandit le trophée du meilleur film qu'il vient de remporter, à côté du cheikh Majid bin Mohammed bin Rashid, lors de la seconde édition du festival du film de Dubaï, aux Emirats arabes unis, le 15 avril 2009
Le réalisateur Abbas Fadhel (c) brandit le trophée du meilleur film qu’il vient de remporter, à côté du cheikh Majid bin Mohammed bin Rashid, lors de la seconde édition du festival du film de Dubaï, aux Emirats arabes unis, le 15 avril 2009(AFP/KARIM SAHIB)

Avant la guerre, après la guerre. Dans le documentaire “Homeland: Irak, année zéro”, le réalisateur irakien Abbas Fahdel raconte un moment d’Histoire au travers de la chronique douloureuse et tendre de sa propre famille, filmée avant et après l’invasion américaine de 2003.

Ce film “impressionniste”, comme le décrit l’auteur, sans commentaires et sans interviews, en salles mercredi, est exceptionnel tant par sa durée (près de cinq heures) que par sa valeur historique.
La première partie dure de février 2002 à début mars 2003. La seconde couvre quelques mois après l’invasion américaine. La guerre à proprement parler, qui ne dura que quelques semaines, n’est pas filmée, donnant paradoxalement encore plus de force au documentaire.
“En 2002, lorsque la menace d’une guerre s’est précisée, j’ai compris que l’Irak de ma jeunesse, celui que j’avais quitté pour venir étudier le cinéma à Paris, était en passe de disparaître”, raconte dans le dossier de presse le réalisateur.
Abbas Fahdel retourne alors à Bagdad et filme sa famille au quotidien, essentiellement dans le huis clos de la maison, du jardin et de la terrasse.
Par petites touches, se dessine alors le portrait d’un Irak aujourd’hui disparu, les derniers mois d’un pays malade, sous le joug d’une dictature aussi effrayante que kitsch.
De la télévision, perpétuellement allumée, sortent les odes à la gloire de Saddam Hussein, “orgueil des Arabes” et “soleil de l’existence”. Aucun membre de la famille du réalisateur ne se risque à parler politique devant la caméra. Trop risqué.
Mais Fahdel filme un climat, une atmosphère. Le quotidien rythmé par les coupures d’eau et d’électricité, les effets de l’embargo international en vigueur depuis plus d’une décennie, les souvenirs des guerres passées, Iran/Irak, guerre du Golfe en 1991… et la crainte mêlée d’excitation de celle à venir.
Le président américain George W. Bush a placé l’Irak de Saddam sur l'”axe du mal”. Dans le salon de la famille de Fahdel, le petit écran montre des images de manifestation anti-guerre en France.
Comme toutes les familles irakiennes, celle du réalisateur se prépare. On fait des stocks de riz et de lentilles, on creuse un puits dans le jardin, des jeunes femmes hilares s’entraînent à mettre des couches de bébé sur le visage “en cas d’attaque chimique par les Américains”…
Etrangement, il y a encore beaucoup de légèreté. La guerre éclate le 23 mars, alors que le réalisateur est rentré en France. Il retourne à Bagdad quelques semaines après.
– Descente aux enfers –
Et c’est à la lente descente vers le chaos qu’assiste le spectateur dans cette deuxième partie. Cette fois-ci, Fahdel filme beaucoup en extérieur. Il accompagne ses nièces à l’université, découvre le Bagdad ravagé, tumultueux et sous occupation d’après-guerre. Convois américains. Barrages. Embouteillages monstres. Destructions.
Dans une scène poignante, il accompagne son ami Sami Kaftan, acteur irakien “aussi connu en Irak que Gérard Depardieu en France”, sur les lieux détruits des studios de cinéma de Bagdad.
“On peut se venger d’un régime, mais pourquoi se venger d’une culture? Pourquoi?”, pleure l’acteur en ramassant des monceaux de pellicules de films jonchant le sol.
Le spectateur est aussi témoin de la montée des tensions, du ressentiment anti-américain, de la peur face à l’insécurité, au chaos, aux pillages. La catastrophe apparaît inexorable à travers les scènes de la vie quotidienne, comme une nuit hallucinante de tirs secouant un quartier de Bagdad.
Restent la joie de vivre et l’espoir des jeunes neveux et nièces du réalisateur, les moments tendres d’un quotidien encore possible. “Qu’est-ce que tu es belle aujourd’hui!”, s’exclame le jeune Haidar, neveu de Fahdel et héros du film, en regardant sa soeur sur son trente-et-un pour ses examens de fac.
Et puis la tragédie irakienne fait brutalement irruption dans la famille. Haidar est tué par une balle perdue, de tireurs inconnus, un soir à Bagdad.
Après ce drame, les rushes resteront dans leur boîte pendant dix ans. Le film, dit Abbas Fahdel, est aussi “une manière de ressusciter” cet enfant.

logo

“Homeland – Irak Année Zéro” : une projection poignante aux Rencontres Cinéma de Manosque

  • 11h57 – 05 février 2016

Le film d’Abbas Fahdel, projeté jeudi à Manosque, plonge les spectateurs dans le quotidien des Irakiens en 2003.

«Ce film, c’est ma vie», précisait Abbas Fahdel aux Etats Généraux du film documentaire de Locarno qui ovationnait en août dernier la première présentation de “Homeland – Irak Année Zéro”. En effet, ce film est la longue chronique de la longue expérience de la guerre au quotidien imposée aux Irakiens par le cours de l’Histoire. Abbas Fahdel, qui vit et travaille en France depuis l’âge de 18 ans, est retourné voir sa famille en 2003 alors que l’intervention américaine se précisait. Il a filmé les siens avec le secret espoir d’aider chacun à prendre un nécessaire recul avec l’urgence quotidienne. “Homeland” retrace cette vie de tous les jours en deux volets qui constituent deux volets distincts et complémentaires.

«Avant la chute» donne à vivre ce climat troublant de l’attente de la guerre annoncée. La guerre au quotidien, les Irakiens savent ce que c’est, celle de 1991 est encore dans les mémoires. Ils savent qu’ils vont manquer d’électricité, d’eau potable, de carburant, que les vivres seront rationnés, qu’il faut consolider les maisons, qu’il sera difficile de circuler. Chacun se met alors à faire, à son niveau et à sa place, les préparatifs nécessaires : un puits est installé dans le jardin, une montagne de petits pains est mise en stock dans de grands sacs, les vitres du salon sont consolidées avec du ruban adhésif qui double celui qui reste de la dernière guerre. Toute la famille s’active avec simplicité et dans un climat d’écoute sereine qui contribue à la force du film. Le petit frère Haïdar est simplement«craquant». Pendant ce temps, la télévision déverse en continu des images à la gloire de Saddam Hussein.

«Après la bataille» témoigne d’après la défaite de l’armée irakienne du 20 mars 2003. Il n’y a plus de boussole, le pays est dévasté, les pillards sévissent, la sécurité n’est plus assurée, la population commence à s’armer, les filles ne sortent plus de peur d’être enlevées, la colère monte au rythme de la peur qui s’installe. La caméra s’embarque dans la voiture qui accompagne les enfants à l’école et à l’université. Avec le comédien et metteur en scène Sami Kaftan, on pénètre dans le désastre des studios de Bagdad où l’on prend la mesure des dégâts, on comprend en quelques images que des pans entiers de l’histoire d’un pays et d’un peuple viennent d’être effacés. Les morts ne se comptent pas. Mais la vie reste là avec la naissance de la toute petite dernière et le sourire paisible que savent garder tous les visages. Abbas Fahdel parle de “Homeland” comme d’un «Projet de Cinéma». Pour le spectateur, c’est simplement une Œuvre, une œuvre juste, vraie, prégnante, qui dit tout ce mal que les hommes savent se faire les uns aux autres mais tout l’amour et tout l’espoir dont ils sont capables. Sans artifices, sans certitudes. Un film grand et beau, qui justifie pleinement qu’on lui consacre les quelque six heures qu’il occupe.

A ne pas rater, les deux projections au Lido dans le prolongement des Rencontres Cinéma de Manosque : “Avant la chute”, lundi 8 février à 18 heures. “Après la bataille”, mardi 9 février à 18 heures.

De notre correspondante Françoise ROUGIER


logo-blog-documentaire2

Le Blog documentaire partenaire d’un film événement en salles dès le 10 février ! « Homeland, Irak année zéro », monumentale fresque de plus de 5 heures, « home movie à résonance universelle » qui nous plonge en Irak, avant et après l’intervention militaire américaine. Le réalisateur Abbas Fahdel sera à Paris pour la sortie du film, et participera à une Première exceptionnelle mercredi prochain dès 17h au MK2 Beaubourg. Réservation indispensable sur Leetchi pour profiter de places à moitié prix – privilège dont vous êtes les seul(e)s bénéficiaires !… Dans l’attente, Benjamin Chevallier vous propose cet entretien réalisé il y a quelques semaines avec l’auteur du film.

Le Blog documentaire : Votre film entretient une résonance singulière avec l’actualité récente. Ces derniers mois, l’Etat français a réagi aux attaques terroristes de Paris par des bombardements sur l’Irak et la Syrie. Et ce, sans que la question des conséquences sur les populations civiles ne se pose vraiment dans le débat public. Comme si les habitants de la région faisaient partie d’une vaste abstraction médiatique. Contre cela, Homeland, Irak année zéro reflète-t-il avant tout un désir de fournir au monde une autre image de votre pays natal, incarnée et vivante ?

Abbas Fahdel : Absolument. Je vis en France depuis 20 ans, et je souffre de l’absence d’images des Irakiens. En 1991 déjà, pendant la première guerre du Golfe, on parlait de l’Irak tous les jours à la télévision, mais paradoxalement, on ne voyait jamais le vrai pays. Et en 2003, encore une fois, on ne voyait que Saddam, les armes de destruction massives, et les plans larges du ciel de Bagdad, de nuit, strié par les bombes américaines. Alors qu’évidemment, au-delà de cela, il y a 25 millions de civils irakiens, dont ma famille et mes amis. A quoi ils ressemblent ? Comment vivent-ils ? Qu’est-ce qu’ils pensent ? Tout cela, personne ne s’en souciait. Mais moi, en tant que cinéaste et en tant qu’irakien, j’ai senti le devoir de le montrer.

Et effectivement, Homeland : Irak année zéro est un excellent antidote pour désamorcer l’idéologie du choc des civilisations.

En tout cas, je serais très heureux qu’il y contribue. Dans les festivals américains qui ont montré le film, certains spectateurs sont venus s’excuser à la fin de la projection pour le mal que leur gouvernement avait pu faire à l’Irak. Ils me disaient qu’ils étaient trop jeunes, qu’ils manquaient d’informations à l’époque…. Ils étaient sous le choc, découvrant que les familles irakiennes ressemblaient en tout point aux leurs !

Et donc, évidemment, à mes yeux, la théorie de l’affrontement Occident/Orient ne tient pas debout. Elle n’est qu’un argument construit pour faire la guerre. Car il n’y a aucune différence fondamentale entre les peuples arabes en général – et irakien en particulier – et les autres. Les Irakiens sont des gens qui partagent les ambitions de tout le monde : ils veulent vivre en paix, éduquer leurs enfants, s’aimer, etc.

J’étais horrifié par la propagande dominante à l’époque de Georges Bush. Le monde entier semblait convaincu que l’Occident allait affronter l’Orient. Que c’était inévitable. Et encore aujourd’hui, il faut rester vigilant car cette idée refait souvent surface, comme après les attentats de Paris par exemple. Certains essaient de nouveau de nous faire croire que les Musulmans sont tous des terroristes. Moi, ma famille est musulmane, on la voit dans le film, et il me paraît clair qu’ils ne se lèvent pas le matin avec l’intention d’aller attaquer l’Europe.

Avec la première partie du film, on devient le témoin des derniers instants d’un Irak sur le point de changer irrémédiablement. Et il n’est pas commun de voir un documentaire parvenir à capter si fidèlement la fin d’une époque, l’Histoire en marche, l’avènement du passé … Existe-t-il encore aujourd’hui des vestiges de cet autre temps ?

Il y a toujours des Irakiens qui essaient de vivre sur place. Mais l’Irak que j’ai filmé n’existe plus. D’abord, géographiquement, le pays a éclaté. Le Nord – le Kurdistan – est indépendant. L’Est se retrouve sous le contrôle de Daesh (y compris la ville de Hit, où j’ai beaucoup filmé). Il n’y a que Bagdad et le Sud qui soient toujours aux mains du pouvoir central. Toutes ces divisions m’attristent beaucoup. Je considère qu’elles représentent un appauvrissement total. Je ne veux pas d’un pays où tout le monde se ressemble, partagent la même religion, la même langue, la même ethnie. Moi, l’Irak que j’ai connu était un pays arc-en-ciel, multiculturel. Aujourd’hui, tous ceux que je connais veulent partir. Y compris mon frère, qui a toujours été très attaché à son pays, mais qui souhaite voir ses enfants grandir ailleurs. Pendant longtemps, à chaque fois que je retournais en Irak, je découvrais avec surprise des gens optimistes, qui avaient envie de se battre et de rester. Ce n’est plus le cas désormais.

Si j’ai fait ce film c’est que, malgré toutes mes craintes, je gardais espoir pour mon pays. L’espoir que la guerre nous débarrasse de Saddam. L’espoir qu’au chaos de l’intervention américaine succède la démocratie. Aujourd’hui je dois dire que je suis nettement plus pessimiste.

Dans la première partie du film, la caméra ne nous emmène que très rarement à l’extérieur, dans les rues de Bagdad. Puis, dans la seconde, nous y sommes plongés constamment. Les langues se délient, les gens ont besoin de s’exprimer, et vous étiez là pour recueillir leurs mots. Comment comprendre cette évolution ?

Dans la première partie du film, sous Saddam, l’espace public n’existait tout simplement pas. Les gens ne pouvaient pas parler. Il y avait d’un côté le leader, le père, le Dieu, et de l’autre, la foule des anonymes sans visages, les Irakiens. La propagande de Saddam avait réduit le peuple à cela. Évidemment, il était strictement interdit de filmer à l’extérieur. J’aurais été arrêté si j’avais essayé, car je n’avais pas d’autorisations – d’ailleurs, je ne voulais pas en demander car je ne voulais pas d’un responsable du Ministère de l’Information qui m’accompagne partout sur le tournage et qui me dise à qui parler. L’Irak sous Saddam, c’était comme la Corée du Nord aujourd’hui … Par la force des choses donc, je me suis d’abord retrouvé à filmer exclusivement à l’intérieur, dans la maison familiale.

Mais une fois le régime tombé, la rue a changé, la parole s’est libérée. Et alors les gens ne parlaient pas que du présent, du chaos causé par l’invasion, mais aussi et surtout du passé, de ce qui leur était arrivé sous Saddam. Toutes ces choses qu’il ne pouvaient pas raconter avant, comme les arrestations et les exécutions. Pourtant, personne n’écoutait leurs histoires ; ni les médias, ni les hommes politiques. Moi, je voulais les entendre, donc je suis sorti filmer dehors.
Au total, vous avez filmé pendant un an et demi. Vous avez dû accumuler une quantité considérable de rushs … Comment s’est déroulée la phase de montage ? Comment construit-on un film de 5h30 ? A quel moment vous est venue l’idée du diptyque ?

Je n’ai eu l’idée de construire le film en deux parties qu’une fois arrivé en salle de montage. Au départ, quand je suis parti tourner, je n’avais aucune idée de ce que tout cela allait donner. Tout pouvait s’arrêter n’importe quand. Ma famille pouvait me dire qu’elle n’avait plus le cœur à être filmée. Les bombes pouvaient commencer à tomber du jour au lendemain. Il pouvait m’arriver quelque chose … J’ai donc filmé pour enregistrer chaque instant, tant que j’étais vivant, tant que la caméra fonctionnait, tant que j’avais des K7.

Ce n’est qu’en 2013, quand j’ai regardé les 120 heures de rushs, que j’ai vu qu’il y avait un film. J’ai tout de suite su qu’il serait long, et qu’il serait en deux parties. Cette structure s’imposait naturellement tant l’invasion américaine marque une rupture immense entre l’avant et l’après. Regarde Haidar ! Dans la première partie, c’est juste un enfant inconscient, il s’amuse à la campagne, il ne s’intéresse pas à la politique du tout … Et quelques semaines plus tard, après les bombardements, c’est une autre personne. Tu l’as vu cette différence ? Elle est énorme.

Le montage m’a occupé pendant plus d’un an et demi. D’abord, j’ai monté séparément les séquences que j’avais tournées, puis je les ai agencées les unes par rapport aux autres, en essayant de respecter la chronologie des évènements. J’ai abouti à un premier montage de 12 heures. Puis à un deuxième de 9h30. Pour enfin arriver à une version finale de 5h30. J’ai dû me séparer de certaines de séquences que j’aimais beaucoup, qui étaient très belles, mais qui ne racontaient pas la guerre. Car mon sujet à moi, dans le film, ça reste la guerre.

Votre neveu, votre nièce, votre frère et votre beau-frère, entre autres, sont autant de piliers sur lesquels reposent le récit. Comment ces membres de votre famille proche sont-ils devenus des personnages de votre film ?

Le casting s’est fait naturellement. J’ai une grande famille, et j’ai tout de suite écarté ceux qui ne voulaient pas être filmés, ou qui avaient un rapport compliqué avec la caméra. Je ne voulais forcer personne. J’ai donc choisi toutes les personnes qui avaient un lien apaisé à l’image. Puis ce sont elles qui se sont emparées du film … C’est exactement cela qui s’est passé avec Haidar par exemple. Même chose mon beau-frère, avec lequel j’ai un rapport d’amitié très fort. Lui, d’ailleurs, incarne quelque chose de très important : on le voit, chaque jour, obligé de faire trois voyages différents pour déposer ses enfants à l’école en sécurité. C’était important pour moi d’avoir un « personnage » qui véhiculait cette réalité. Car, s’il n’y a pas de « Superman » dans le film, il y a une myriade de héros du quotidien, et il en est un.

Et en effet, à de nombreux égards, Homeland : Irak année zéro relève presque du film de fiction !

C’est peut-être l’aspect le plus important à mes yeux. On me pose beaucoup de questions concernant la politique. Et c’est normal. Mais Homeland reste un film de cinéma. Il y a une citation de Godard que j’aime beaucoup et qui explique bien ma démarche : «Tous les grands films de fiction tendent au documentaire, comme tous les grands documentaires tendent à la fiction ». J’ai essayé de construire une histoire, une évolution narrative. De forger un récit.

Il m’a donc paru très important de faire exister les « personnages », et de les distinguer le plus possible les uns des autres. Car avec Homeland, je n’ai pas cherché à raconter un évènement ; j’ai avant tout voulu raconter des personnages, sur une période d’un an et demi. Je voulais raconter ce qui se passait d’historique en Irak, mais à travers les répercussions que cela pouvait avoir sur la vie des gens. La guerre, on en parlait tout le temps à la télévision, avec des interviews d’hommes politiques et des images de destructions. Tout cela ne m’intéressait pas. Moi, ce qui m’intéressait, c’était la manière pour ces gens de traverser une situation aussi exceptionnelle.

Pour finir, je ne fais pas de barrière entre fiction et documentaire. Pour moi il y a du cinéma et du non-cinéma. Il existe beaucoup de fictions qui ne sont pas du cinéma. Et beaucoup de documentaires qui sont du cinéma. Wiseman, Wan Bing, c’est du cinéma. Ce n’est pas parce qu’ils filment des vrais gens, dans de vraies situations, que ce n’est pas du cinéma. Car pour moi, dans leurs films, il y a toujours un point de vue. Et à partir du moment où il y a ce regard, il y a de la création cinématographique.

Dans quelle mesure avez-vous mis en scène ce que le film nous montre ? On a parfois l’impression que les personnes que vous filmez ont été installées dans le cadre par vos soins et qu’elles parlent pour la caméra, tant la situation et les dialogues sont riches de sens. C’est par exemple le cas de cette séquence sur les rives de l’Euphrate, à Hit, dans laquelle votre neveu parle des bombardements avec ses amis…

Parfois, en filmant la réalité, on peut capter des choses absolument formidables, impossibles à saisir sur un plateau de fiction. Quel acteur, aussi extraordinaire soit-il, peut-il être aussi présent à l’écran que Haidar ? Ou que mon beau-frère ? Dans la séquence dont vous parlez, je n’ai rien demandé à mon neveu et ses amis. On est quelques jours après l’invasion : de quoi parleraient-ils sinon de la guerre ? La discussion est née spontanément, je ne crois pas l’avoir provoquée.

Ma mise en scène, je la vois davantage ailleurs. Dans les choix relatifs au cadre par exemple. J’ai notamment décidé de tout filmer avec un objectif grand-angle, qui n’est pas celui de la caméra, car je savais que j’allais souvent me retrouver dans des espaces réduits, et que je voulais intégrer le plus de personnes possible au cadre.

Plus généralement, moi qui aime cadrer à l’épaule, j’essaie de savoir dans chaque instant ce qui compte, ce qui est le plus important, ce qu’il faut montrer donc. Certes, cela se fait instinctivement au tournage, je n’y réfléchis pas sur le moment, je le sens. Mais cet instinct du moment est le résultat d’années de travail et de réflexion, qui, je crois, murissent depuis mon doctorat de cinéma…

Propos recueillis par Benjamin Chevallie


v4logounif-1

Homeland – Irak Année Zéro : La critique

Date : 03 / 02 / 2016 à 10h24

Homeland est un incroyable document historique sur la deuxième guerre du golfe. Un documentaire portant sur la population irakienne avant et après cette guerre et la façon dont les gens vivent et survivent en Irak. C’est aussi un remarquable documentaire dont le générique se limite à un seul nom, celui d’Abbas Fahdel qui en a été le réalisateur, le directeur de la photographie, le monteur et le scénariste.Sentant venir une deuxième guerre du Golfe dont l’Irak serait le point focal, le réalisateur Abbas Fahdel qui vit en France depuis des années a décidé de retourner en Irak filmer les irakiens. Pour cela, il est retourné dans sa famille qu’il a filmée au quotidien chez elle et à l’extérieur.

Ainsi de février 2002 jusqu’à début mars 2003, il est resté en Irak avant de retourner en France pour la naissance de sa fille. C’est cette partie qui est traité dans le premier documentaire Avant la chute.

La guerre s’est déclaré juste après et le réalisateur a eu beaucoup de mal à retourner en Irak, ce qui lui a pris 2-3 semaines. C’est donc après l’arrivée des américains à Bagdad que le deuxième documentaire Après la bataille commence.

C’est un drame qui a mis fin au tournage. Il aura fallu 10 ans à Abbas Fahdel pour que ce dernier se décide à monter les images qu’il avait filmées. C’est le dixième anniversaire de cette guerre qui l’a décidé ainsi que l’envie de montrer un document incroyable aux spectateurs du monde entier et de rendre ainsi hommage aux gens qu’il a filmé.

Le documentaire, malgré sa longueur qui pourrait en rebuter certains, a été couvert de prix dans le monde entier et s’avère être un monument du film documentaire.

C’est une œuvre riche et puissante qui entraîne le spectateur au cœur d’une famille irakienne. On vibre, on rit, on pleure de concert avec ces irakiens qui nous ressemblent tant.

Si la première partie tourne beaucoup autour de la maison familiale et des ses environs, la deuxième s’ouvre plus sur une ville mutilée dont certains lieux comme la radio locale sont entièrement rasés.

La possibilité de circuler est d’ailleurs due à la présence d’un acteur très connu du cinéma irakien qui est resté auprès de d’Abbas Fahdel. La présence de la caméra pouvait ainsi s’expliquer par un tournage.

Mais si un certain nombre de personnes se retrouvent dans Homeland, notamment parmi la famille du réalisateur lui-même, c’est son jeune neveu Haidar qui sert de fil rouge à l’histoire. Ce dernier très présent à l’écran, fort photogénique et attachant, vie sa vie parfois avec insouciance et permet d’entreprendre un étrange voyage au cœur des bagdadiens.

Le documentaire est d’une force incroyable et, guerre oblige, il n’est pas rare de découvrir des personnes qui peu de temps après leur apparition à l’écran sont tuées. De discrets encarts notifient cela et il est difficile de ne pas avoir les yeux embués à la découverte de ces vies brisées.

Si les 6 heures du documentaire peuvent paraître décourageant de prime abord, à l’exception de quelques passages brefs un peu longs (notamment en deuxième partie), on ne voit pas le temps passer, immergé complètement devant ces quelques mois dans la vie des irakiens.

Il faut d’ailleurs féliciter le distributeur Nour Films d’oser sortir en salle un tel film et de le faire partager sur grand écran aux spectateurs.

Le documentaire réussi d’ailleurs le tour de force de montrer sans détours les horreurs de la guerre sans aucun parti pris. C’est l’histoire figée d’un temps passé qui est montré, celle des espoirs, des joies et de la tristesse d’hommes et de femmes qui ne veulent que vivre correctement.

Homeland est un magnifique documentaire qui est un témoin visuel remarquable d’une guerre terrible dont l’Irak ne s’est toujours pas remise à l’heure actuelle. Un film dont les personnages campent des portraits magnifiques de personnes souhaitant vivre dans le pays qu’elles aiment.

Exceptionnel !

Read more at http://www.unificationfrance.com/article42067.html#5doRG29iHYWf7CcC.99

LE MONDE

Lussas : « Homeland », une famille et la guerre en Irak

Le Monde | 20.08.2015

C’est l’un des films événement des Etats généraux du film documentaire de Lussas, organisés du 16 au 22 août : Homeland (Irak année zéro), d’Abbas Fahdel. Une plongée minutieuse dans le quotidien des Irakiens, celui de la famille du réalisateur, avant et après l’intervention américaine de 2003. La caméra est à l’affût de tout, comme s’il y avait urgence à conserver une mémoire avant destruction. Le documentaire fleuve de 5 heures et 34 minutes, découpé en deux parties – l’avant et l’après –, a obtenu le prix du meilleur long-métrage (Sesterce d’or) au festival Visions du Réel, à Nyons (Suisse), et vient d’être primé à Locarno (Doc Alliance Selection Award).

La projection de Homeland à Lussas commencée à 14 h 30, mardi 18 août, s’est achevée vers 22 heures, à l’issue d’un débat. Pendant la pause, vers 17 heures, le réalisateur recevait un message d’un distributeur américain, désireux de sortir le film aux Etats-Unis. Homeland est déjà programmé au New York Film Festival (du 25 septembre au 11 octobre), nous dit-il. En France, le documentaire sortira au printemps 2016.

Citant Godard, selon lequel « un grand film documentaire tend toujours vers une fiction », Abbas Fahdel a choisi ses « personnages » de Homeland, des membres de sa famille. Son beau-frère, ancien ingénieur de la radio irakienne, dont le bâtiment a été détruit ; sa nièce, étudiante, et tout particulièrement son neveu, Haidar, tout jeune adolescent qui devient vite le moteur du film, tant il est vif, drôle, et curieux de la terrible actualité de son pays. Dès le premier volet, le spectateur apprend sa mort prochaine. Il décédera après l’intervention américaine, dans un pays en plein chaos, victime de tireurs inconnus. « Il m’a fallu dix ans pour faire le deuil de Haidar, et replonger dans les rushes », explique sobrement Abbas Fahdel.

« Ce film, c’est ma vie », ajoute le réalisateur, auteur de Nous les Irakiens (2004) – un 52 minutes coproduit par Agat Films – et d’une fiction, A l’aube du monde (2008). Né en Irak, à Babylone, à une centaine de kilomètres de Bagdad, Abbas Fahdel a quitté le pays à 18 ans pour étudier le cinéma, à Paris. « C’était dans les années 1980. J’ai eu pour professeurs Eric Rohmer, Jean Rouch, Serge Daney. J’ai forgé ma vocation de cinéaste pendant mon adolescence, en Irak. Il y avait une trentaine de salles rien qu’à Bagdad ! J’ai découvert les films de Buñuel, de Hitchcock, d’Antonioni, sous-titrés en arabe. Le Mépris de Godard a été une révélation », dit-il.

Quand, en 2002, la perspective d’une intervention américaine se profile, Abbas Fahdel décide de retourner dans son pays. Il avait toujours gardé un vague sentiment de culpabilité depuis son départ. « Tout le monde savait que Bush allait déclencher les hostilités, mais on ne savait pas la date. J’avais peur pour ma famille, et je voulais documenter ce moment historique. »

Le volet 1 du film est une chronique de l’attente, dans un climat troublant, où règne paradoxalement une certaine légèreté. Pendant que la télévision déverse les images à la gloire de Saddam Hussein, les préparatifs rythment le quotidien : un puits est installé dans le jardin, pour que la famille ait de l’eau à peu près potable pendant le conflit ; une montagne de petits pains sera bientôt stockée dans un grand sac ; les vitres du salon sont consolidées avec du ruban adhésif épais et l’on voit encore les traces de celui utilisé lors de la dernière guerre, en 1991, etc. Haidar s’active, presque guilleret : pendant la guerre, il ira à la campagne…

« C’est comme des paysans qui s’attendent à un hiver rigoureux. Ils savent faire », résume Abbas Fahdel. Les Irakiens sont abonnés aux privations depuis plus de trente ans : « Il y a eu la guerre Iran-Irak, de 1980 à 1988, puis, après un court répit, l’intervention américaine de 1991, avec la coalition internationale. Ont suivi les douze ans d’embargo, qui sont peut-être pire que la guerre, et génèrent de la rancœur… Les gens de Daesh, aujourd’hui, c’est aussi la génération de l’embargo. » Entre 2002 et 2003, Abbas Fahdel tournait, tournait, et toujours pas d’invasion américaine. « Je suis reparti à Paris en mars 2003. Trois jours plus tard, l’intervention américaine avait lieu ! Le temps que je m’organise, je suis revenu quelques semaines plus tard. La ville de Bagdad était déjà tombée… »

Dans le volet 2, la famille du réalisateur témoigne de cette guerre qui aboutit très vite, après l’invasion du 20 mars 2003, à la défaite de l’armée irakienne. Mais cette fois-ci, il faut sortir de la maison, aller sur le terrain, filmer les destructions, enregistrer la détresse et la colère des habitants qui se sont encore appauvris. Les pillards sévissent, la police ne fait plus son travail, la population commence à s’armer, les filles ne sortent plus de peur d’être enlevées. Le cinéaste embarque sa caméra dans la voiture de son beau-frère, qui fait le chauffeur et accompagne ses enfants à l’école, à l’université…

Son ami, le comédien et metteur en scène Sami Kaftan, « aussi connu en Irak que Robert De Niro aux Etats-Unis », lui sert de « couverture » pour filmer à l’extérieur. Il lui permet aussi d’accéder aux studios de cinéma de Bagdad, dont on peut constater l’état de ruine, avec des tables de montage hors d’usage, et des montagnes de pellicules abandonnées.

Malgré le désastre, le film garde une certaine énergie, et toujours cette élégance de ne pas montrer l’hystérie ambiante. Le cinéaste fait part de ses sentiments mêlés : «Ce film est contaminé par mon bonheur d’être avec les miens. Et pourtant, l’Irak est invivable. Quand je suis en France, je deviens pessimiste sur mon pays. Tous les jours, on compte une dizaine de morts, mais plus personne n’en parle. C’est devenu la routine. Mais quand j’y retourne, je retrouve un peu d’espoir », dit-il, en évoquant les manifestations de ces dernières semaines : « Une nouvelle génération ose brandir ses slogans : Ni sunnites, ni chiites. On veut un Etat laïque”. »

Enfin, Abbas Fahdel n’est pas peu fier de citer ce commentaire du réalisateur américain engagé Jonathan Nossiter : « Sur sa page Facebook, il dit que Homeland est un bon antidote à American Sniper », le récent film de Clint Eastwood, sur un tireur d’élite envoyé en Irak.

Par Clarisse Fabre
learning-french-news1


 

logo-LIBERATION

«HOMELAND», LE FILM D’UNE GUERRE

Par Guillaume Tion23 octobre 2015 à 18:06

Rencontre avec le réalisateur irakien Abbas Fahdel autour de sa fresque documentaire, où il navigue, cinq heures et demie durant, dans le quotidien d’Irakiens avant et après l’intervention américaine. Une immersion saisissante.

Image extraite de «Homeland» d'Abbas Fahdel.
Image extraite de «Homeland» d’Abbas Fahdel. Photo DR

La veille, le metteur en scène irakien Abbas Fahdel était au festival du film documentaire de Yamagata, au Japon, où il a raflé les prix d’excellence et du jury. Cet après-midi où on l’attrape entre un train et un avion, il sera au Festival international du film de la Roche-sur-Yon, pour une rencontre avec le public après la projection de son monumentalHomeland. Abbas Fahdel est un intermédiaire, un intermittent, un inter quelque chose. Il a passé sa vie entre l’Irak et la France ; il mène depuis quinze ans une carrière entre le réel et la fiction. Il est difficile de le bloquer durant une de ses oscillations transcontinentales.Pour le moment, Fahdel est assis dans une brasserie de la gare Montparnasse, commande un verre de vin et une salade César. Il a une sale tête et des gestes agités. «Je suis en jetlag, je ne dors quasiment pas depuis une semaine. C’est comme pendant mes films. Je ne dors pas pendant le tournage et après je tombe malade ou je m’écroule. Je ne sais pas comment je tiens physiquement.»

Coup de foudre pour «Jules et Jim»

Le titre Homeland n’est pas une référence à la série américaine où Claire Danes roule des yeux tous les quarts d’heure. C’est plutôt un clin d’œil àHeimat, la saga allemande sur un village rhénan. «Savoir qu’une œuvre comme ça existe m’a donné du courage pour construire la mienne. C’est important. J’espère d’ailleurs que mon film incitera des réalisateurs à prendre leur caméra. On sait que le projet vaut le coup quand sa vie en dépend», explique-t-il. De quoi la vie d’Abbas Fahdel dépendait ? De sa famille. Homeland montre, sur une durée de cinq heures et demie, le quotidien de ses proches en Irak, mais aussi de ses voisins, du quartier, de Bagdad et, finalement, de tout un pays, entre 2002 et 2003, avant et après l’intervention américaine. Le spectateur est plongé comme rarement dans un environnement familial autant que dans un contexte politique. Il apprend à creuser un puits, sait pourquoi scotcher les fenêtres en temps de guerre… «J’avais l’obsession de tout enregistrer. J’avais une formule : regarder et garder. Je suis devenu obsédé par les traces.» Le banlieusard Abbas Fahdel choisit alors, en 2002, de laisser en France sa compagne et sa fille de 10 ans pour retourner en Irak : «A quoi sert de vivre ici si ta famille meurt là-bas ? J’ai fait mon testament et je suis parti.»

Image extraite de «Homeland» (photo DR).

Fahdel avait déjà fait le voyage, au début des années 80, mais c’était alors dans le sens contraire, pour se rendre en France étudier le cinéma. Son père, de souche paysanne, travaillait à Babylone dans une prison, où il organisait les repas, et où il a peu à peu été en contact avec les idées progressistes des opposants emprisonnés. Après le travail, le père vendait des crêpes à la sortie des salles de ciné. Son fils Abbas l’accompagnait et, dans la foulée, voyait-revoyait-rerevoyait les comédies musicales égyptiennes ou indiennes, les westerns spaghettis, les films italiens… tout ce qui n’était pas américain. A 18 ans, dans le jardin de l’Institut français de Bagdad, il assiste à une projection de Jules et Jim.Coup de foudre qui l’incite à prendre la direction de Paris, où sans argent ni contact il va apprendre la langue, s’inscrire en fac et finir doctorant en cinéma dix ans plus tard.

Cette époque de la guerre Iran-Irak, il ne la passe pas à Bagdad mais à Bagnolet (Seine-Saint-Denis), dans un étage d’une maison loué à des étudiants. Il ne veut pas retourner au pays où il serait enrôlé sous les drapeaux. «Je ne voulais ni tuer ni être tué», tout comme son voisin de chambre, un Iranien. Pendant vingt ans, Abbas écrit sur le cinéma pour des revues arabes et prend des nouvelles de sa famille par le biais du téléphone ou du courrier. «Ceux qui restent de ma génération sont considérés comme des survivants qui ont traversé la guerre Iran-Irak, la guerre de 1991 et celle de 2003.»

Les langues se délient

Le visionnage de Homeland, qui devrait sortir en salles le 10 février 2016, est à considérer comme une expérience dont le point de force se situe au début de la seconde partie. La guerre est passée, Saddam est en fuite, les soldats américains sont là. Les Irakiens ne leur sont pas hostiles, mais quelque chose cloche : des routes sont barrées, il faut emprunter d’autres itinéraires, montrer ses papiers. La vie a changé. Les langues se délient sur Saddam le tyran. Peu à peu la présence des mitrailleuses irrite, effraie. Les soldats deviennent des intrus, ce que le spectateur, immergé depuis quelques heures avec ces protagonistes qu’il connaît et qu’il a vu évoluer dans une succession de moments familiaux presque intimes, parvient à saisir, comprendre et ressentir.

«C’est le problème : les Américains se sont conduits comme une force d’occupation et non de libération. Ils ont fait d’énormes bourdes, comme dissoudre la police. Du coup, tous ces policiers baasistes du régime sont devenus dangereux.» Ceux-ci forment des bandes, s’en prennent à la population. Alors, les familles s’arment. Haidar, le neveu d’Abbas, 12 ans, joue avec une mitraillette qu’il a appris à charger après la guerre.

La première partie du film est un Striptease baigné d’une angoisse insouciante : on lit l’inquiétude sur les visages des adultes, mais les enfants jouent toujours et les ados déconnent. La seconde partie s’apparente à un cauchemar : l’inquiétante étrangeté se trouve à chaque coin de rue, dans la découpe des ruines, dans la présence de soldats à la fac. Puis c’est l’horreur, les dégâts collatéraux et les gros plans de brûlures sur des corps d’enfants.

«Pour moi, présenter le film à New York [il y a quelques semaines, pendant son tour du monde des festivals, ndlr] a été important. Des gens, des Américains, sont venus me voir à la fin pour s’excuser. Souvent, les spectateurs font ça. Ils expliquent alors qu’ils étaient jeunes et mal informés», comme s’ils n’avaient pas réussi à comprendre qu’en Irak «il y avait aussi des Irakiens».«Je pense que j’ai réussi à donner un visage aux Irakiens avec ce film», explique Fahdel, qui ne rechigne pas non plus à mettre en scène certaines séquences, comme le montrent ces moments découpés et filmés sous deux angles différents pour une seule caméra. «Pour moi, le documentaire et la fiction n’existent pas. Beaucoup de films sont des téléfilms et beaucoup de documentaires sont du cinéma.» Un mélange dont use aussi la propagande du régime, comme retransmise à la télé dans des clips à la gloire de Saddam. Fahdel aime à citer cette phrase de Godard : «La fiction tend vers le documentaire, et le documentaire vers la fiction.» Il a casté les membres de sa famille, les a archétypés pour pouvoir mieux révéler les aspects de ce «village-monde» : «En visionnant ce film, je pense que vous connaissez l’Irak comme si vous y aviez vécu un ou deux ans.»

Une nouvelle inquiétude

Ce pays qu’il a filmé jusqu’à la tragédie qui scelle la dernière scène et qu’on taira, a pour lui aujourd’hui disparu, découpé et noyé dans une nouvelle inquiétude distillée par l’islamisme. Mais la guerre, la crainte et la violence semblent au fond l’essence du pays. Une séquence montre un acteur retourner dans les studios de cinéma de Bagdad, brûlés. Les trépieds sont cramés, les projos sont devenus des masses noires fondues. Il trouve un chapeau sur le sol : «C’est celui que je portais quand je jouais le patriote Sliman. Il assassinait le lieutenant colonel Leachman pendant l’occupation britannique.» Au premier étage, es salles de montage aux tables noircies. Au mur, une photo d’Alain Delon. Par terre, une bobine 35 mm. Il en regarde des photogrammes à la lumière du soleil : «C’est un film de guerre.»

ARTICLE SUR SITE


logo_lapresseca

Publié le 27 janvier 2016 à 09h26 | Mis à jour à 09h26

Homeland: Iraq Year Zero: chronique d’un Irak qui bascule

Homeland: Iraq Year Zero... (PHOTO FOURNIE PAR LES RIDM)

Homeland: Iraq Year Zero

Agence France-Presse
Paris

Avant la guerre, après la guerre. Dans un documentaire, Homeland: Iraq Year Zero, le réalisateur irakien Abbas Fahdel raconte un moment d’Histoire au travers de la chronique douloureuse et tendre de sa propre famille, filmée pendant plusieurs mois avant et après l’invasion américaine de 2003.

Ce film «impressionniste», comme le décrit l’auteur, sans commentaire, sans entrevue, est exceptionnel tant par sa durée (près de 5 heures) que par sa valeur historique.

La première partie dure de février 2002 à début mars 2003. La seconde couvre quelques mois après l’invasion américaine. La guerre à proprement parler, qui ne dura que quelques semaines, n’est pas filmée, donnant paradoxalement encore plus de force aux deux volets du documentaire.

«En 2002, lorsque la menace d’une guerre s’est précisée, j’ai compris que l’Irak de ma jeunesse, celui que j’avais quitté pour venir étudier le cinéma à Paris, était en passe de disparaître», raconte dans le dossier de presse le réalisateur, dont le film sort mi-février en France.

Abbas Fahdel retourne alors à Bagdad et filme sa famille au quotidien, essentiellement dans le huis clos de la maison, du jardin et de la terrasse. Par petites touches, se dessine alors le portrait d’un Irak aujourd’hui disparu, les derniers mois d’un pays malade, sous le joug d’une dictature aussi effrayante que kitsch.

De la télévision, perpétuellement allumée, sortent les odes à la gloire de Saddam Hussein, «orgueil des Arabes» et «soleil de l’existence». Aucun membre de la famille du réalisateur ne se risque à parler politique devant la caméra. Trop risqué. Mais Fahdel filme un climat, une atmosphère. Le quotidien rythmé par les coupures d’eau et d’électricité, les effets de l’embargo international en vigueur depuis plus d’une décennie, les souvenirs des guerres passées, Iran/Irak, guerre du Golfe en 1991… et la crainte mêlée d’excitation de celle à venir.

Le président américain George W. Bush a placé l’Irak de Saddam sur l’«axe du mal». Les bruits de bottes se font entendre. Dans le salon de la famille de Fahdel, le petit écran montre des images de manifestation anti-guerre en France.

Comme toutes les familles irakiennes, celle du réalisateur se prépare. On fait des stocks de riz et de lentilles, on creuse un puits dans le jardin, des jeunes femmes hilares s’entraînent à mettre des couches de bébé sur le visage «en cas d’attaque chimique par les Américains»…

Étrangement, il y a encore beaucoup de légèreté. La guerre éclate le 23 mars, alors que le réalisateur est rentré en France. Il retourne à Bagdad quelques semaines après (Bush avait proclamé la fin des opérations de combat le 1er mai 2003).

Descente aux enfers

Et c’est à la lente descente vers le chaos qu’assiste le spectateur dans cette deuxième partie. Cette fois-ci, Fahdel filme beaucoup en extérieur. Il accompagne ses nièces à l’université, découvre le Bagdad ravagé, tumultueux et sous occupation d’après-guerre. Convois américains. Barrages. Embouteillages monstres. Destructions.

Dans une scène poignante, il accompagne son ami Sami Kaftan, acteur irakien «aussi connu en Irak que Gérard Depardieu en France», sur les lieux détruits des studios de cinéma de Bagdad. «On peut se venger d’un régime, mais pourquoi se venger d’une culture? Pourquoi?», pleure l’acteur en ramassant des monceaux de pellicules de films jonchant le sol.

Le spectateur est aussi témoin de la montée des tensions, du ressentiment anti-américain, de la peur face à l’insécurité, au chaos, aux pillages. La catastrophe apparaît inexorable à travers les scènes de la vie quotidienne, comme une nuit hallucinante de tirs secouant un quartier de Bagdad.

Restent la joie de vivre et l’espoir des jeunes neveux et nièces du réalisateur, les moments tendres d’un quotidien encore possible. «Qu’est-ce que tu es belle aujourd’hui!», s’exclame le jeune Haidar, neveu de Fahdel et héros du film, en regardant sa soeur sur son trente-et-un pour ses examens de fac.

Et puis la tragédie irakienne fait brutalement irruption dans la famille. Haidar est tué par une balle perdue, de tireurs inconnus, un soir à Bagdad.

Après ce drame, les rushes resteront dans leur boîte pendant dix ans. Le film, dit Abbas Fahdel, est aussi «une manière de ressusciter» cet enfant.

Article Complet


Mubi.com

“Homeland (Iraq Year Zero)”

“Our point of view follows a trajectory to become the vanishing point of our own failure.” —Jacques Lacan
“Who plunged this place of light into darkness?” asks with a heavy heart an Iraqi actor sifting through the bombed ruins of what had once been Iraq’s film office and archives. Though rhetorical and sappy it may sound, the question epitomizes the visual dilemma Abbas Fahdel’s documentary expands on. At the very centre of Homeland (Iraq Year Zero) are in fact questions of representation, of cultural perspective and omission of the visible. The film, divided into two parts, follows the director’s extended family and friends in the run-up to the American invasion of Iraq (“Before the Fall”) and in its fatal aftermath (“After to the Battle”). Presumably due to the family’s temporary move to a countryside house during the bombing of Baghdad, the war itself—that is, the military invasion of of a sovereign nation—is not featured in the documentary. This absence becomes more and more telling as the film progresses and we realise that the armed aggression of Iraq was but the prelude to a nightmare of unspeakable proportions. Fahdel’s film is disarmingly simple yet unprecedented in that it shows the daily reality of those on the receiving end of our humanitarian wars. Despite the overwhelming proliferation of images, “Homeland” has the same impact of footage from a newly discovered planet, something we literally have never seen before. Even the most courageous and truthful attempts to describe the Iraq war (Laura Poitras’ My Country, My Country or Paul Haggis’ In the Valley of Elah, for instance) are irremediably removed from the epic naturalism that unfolds from every frame of this film. The most distressing aspect of the war that the film captures is not the actual invasion but its consequences: the descent of Iraqi society into utter and violent chaos. Far from being a collateral damage of sort, the disintegration of Iraqi society is a strategic ploy (as old as colonialism itself) that the American administration carried out by any means necessary. For the citizens of Iraq this meant a forced cohabitation between the bearable lightness of everyday life and the dim indeterminacy of incessant, deadly danger.
The first part of the documentary serves as a humbling counterpoint to the clobbering propaganda that justified in the name of democracy the annihilation of a country, its people and society for decades to come. To the pathetic and fateful image of Colin Powell waving to the world a sample of faecal matter claiming it to be a weapon of mass destruction, Abbas Fahdel opposes the everyday gestures of a middle class family in Baghdad: their fears, doomed hopes and ordinary preoccupations. Instead of the featureless, conniving savages that populates Hollywood depictions of the Iraq war, we get to know the members of a society still founded, however imperfectly, on communal models of reciprocity. “Homeland” feels almost specular to Frederick Wiseman’s In Jackson Heights, both of them dealing with the obliteration of community and the supremacist assumption inherent to the exceptional nature of the American way of life. Very much like Wiseman though, Fahdel is not interested in passing judgements or proving a point: he limits himself to the composition a choral mosaic of voices, fragments of life and emphatic vignettes. Though the disaster of war is ubiquitous throughout the second part, the film avoids drawing any conclusion, political or otherwise. Even hatred and rage, not only understandable but also historically justified, find hardly any room in the film. The moral and figurative perspective of western representation, with its unequivocal civilization of correct images, is challenged by a refusal to convey a single point of view. This aesthetic divergence has characterised the visual history of Christianity and Islam since the invention of perspective which put the Western point of view at the very centre of representation. By rejecting the portrayal of human figures and of the perspective of Renaissance art in particular, Islamic art denied the omniscience of Western depictions and the centrality of the spectator who, looking through the vanishing point, saw his vision of the world faithfully mirrored on canvas (for an in-depth and comparative study of Western and Islamic visual traditions see Hans Belting’s “Florenz und Bagdad: Eine westöstliche Geschichte des Blicks”).
Left: Colin Powell. Right: Alhazan as portrayed on an Iraqi banknote.
While Western perspective has long been the global mode of visual representation through the proliferation of mass-media, the cultural presumption that comes with the depiction of “the other” is our very own identification mark. The virulent orientalism of films like American Sniper orZero Dark Thirty belongs to a wider visual narrative—their racism does not originate from any personal prejudice, it’s part and parcel of the only ethic and aesthetic palette the directors can draw from. It is precisely in this respect that “Homeland” represents a window into a world we would never be able to see through our own lenses. The film capsizes our preconceptions, both benevolent and prejudiced, to illustrate first and foremost that the daily reality of war is something that media, regardless of their political orientation, hardly touch upon. While journalism manipulates facts in its professional duty to craft a version of reality and toe an editorial line, Fahdel’s film immerses the spectator into the flux of everyday uncertainty. If stereotypes deny subtleties in order to corroborate fears, Homeland attempts to mirror the complexity of Iraqi society by capturing its nuances, be they political, cultural or religious. All this without ever mentioning the figures of what clearly amounts to the worst crime against humanity of the 21st century, or, as Obama calls it: a “strategic stumble.”
It would be misdealing though to label Homeland as a film on the Iraq war. The war in effect is never framed for the very simple fact that its contours are fluid, its implications all-pervading and its circumscription impossible, both visually and militarily. Faced with the calamitous immanence of modern warfare, the director can only observe its multiple manifestations or resignedly follow the disorder it unleashes. Only death, which enters the film first as announcement then as diegetic presence, can determine the final shape of a documentary that could have otherwise survived its end. What’s left after the film finishes is a cone of light that has, if only for a mere five hours and a half, illuminated the dark corners of our blinding preconceptions. This inversion of perspective finds in the city of Baghdad a symbolic site of historical significance – there in fact were laid the optical foundations on which the medium we call cinema rests. The Iraqi scholar Abu ‘Ali al-Hasan Ibn al-Haitham (965-1040), known in the west as Alhazan, studied in Baghdad and wrote the seven-volume treatise “Kitāb al-Manāẓir (Book of Optics) formulating the now accepted model wherefore vision takes place by light entering the eye. In his studies Alhazan was the first one to use the concept of camera obscura (“al-bait al-muzlim”) which he utilized to test his theories on the perception and movement of light without which the mathematical structures of Creation could not be seen. More than gravity it was light for Alhazan the pillar around which human life orbited and was shaped. The very same light that went out over the city that so presciently had understood its importance.

https://mubi.com/notebook/posts/homeland-iraq-year-zero


 CRITIKAT

6ème Festival International du Film de La Roche-sur-Yon

(……)

Homeland, Iraq Year Zero : « les puissants ne s’excusent pas »

C’est avec cette phrase lancée par un Irakien à son fils de douze ans, qu’Homeland, film-fleuve de deux fois cent-soixante-cinq minutes, annonce peut-être le plus simplement son programme : si l’histoire est toujours écrite par les vainqueurs, rien n’empêche les perdants – du moins les victimes – d’en présenter le contrechamp d’injustice. Cinq heures trente ne sont pas de trop pour conjurer dix ans de domination sur le champ de bataille des images ; lesquelles, toujours produites par les puissants, réduisent dans le meilleur des cas les Irakiens à un peuple de victimes, et au pire à des figurants complètement hagards. Dix ans de micro-reportages télévisés, de Fox News au JT de David Pujadas, où le talionnisme afghan et le néocolonialisme en Irak semblent ramener la même vision chaotique de ce nouveau Far East. Or, si le récit de cette spoliation reste visible, Homeland, en optant pour le feuilleton tranquille d’une chronique familiale, la relègue en toile de fond. C’est qu’Abbas Fahdel, avec lequel nous nous étions entretenus lors des États généraux de Lussas, préfère aux démonstrations magistrales la discrétion des intérieurs, des voitures, des marchés couverts et de toutes ces petites chambres de confidences dont la guerre démantèlera les cloisons. Si bien qu’à une première partie plutôt feutrée, répond, dans la seconde, la complainte à ciel ouvert d’un peuple dénudé. À travers sa propre famille, élargie à la rue tout entière tant leurs portes sont toujours ouvertes, c’est à un peuple que le cinéaste confie les clefs de son récit. Hormis quelques sous-titres présentant les lieux et les personnages, jamais le filmeur ne vient arranger, nuancer ou harmoniser toutes les versions contradictoires de ses semblables. C’est ainsi qu’à l’image de barbares qu’endossent les Irakiens dans les médias occidentaux, nouvelles peaux rouges ébahies devant les défilés de la cavalerie, répond un film de « semblables » – où chacun, par le naturel de sa contribution, offre une nouvelle facette à ce hors champs, qu’Homeland remplit salutairement. Si l’Irak reste à reconstruire, la reconquête de ses propres images, à laquelle s’est livré Fahdel, apporte sûrement la plus belle des premières pierres.

(…..)

http://www.critikat.com/panorama/festival/6eme-festival-international-du-film-de.html

 


logo

Film Review: ‘Homeland (Iraq Year Zero)’

More homely than Homeland, but hard to carry as normal

Don't miss the screening this Saturday with a talk from the director himself.

 

Don’t miss the screening this Saturday with a talk from the director himself.

November 11th, 2015 1:24 pm| by Mark Walker
 

Putting aside the fact that we now know the 2003 invasion of Iraq was an illegal war waged on false pretences and some embarrassingly tenuous link to 9/11, this film focuses on the smaller picture: an Iraqi family. The brothers, the in-laws, nieces and nephews of filmmaker Abbas Fahdel populate the screen during almost the entire running time, which stands at a whopping five hours and 34 minutes.

Meet Iraq’s Partridge Family
We watch this extended middle-class family as they prepare for the coming war, with evidence of the last one (and international sanctions) still everywhere. The film chronicles their lives in Baghdad, and the rural town of Hit, during the run-up to the 2003 war and aftermath that follows. If a subject ever justified those five-plus hours of your time, it is this one.

Bonding with their brood
Without resorting to the kind of sledgehammer manipulation in propaganda like American Sniper, the film takes its time by gently immersing you in the everyday lives of these people. It’s a simple, recognisable existence and ultimately touching.

Your emotional investment in these people happens without any narrative devices; it’s simply the result of the time you spend with them.

The effect is such that you are left in no doubt that these people saw those events much more clearly than we ever could, that the real casualties of this mess were the social infrastructure, the pride of working people and the collective innocence of the Iraqi youth – their faces contributing to several sequences, filmed like still portraits.

In these sequences we are confronted only with heartbreakingly open faces, warm smiles, their uninhibited joy at being filmed, curious and playful.

Insights into Iraqi iniquity
Two points resonate throughout the film: that some of those faces we are introduced to are certainly not alive today (subtitles bluntly inform us of the fates of certain participants throughout); and that here was a cache of goodwill toward the occupiers, which due to a combination of incompetence, a lack of respect, single-minded greed and poor planning, was wasted – and most shamefully, left to fester – turning to resentment and distrust, thereby laying the foundation for the chaos we see today.

It’s an important film. Unfortunately, the running time will put off some, but the film screens in two manageable parts and your stamina will be greatly rewarded with a sobering glimpse into the Iraqi mindset and an absolutely unique perspective into the other side of this conflict and its ongoing repercussions.

‘Homeland: Iraq Year Zero’ is showing again at 9am at Grand Teatret on November 14, where there will be a chance to listen to and possibly meet the director.

Homeland (Iraq Year Zero)

 

★★★★★

Dir: Abbas Fahdel;
Iraq and French documentary, 2015, 334 mins


Shown at CPH:DOX
Playing AT Grand Teatret

http://cphpost.dk/activities/film/film-review-homeland-iraq-year-zero.html


 CRITIKAT

27es États généraux du film documentaire de Lussas

homeland (174)

Tout doit disparaître

On ne sait trop que faire de la façon dont Homeland (lire notre interview) s’est imposé comme la pièce maîtresse de ces États généraux, tant il est clair que même si cela a bien sûr à voir avec sa qualité, cela n’est pas non plus étranger à son format (5h34 divisées en deux parties), à sa matière documentaire (un témoignage quasi unique de la vie en Irak avant et après l’invasion américaine), et surtout à la déférence que le film inspire. Déférence devant la valeur d’archive des images – Abbas Fahdel dira que bien avant de se convaincre que ses rushes renfermaient un film, il savait qu’ils renfermaient au moins une part d’Histoire –, déférence surtout devant la mise à nu, puisque le film s’attache à décrire tout à la fois la violence absurde de la guerre et l’environnement familial du cinéaste, jusqu’à ce que ces deux finissent inexorablement par se rejoindre.

On parle donc de Homeland comme d’un film aux conditions d’existence très singulièrement intimes, un film tout juste tombé du deuil et qui brûle les doigts. Le sous-titre, Irak année zéro, plus qu’un clin d’œil, nous semble indiquer que Fahdel fait le même pari que Rossellini : pour filmer la guerre (et plus exactement pour filmer l’après-guerre), il filme un enfant. L’enfant est à la fois le témoin, le martyr et l’héritier de la guerre ; c’est le sens à peine voilé de la complicité que noue Fahdel avec son neveu Haidar, qui s’invite devant la caméra d’abord par jeu, puis qui nouera au fil du temps un véritable compagnonnage avec son oncle qui sortira du cadre familial, sillonnant avec lui les rues du pays pour recueillir les histoires des Irakiens. C’est ensemble qu’ils déploient peu à peu ce très ample projet de recensement de l’Irak occupé.

Recueillir, recenser, c’est le geste essentiel de Fahdel qui filme parce qu’il sait d’avance que tout va disparaître. Homeland décrit donc une multitude de détails de la vie irakienne, ouvrant une à une des parenthèses qui s’apparentent à des films dans le film : il visite les souks boutique après boutique, détaillant jusqu’aux techniques de préparation du pain, mais aussi les vêtements, les rites sociaux (le repas, un mariage…) ; il s’embarque avec un acteur de théâtre dans une longue visite des archives du cinéma irakien, détruites par des pillards, où le vieux thème de la « mort du cinéma » se concrétise de façon déchirante. Une telle efflorescence brouille la frontière entre le sujet et le hors-sujet ; on pourrait peut-être enlever ceci ou cela, la longueur de l’ensemble implique nécessairement de passer par des phases de décrochage, orHomeland ne tourne jamais à perte, et chaque scène ajoute autant de durée que de substance à ce projet avec lequel la négociation au détail n’est bien sûr pas possible.

Article Complet

critikat


learning-french-news1

Trois films à ne pas rater cette semaine

Le Monde.fr | 14.10.2015 à 06h56 • Mis à jour le 14.10.2015 à 10h24 | Par Jacques Mandelbaum

CHRONIQUE FAMILIALE DE LA DÉVASTATION IRAKIENNE : Homeland

homeland (16)

Cela se passe au festival de La Roche-Sur-Yon et c’est un événement plutôt rare. Un film de cinq heures qui se veut la chronique quotidienne d’une famille irakienne, pendant un an et demi, avant et après l’invasion américaine de 2003. L’auteur, Abbas Fahdel, né à Babylone, est installé en France depuis l’âge de dix-huit ans. A l’annonce de l’imminence d’une guerre dans son pays natal, il y retourne muni d’une caméra, et en ramène le matériau qui constituera in fine ce film-fleuve, tourné dans sa propre famille. Aussi loin que possible des images journalistiques « embarquées » ou des fictions de guerre hollywoodiennes, voici, filmé de l’intérieur, avec tendresse mais sans pathos excessif, le désastre universel de la guerre qui s’abat sur une famille qu’on pourrait prétendre comme toutes les autres, si elle n’avait pas subi le joug de la dictature d’un tyran durant des décennies, avant de devoir subir la désagrégation de son pays et la dévastation dans ses propres rangs. Le film a été montré dans de nombreux festivals. Il sortira en France en février 2016.

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/cinema/article/2015/10/14/la-selection-cinema-du-monde_4788861_3476.html#OzILZDHBTTf6Zzm0.99


Cinecolor Argentina

20592

Valdivia 2015

Crítica de Homeland (Iraq Year Zero), de Abbas Fahdel

calificacion

Ganadora del prestigioso festival suizo Visions du Reel de Nyon, Homeland -que nada tiene que ver con la popular serie homónima- es un documental estremecedor, que cambia por completo la perspectiva sobre el conflicto de Irak.

Abbas Fahdel filmó con su precaria camarita durante 17 meses, a partir de febrero de 2002, a su familia, a su barrio y a Bagdad en general antes y después de la invasión estadounidense a Irak. Con todo ese material construyó lo que en definitva es una pequeña obra maestra del cinéma-verité, un registro de una intensidad, una potencia y una crudeza desgarradora como pocas veces se vio incluso dentro de los documentales de guerra.

El resultado de tantos meses de filmar tanto en la casa familiar como en las calles (el viejo recurso de salir con un auto para rodar y tomar testimonios adquiere aquí unas dimensiones inusitadas) es una película de casi 6 horas divididas en dos partes: Before the Fall (que muestra los preparativos de la población ante la ya inminente invasión norteamericana en medio del aparato propagandístico de Saddam Hussein) y After the Battle (que expone las consecuencias del ataque, el caos social incluso con el control estadounidense que incluye saqueos y secuestros por parte de bandas criminales).

La película está llena de situaciones extremas (que incluyen el asesinato de Haidar, el querible sobrino de 12 años del director) y de otras no menos conmovedoras como recorrer lo que quedó (escombros) de la radio o del archivo fílmico de los Baghdad Cinema Studios, pero con recorrer las calles desoladas, las viviendas arrasadas o un mercado popular alcanza para comprender que sobre Irak hasta ahora sólo habíamos conocido una de las campanas, la de los “vencedores”. Es tiempo, con este magnífico trabajo -épico y artesanal a la vez- de apreciar la otra mirada: la de los vencidos, la de las víctimas, la de los invisibles.

Festivales_ Crítica de Homeland (Iraq Year Zero), de Abbas Fahdel – Otros Cines

Débordements

screen-shot-2012-10-12-at-10-29-38

ETATS GÉNÉRAUX DUDOCUMENTAIRE, 2015

homeland (10)

Homeland (Iraq année zéro) d’Abbas Fahdel.

“Un événement dont l’onde se propage encore de festival en festival fit halte à Lussas : Homeland (Iraq année zéro) d’Abbas Fahdel, film en deux parties pour une durée totale de près de cinq heures trente. Film à la finition retardée et dont l’écho est d’autant plus troublant : Fahdel était parti retrouver sa famille irakienne, qu’il n’avait pas vue depuis ses dix-huit ans, quelques mois avant l’invasion américaine de 2003 ; par malchance, il est rentré en France juste avant le déclenchement des hostilités, et est revenu filmer deux semaines après la conquête. Les rushes sont restés dix ans dans un tiroir, parce qu’un de ceux qui y étaient le plus présent, Haidar, neveu d’une douzaine d’années, a trouvé la mort au hasard d’une fusillade alors qu’il trônait sur le siège arrière d’une voiture à côté de son oncle cinéaste. Dix ans, c’est le temps de deuil qu’il a fallu pour oser affronter les images de ce garçon sémillant, bavard avec bonheur, qui, mort, est devenu la colonne vertébrale d’un film qui est aussi son tombeau (les dernières images sont celles de sa sépulture) ; c’est aussi le temps qui nous sépare d’un événement qui ouvrit l’âge au cours duquel « l’antiterrorisme » devait devenir la méthode de gouvernement par excellence, et où la France résistait encore à cette fausse raison sécuritaire avant de prendre le pas comme toute bonne nation impérialiste. De là l’étrangeté de ces images nous rappelant à une cause doublement perdue (marquée par l’échec, puis oubliée).

La première partie narre une attente oscillant entre angoisse et espoir, entre la peur d’un enlisement guerrier et l’excitation à l’idée d’être enfin débarrassé de la clique baasiste. Scènes privées pour l’essentiel, interdiction de tourner oblige ; le film adopte la forme d’un diarisme familial à l’occasion agrémenté de sorties en voiture, notamment aux côtés de la superstar irakienne Samir Kaftan. Ou comment figurer la politique par son négatif, c’est-à-dire allégoriser sa privation : l’impossibilité visuelle d’une scène commune dit assez la dissolution de l’espace public en régime dictatorial (à la place, les émissions saddamolâtres que la télé passe en boucle, avec tout le kitsch esthétique d’une telenovelas). La seconde partie montre un peuple qui déchante après sa supposée libération par une armée qui, quels que soient ses airs de sauveuse, ne peut pas ne pas avoir l’arrogance de la conquête ni les bavures du pouvoir. Pour principal changement, le déliement des langues et l’émancipation de la caméra. Le cinéaste peut enfin sortir de son confinement domestique et parcourir les rues pour observer les ratés de la libération : telle personne subissant la vindicte indue des pouvoirs en place, telles destructions « accidentelles » par des bombardements compulsifs et qui laissent les populations sans abris, telle insécurité générale en raison de l’anarchie entretenue par des gangs nouvellement essaimés. Centralité des dommages collatéraux. Le film laisse une belle place, glorieuse même, à ceux qui pour n’être d’aucun côté subissent les feux croisés des factions en désordre. Une des plus belles scènes montre une manifestation d’Irakiens soulevés contre l’occupation illégitime d’une armée qui, au nom de sa propre sécurité, met en suspens la sûreté de chacun. Et une autre, centrale, consiste en une visite des studios de cinéma ravagés par les bombes, studios qu’autrefois jalousaient tous les pays voisins et qui ne sont plus que cendres dans lesquelles disparaît tout un pan de la mémoire nationale. Toute cette seconde partie est construite sur une telle dialectique de la mémoire, montrant d’un côté l’arasement historique qu’entraîne une invasion méconnaissant les us de ceux qui, « libérés », n’en sont pas moins maintenus dans un statut de vaincus, de l’autre les remontées d’une mémoire interdite pendant les heures d’Hussein : celle de ceux qu’il a persécutés, effacés, et dont les noms et les visages reviennent sous forme d’affichettes collées un peu partout – comme si la seule vraie libération était celle des morts sortant enfin d’un silence qui aggravait leur disparition.

La référence du titre à Allemagne, année zéro de Rossellini n’a rien de gratuite. Les deux cinéastes ont partagés un même problème – comment raconter un pays enseveli sous les décombres – et une solution similaire – prendre le prisme de la famille, voir les événements se réverbérer sur les vies de quelques êtres. Ce qui fait que le meilleur observatoire de l’irrémédiable altération est une voiture depuis laquelle sont filmés une très grande partie des longs plans du film, comme s’il était besoin d’une vitre pour refléter le changement. L’autre point commun avec le maestro italien, c’est l’enfant comme crucifié de la guerre. Seulement, le petit Edmund optait pour un grand saut dans le vide signifiant la fin de tout suite à la déraison du monde, quand Haidar, lui, est tué par une balle qu’on imagine perdue – toute la différence de deux destins nationaux, entre l’autodestruction et l’assassinat géopolitique. Restent les autres enfants, nombreux dans le film, vraies machines à regard-caméra. On se souviendra d’une scène dans laquelle une flopée de bambins s’empare de différentes munitions traînant sur le bas-côté, et les dénomme une à une devant le cinéaste. Est sensible, dans le regard de celui-ci, toute l’inquiétude amoureuse qu’il porte à ces enfants, et qui fait que, chose rare, ces multiples plans sur l’innocence du jeune âge ne tombe pas dans la mièvrerie qu’ils encouragent généralement. Grande vertu de Homeland que sa retenue sans prétention, dans laquelle la tristesse fait taire l’indignation vertueuse et opte pour le mutisme du regard désolé.”

Etats généraux du documentaire, 2015 – Débordements

ARTICLE COMPLET


Open Article in Variety page

Film Review: ‘Homeland (Iraq Year Zero)’

Capture d’écran 2014-09-23 à 14.57.48
OCTOBER 4, 2015 | 07:38AM PT

Abbas Fahdel’s verite glimpse of life before and after the American invasion of Iraq serves as a poweful chance to empathize with the other side.

Peter Debruge

What would you do if the world’s most fearsome military presence threatened to invade where you live? How does one even begin to prepare for that kind of assault? In “Homeland (Iraq Year Zero),” Baghdad-situated filmmaker Abbas Fahdel offers world audiences an extraordinary opportunity to identify with the “enemy” in the Iraq War — conveniently faceless in most Western coverage, but humanized here by members of Fahdel’s own family. Clocking in at nearly six hours and presented in what may feel like raw homevideo form, this transformative verite glimpse into the lives of everyday Iraqis demands both patience and empathy to sit through, but the reward is worth every second, as an extremely limited number of courageous programmers and curious audiences can attest.

Stylistically speaking, Fahdel’s approach flies in the face of what we’ve come to think of as “war movies,” whether scripted or otherwise. Nothing here seems polished, manufactured or even remotely sensationalized. Recorded over the course of 17 months, beginning in Feb. 2002, the film opens with a shot of a cat, for crying out loud, and features scenes of its subjects singing, shopping and watching cartoons, as well as celebrating family weddings and religious feasts. The idea here is to immerse audiences in a world that, while superficially different from their own, resonates as familiar on the most fundamental levels — namely, that desire to be left alone and allowed to survive.

In this respect, Fahdel (who visited his relatives, but assembled the film in France, where he has spent the majority of his life) makes the curious, yet undeniably haunting choice of informing us via sober onscreen text which of his family members will die before the film ends — not so much a spoiler as a bit of foreboding that underscores the senselessness of their fates, while excusing the fact that it was never his intention to make a snuff film. Their deaths will remain undepicted. Thus, it is perhaps an hour into the film when we learn that Fahdel’s 12-year-old nephew Haidar will be killed after the U.S. invasion.

While the film’s attention has a tendency to drift at times, Haidar serves as a sort of mascot throughout, kidding around with his relatives, explaining basic principles for the camera’s benefit and trying his best to experience a normal childhood under these exceptional circumstances. Given what we already know of his fate, Haidar becomes a kind of walking ghost, helplessly naive about the actual dangers of the imminent American attack. As far as he and the family are concerned, they have been through this before: In one scene, Haidar and his cousins joke about how a diaper can serve as a gas mask, while in another, he re-applies tape to keep the living-room windows from shattering, covering traces that remain from the last war.

Divided into two parts, subtitled “Before the Fall” and “After the Battle,” the film concludes its largely 2002-set first half with a visit by Haidar to the Al-Amiriyah shelter, now a memorial to the 400 civilians killed when Americans bombed the facility in 1991. To quote one of President George W. Bush’s family members (who clearly fared better than Fahdel’s), “Stuff happens,” though “Homeland” goes a long way to recover the sense of human tragedy in what others may view as cold inevitability. In the meantime, it’s thoroughly unnerving to see Bush (and by extension ourselves) referred to in the way many of us saw Saddam Hussein depicted at the time. Here, Hussein is celebrated as Iraq’s “beloved master” by local TV, who present the U.S. as a bully nation that crossed an ocean to start a fight — though no one seems to miss him terribly once he’s gone.

The longer and less immediately engaging second half picks up three weeks after the 2003 invasion and finds both Fahdel’s family and the nation completely transformed by the experience. It’s now commonplace to see American armored vehicles in the streets, where those who might not be so candid with a foreign crew reveal how beefs with Hussein’s corrupt system have now shifted to complaints about the ineffectual new system in place. It almost goes without saying that people would be unhappy with the war, and the inconveniences captured feel relatively minor compared to those which have been thoroughly reported via more professional journalists.

Clearly determined to film everything he can from ground level, Fahdel tours the city to find many prominent buildings reduced to rubble, including both the country’s leading radio station and the Baghdad Cinema Studios’ film archive. The helmer spends much of his time in the car, guided by relatives who supply much-needed context for what we’re seeing. This unofficial driving tour has become almost hypnotic by the point the film ends — with the sort of chilling impact to which faux docs such as “Blair Witch Project” and “Cloverfield” (where the cameraman doesn’t necessarily survive the experience) have perhaps desensitized us. Here, there’s no thrill to the horror, just the heavy weight of having witnessed the true toll of xenophobia, coupled with the gift of being offered the one thing that could prevent its ever happening again: empathy.

http://variety.com/2015/film/reviews/homeland-iraq-year-zero-film-review-1201609682/


iraq1600-800x450HUFFINGTONPOST

When Film Is a Festival

By Jeffrey Ruoff, film historian and professor of Film and Media Studies:

“If you’re interested in seeing how people live in other countries, turn off CNN and Fox News, and head down to your local film festival. If you’re lucky, you’ll catch Abbas Fahdel‘s 2015 documentary Homeland : Iraq Year Zero, a five-and-a-half hour exploration of his family’s day-to-day life in Baghdad before and after the 2003 U.S. invasion, a vanished world heartbreakingly preserved on digital video. Homeland will have its North American premiere at the upcoming 2015 New York Film Festival, another jewel in the festival galaxy.”

When Film Is a Festival _ Jeffrey Ruoff

when film is a festival


HuffPostArts&Culture

No Place Like Homeland

Posted: 10/01/2015 7:38 pm
Jeffrey Ruoff

homeland (61)
Abbas Fahdel’s Homeland (Iraq Year Zero) is the most significant work of art to come out of the Iraq war.

The documentary follows months, weeks, and days leading up to the 2003 U.S. invasion of Iraq and months into the subsequent occupation. Shot in Baghdad and the countryside on a lightweight video camera, this electrifying five-and-a-half hour film divides into two parts, Before the Fall and After the Battle.

The world premiere of Homeland took place at the 2015 Swiss film festival Visions du Réel, where it was awarded best feature in the international competition. On Oct. 5, the movie has its North American premiere at the New York Film Festival.

Using a long-take style reminiscent of Claude Lanzmann’s epic Shoah (1985) on the destruction of the European Jews, Before the Fall wanders through the day-to-day lives of the director’s family and friends in Baghdad, the capital’s city streets, its bazaars, and, eventually, their homes in the countryside, possible safe havens from the looming Anglo-American Blitzkrieg.

A kind of time capsule, Homeland opens in Baghdad at the home of Fahdel’s brother Ibrahim. Among others, we meet the director’s nephew Haidar, a precocious, vibrant 12-year-old boy, who plays an increasingly significant role as the movie unfolds. Eventually, after the fall of the capital, Haidar accompanies the filmmaker on numerous excursions throughout the city.

Watching Homeland is like pulling a photo album off the shelf, dusting it off, revisiting family and old friends, made increasingly poignant by the passage of time. In the faces of ordinary Iraqis gazing into his camera, Fahdel reasserts the beauty and magic of the close-up.

Retrospect hovers around the edges of the screen, as we know the terrible future that awaits Fahdel’s relations. Anxious, they still go about their affairs as normally as possible. They prepare for the coming invasion, just in case, not knowing if, or when, it will come. The director’s niece and her cousins chat about marriage and share their desire to eventually open a gynecological clinic. To partly paraphrase an old Yiddish saying, women plan and the U.S. government laughs.

At the end of Part 1, we learn to our shock – from an intertitle – that Haidar will die in the coming months. A chronicle of a death foretold.

In the aftermath of 9/11, the Bush administration was hijacked by a minority of neoconservatives, whose sights had long been set on invading Iraq and deposing America’s one-time ally Saddam Hussein. After the Battle carefully chronicles the terrible wake they left in Iraq.

Strikingly, there is no “shock and awe” in Homeland, our “rockets’ red glare” are kept entirely off-screen by the filmmaker. Fahdel refuses to recycle the spectacle of destruction that played 24/7 on American media. Instead, he records its aftermath, the traces left behind.

Unlike Claude Lanzmann, Fahdel does not appear on camera and his off-screen presence is less angry, more contemplative. By discussing Fahdel’s masterpiece in light of Lanzmann’s own, I am not equating the extermination of the European Jews with the obliteration of Baghdad and Iraq. Only time will tell where the destruction of this Middle Eastern country ranks in the long list of world atrocities.

In After the Fall, ominous portents emerge in the early weeks and months of the U.S. occupation. Looters thrive, the occupiers stand by, chaos reigns. Fahdel’s protagonists draw unsettling equations between the old and the new, “Saddam and the Americans brought us nothing but misfortune.” In the street, one Iraqi says, “Their soldiers didn’t come to free us. They came to enslave us and to exploit our country’s resources.”

Like Shoah, Homeland is a great work of history. Inspired by a Paul Klee painting Angelus Novus, German-Jewish philosopher Walter Benjamin described his vision of the angel of history:

His face is turned toward the past. Where we perceive a chain of events, he sees one single catastrophe which keeps piling wreckage upon wreckage and hurls it in front of his feet. The angel would like to stay, awaken the dead, and make whole what has been smashed. But a storm is blowing from Paradise; it has got caught in his wings with such violence that the angel can no longer close them. The storm irresistibly propels him into the future to which his back is turned, while the pile of debris before him grows skyward.
Filming virtually by himself, Abbas Fahdel is just this kind of witness. Director. Producer. Cinematographer. Editor. Angel of history.

Traumatized by the death of his nephew, Fahdel stopped videotaping. An Iraqi exile living and working in France, the director mourned for more than a decade, only completing Homeland twelve years later.

To those of us who live far from Baghdad, Fahdel has written an indelible scroll of the Iraqi capital, once upon a time. Homeland remains an everlasting tablet of a proud people preparing, and enduring, a destiny written by a handful of extremists in Washington, DC, itself once the capital of a lawful country.

From many a bombed building, Fahdel makes silent stones speak. Through its duration and attention to everyday detail, Homeland allows us, symbolically, to sit shiva with the extended Fahdel family, friends, and, by implication, the Iraqi people, as they mourn their dead. Paying such a home visit is a deed of kindness and compassion.

Homeland certainly does not soft peddle Saddam Hussein’s brutality. Fahdel’s brother points out the country’s largest mass grave, containing victims of the 1991 post-Gulf War uprising. Firing guns into the sky, Iraqi citizens celebrate the deaths of Hussein’s cruel sons. Fahdel’s network of relatives and friends includes opponents of the regime imprisoned, tortured, and/or murdered in the 1980s and 1990s. We mourn them, too, as we grieve the victims of the American occupation.

Despite the escalating chaos, there are small signs of hope. Fahdel’s niece passes her university exams. In the penultimate sequence, a relative gives birth, to the great joy of the extended family. “She looks like her grandmother!,” one exclaims. In the final scene, however, as they drive home from the hospital, unknown gunmen strafe their car, killing Fahdel’s 12-year-old nephew. “Uncle!,” he cries, the last word spoken in the film.

My daughter’s high school civitas homework notes that Iraq was part of the Fertile Crescent, the cradle of civilization, where language, agriculture, trade, and science originated. Now, thanks to the Bush regime, there is literally no place like home for millions of Iraqis, in the shards of their country or on the trails of exile. The crooked shall not be made straight.

The epic Homeland (Iraq Year Zero) breathes life back into the vibrant society of Baghdad in 2003. Like Shoah, it is a monument to the power of cinema to recreate a vanished world. Every second in its company is richly-spent. When you have the chance, invite Abbas Fahdel into your home; “Be not forgetful to entertain strangers: for thereby some have entertained angels unawares.”


VARIETY

Locarno: Iraqi-French director Abbas Fahdel’s ‘Homeland (Iraq Year Zero)’ Scoops Doc Alliance Selection Award

Locarno: Iraqi-French director Abbas Fahdel’s 'Homeland

AUGUST 8, 2015

LOCARNO – Iraqi-French director Abbas Fahdel’s docu “Homeland (Iraq Year Zero) is the winner of the Doc Alliance Selection Award, given by a group of seven prominent European festivals dedicated to docus, and presented for the first time this year at the Locarno Film Festival.

Fahdel’s monumental more than 5-hour-long work is composed of two parts. The first shot before the U.S. army’s arrival in Iraq, while the second captures post-war events. Besides the nod’s important recognition, he received Euros 5,000 in cash.

“The norms and values in my country have been turned upside down,” said Fahdel, who is currently living in French exile, describing his feelings about his homeland.

“What would have become of me, if I had stayed in Iraq? These were the questions I asked myself, with a bit of frantic and insatiable curiosity.”

Fahdel’s “Homeland” first emerged on the fest circuit when it won the international competition at the Swiss Visions du Reel fest.

The Doc Alliance Award is given by an alliance of the following seven docuy film festivals: CPH:DOX, Docs Against Gravity FF, Doclisboa, DOK Leipzig, FID Marseille, Jihlava IDFF and Visions du Reel.

Open Article in Variety page

 


 DA-films-logo-150504

10.8.2015

IRAQI FILM HOMELAND WINNING THE DOC ALLIANCE SELECTION AWARD 2015

homeland

 Homeland (Iraq Year Zero) by Abbas Fahdel shows the impact of war events on Iraqi citizens. Divided into two parts, the film takes a look at the life of Iraqi people before and after the invasion of US troops. “Homeland is a masterfully shot and composed family chronicle that gives us an idea of the difficult life under dictatorship and occupation of a family that seeks nothing else than normality,” said the jury in its statement.

“The norms and values in my country have been turned upside down,” said Abbas Fahdel, who is currently living in French exile, describing his feelings about his homeland. “What would have become of me, if I had stayed in Iraq? These were the questions I asked myself with a bit of a frantic and insatiable curiosity,” he added. His film first emerged victorious in the international competition at the Swiss Visions du Réel festival, and has now also managed to scoop the Doc Alliance Selection Award. Homeland (Iraq Year Zero) was chosen by the jury from among 7 nominees portraying, for example, life on Borneo, in Ukraine or in Serbia, as well as the tumultuous events in Egypt in 2011. “Although we watched 3,700 films over the year, this exceptional documentary immediately grabbed our attention for the 2015 edition. This is a work of reference to understand the history and current affairs in the Middle East. This is more than a beautiful film, it is an essential film. It had to be made and it must be seen,” said the director of Visions du Réel, Luciano Barisone, commenting on the winning film.

Read the full interview with director Abbas Fahdel, the author of the winning film.

Since 2008, Doc Alliance Selection Award has annually been presented by an alliance of seven documentary film festivals CPH:DOX, Docs Against Gravity FF, Doclisboa, DOK Leipzig, FID Marseille, Jihlava IDFF and Visions du Réel. Each of the participating festivals nominates one candidate. Together with the online documentary portal, DAFilms.cz, the award is a key project of the association whose main aim is to promote collaboration among documentary film festivals.

The jury of Doc Alliance Selection Award’s eighth edition that selected this year’s winner was composed of Christian Jungen – Swiss critic contributing to Neue Zürcher Zeitung, Piotr Czerkawski – independent Polish journalist, Dorthe Hygum Sørensen – Danish film critic, Jorge Mourinha – Portuguese representative of Publico daily, Annette Walter – German culture reporter, Philippe Azoury – laureate of the Prix Philippe Arnaud, and Czech film critic Tomáš Stejskal. Christian Jungen commented on the jury’s decision: “While war is looming in the background director Abbas Fahdel shows us how a family is moving closer but is also slowly torn apart. Homeland is a masterfully shot and composed family chronicle that gives us an idea of the difficult life under dictatorship and occupation of a family that seeks nothing else than normality.”

The winner was announced on Saturday, August 8, 2015 at the Locarno film festival in the presence of directors of film festivals associated with Doc Alliance, the jury members and film professionals. The winner received a financial prize of 5,000 EUR that is primarily intended to promote the author’s future filmmaking career.


 

logoBottom2013

Cineuropa

The Locarno Film Festival welcomes the winner of the

Doc Alliance Selection Award

by Giorgia Del Don

10/08/2015 – LOCARNO 2015: This year’s winner is Iraqi film Homeland (Iraq Year Zero) by Abbas Fahdel, which was nominated by the Visions du réel Festival in Nyon

The Locarno Film Festival welcomes the winner of the Doc Alliance Selection Award for the first time

Since 2008 the Doc Alliance platform, which was set up with the aim of promoting diversity in documentary films and encouraging their circulation, has been awarding films the Doc Alliance Selection Award. This prestigious award (which takes the shape of €5000), is awarded every year to the best European documentary, selected independently by each of the festivals that are members of the platform: CPH:DOX Copenhagen, Doclisboa, DOK Leipzig, FID Marseille, Jihlava IDFF, Docs Against Gravity FF and the Swiss Visions du réel Festival of Nyon. Doc Alliance is truly a platform that aims to make the exchange between directors and producers more dynamic by proposing alternative ways of circulating films that often struggle to find a place in the market. Each of these major festivals therefore nominates a film it thinks is symbolic. The selection of seven documentaries in competition (five of which were screened at last year’s Visions du réel Festival) focuses mainly on first films or emerging directors whose work deserves to be seen and commended. At the same time, these festivals also nominate a local film critic to participate in the final selection.

This year’s winner is Iraqi film Homeland (Iraq Year Zero) by Abbas Fahdel, which was nominated by the Visions du réel Festival of Nyon. It is a powerful and intimate film that is not afraid to speak out about the pain of a people, the Iraqi people, through the tragic story of the family of the director himself. It is simply ‘necessary’ in the words of Luciano Barisone, the Director of the Swiss festival, who was the first person to have truly believed in the film.

These are the films that were nominated this year:

Homeland (Iraq Year Zero) by Abbas Fahdel (IQ) nominated by Visions du Réel
Walking Under Water by Eliza Kubarska (UK/PL/DE) nominated by Docs Against Gravity FF
Stranded in Cantonby Måns Månsson (SE/DK/CN) nominated by CPH:DOX
Illusion by Sofia Marques (PT) nominated by Doclisboa
I Am the Peopleby Anna Roussillon (FR) nominated by Jihlava IDFF
Haunted by Liwaa Yazji (DE/SY) nominated by FID Marseille
All Things Ablaze by Oleksandr Techynskyi, Aleksey Solodunov, Dmitry Stoykov(UA) nominated by DOK Leipzig


articleLogo

Das Leben in Zeiten der Bedrohung

Das Leben hält sich nicht an Spielfilmlänge. 6 Stunden dauert die Chronik des irakischen Filmers Abbas Fahdel über seine Familie.

Splitter der Geschichte: In «Homeland (Iraq Year Zero)» von Abbas Fahdel bekommt die Erzählung über den Krieg ein Gesicht.

Splitter der Geschichte: In «Homeland (Iraq Year Zero)» von Abbas Fahdel bekommt die Erzählung über den Krieg ein Gesicht.

 Es ist die Stunde null minus ein Jahr. Im Februar 2002 kommt für den ersten Tag des Opferfests die ganze Familie in ihrem Haus in Bagdad zusammen: da ist der Bruder, die Schwiegertochter, der Schwager, die Nichte und der Neffe, viele andere Verwandte mehr, darunter auch der Filmemacher Abbas Fahdel. Diese Menschen machen, was eine Familie an einem solchen Tag immer macht: Man sitzt herum, kocht, trinkt Tee, schaut Fernsehen. Wenn dann im TV Saddam Hussein kommt und eine Rede hält, sagt der Schwager: «Wechsle den Sender». Der Krieg scheint an diesem Tag noch weit weg zu sein.

Die grossen und die kleinen Geschichten

Der Krieg wird kommen. «Before the Fall» heisst der erste Teil der Langzeitdokumentation «Homeland (Iraq Year Zero)» von Abbas Fahdel, er schildert die Zeit von Februar 2002 bis Juli 2003. «After the Battle», nach der Schlacht, wird dann der zweite Teil heissen, er beginnt drei Wochen nach dem Einmarsch der Amerikaner in den Irak. In beiden Teilen kommt die grosse Geschichte mit den kleinen Geschichten zusammen, wir sehen den Menschen ins Gesicht. Zu Recht ist «Homeland» an den Visions du Réel in Nyon, die gestern zu Ende gingen, mit dem Hauptpreis ausgezeichnet worden.

Es ist das Porträt eines Landes. Abbas Fahdel, der 2002 aus Frankreich zurück in den Irak gekommen ist, begleitet seine Familie mit der Kamera. Er filmt ihr ganz gewöhnliches Leben: Ein Brunnen wird gegraben, die Kinder spielen auf der Terrasse und werfen Früchte auf die Strasse, der Bäcker bäckt ein Brot. Abbas Fahdel filmt auch die Familie, wenn sie vor dem Fernsehen sitzt und schaut, was die Welt draussen so macht.

«Homeland» zeigt, wie es drinnen ausschaut. Es sind Nachrichten aus dem Inneren eines Landes in Zeiten der Bedrohung. Die Zeit vor dem Krieg gibt immer noch Raum für kleine Fluchten ins Private. Nach dem Einmarsch der Amerikaner ändert sich aber der Ton. Über Bagdad kreisen jetzt Helikopter. In der Nacht sind im Quartier Schüsse zu hören. Die Frauen verlassen jetzt nie unbegleitet das Haus.

Abbas Fahdel spricht auch mit den Menschen auf der Strasse. Jetzt sind auch die Geschichten zu hören, die vorher niemand in der Öffentlichkeit erzählt hat: wie ein 14-jähriger Schüler von Saddams Schergen verhaftet wurde – und dann einfach verschwand.

Unsere Zukunft, sagen aber die Menschen auf der Strasse, wird nicht besser sein. Am Ende des Filmes wird der Neffe des Filmemachers im Auto von einer Kugel getroffen, niemand weiss, wer der Schütze war und wem der Anschlag galt. Das letzte Bild: das Grab des Buben auf dem Friedhof. Wir haben an dieser Geschichte sehr Anteil genommen.

Die Visions du Réel sind das Fenster zur Welt

Mehr als fünfeinhalb Stunden sind für einen Film eine lange Zeit. Es braucht aber in «Homeland» jede Minute, um diese Geschichte aus dem Irak zu erzählen. «Nach und nach verblassen die Klischees und machen Männer, Frauen und Kindern Platz, die uns nahe kommen», heisst es in der Begründung der Jury.

Das Leben hält sich nicht an Spielfilmlänge. Deshalb braucht es den Dokumentarfilm – und ganz besonders das Festival Visions du Réel in Nyon. Auch die 46. Ausgabe war ein Fenster zur Welt.

Den Preis in der Sektion Regard Neuf erhielt die syrisch-libanesische Produktion «Coma» von Sara Fattahi, auch sie erzählt vom Krieg und von der eigenen Familie: ihrer Mutter, der Grossmutter und von sich. Draussen schneit es manchmal in Damaskus, ins Freie gibt es keinen Weg für die drei Frauen. Eingeschlossen, so zeigt es die Kamera, sind sie in der kalten Wohnung. Anders als «Homeland» ist die Form der Erzählung. Manchmal lösen sich auch die Bilder auf oder bleiben einfach auf einem Gesicht stehen.

An den Visions du Réel kommen wir solchen Menschen ganz nah. Nicht nur in der Vorstellung. Vor der Salle Communale stand dann Sara Fattah nach der Vorführung ihres Films. Sie trug ihr Haar offen, hatte ein leichtes Kleid an. Drinnen im Kino mag es noch so kalt sein. Draussen ist jetzt Sommer.


Télérama


“Homeland”, Sesterce d’or au Festival Visions du réel

 
 
Dans “Homeland (Irak année zéro)”, son film couronné en Suisse, le Franco-Irakien Abbas Fahdel tient la chronique de sa famille à Bagdad avant et après l’invasion américaine de 2003. L’œuvre d’une vie.

En attribuant le Sesterce d’or du meilleur long métrage à Homeland (Irak année zéro), d’Abbas Fahdel, le jury du 46e festival Visions du réel, qui s’est déroulé à Nyon, en Suisse, du 17 au 25 avril, a choisi de distinguer l’œuvre d’un homme seul et celle d’une vie. « La chose la plus importante que j’aie pu faire et ferai jamais », assure le cinéaste franco-irakien, auteur de L’Aube du monde en 2009, qui aura mis plus de dix ans à mener à terme ce projet dont il a assuré la production, la réalisation, la prise de vues, la prise de son et le montage. Une chronique familiale bagdadienne, à la veille et au lendemain de l’invasion américaine de 2003.

« Quand s’est précisée la menace d’une guerre, j’ai compris que l’Irak de ma jeunesse, celui que j’avais quitté pour venir étudier le cinéma à Paris, que cet Irak-là était en passe de disparaître. J’ai décidé d’y retourner avec une caméra, de filmer toutes les petites choses du quotidien pour les sauver de l’anéantissement. Pour rejoindre les miens aussi, et peut-être mourir avec eux. Comme le dit l’un des protagonistes du film : à quoi bon rester en vie, si tout le reste de notre famille mourrait ? Peut-être me sentais-je aussi coupable d’être parti. Et puis, j’étais également animé par une sorte de superstition : tant que je les filmais, rien ne pouvait leur arriver. Cela s’est d’ailleurs confirmé. Un mois après que j’ai eu arrêté de tourner, mon neveu Haidar, très présent dans le film, a été assassiné. Quelques mois plus tard, deux de ses cousins ont été tués à leur tour… »

Si la démarche d’Abbas Fahdel s’apparente à celle du film de famille jusque dans son souci d’arracher au temps qui passe quelques bribes de vie, le poids de l’Histoire insuffle au film, également distingué par une mention spéciale du jury interreligieux, une force toute particulière, et lui confère la valeur d’un précieux document. Quant à la proximité qu’il instaure entre le spectateur et les siens, à travers une grande diversité de scènes, elle rend d’autant plus sensible la réalité humaine du peuple irakien, qu’on n’avait sans doute jamais vue d’aussi près. Et pour cause : « Sous Saddam, aucun Irakien ne filmait sa famille. Personne n’avait de caméra, Internet n’existait pas – même les photocopieuses étaient interdites. Lorsque j’ai fait entrer mon matériel en prétextant tourner de simples images familiales, on m’a rappelé qu’il me faudrait, avant de partir, les soumettre au Bureau de la censure de l’Office du cinéma. J’ai donc spécialement tourné des images inoffensives. Quant à celles qui ne l’étaient pas, j’ai dû ruser pour les faire sortir. »

Il faut avoir une idée de la paranoïa à l’œuvre dans le régime de Saddam Hussein pour saisir la dimension subversive de certaines scènes de Homeland. « Si l’on vous entendait dire “le Président Saddam” plutôt que “le Président camarade leader Saddam et Dieu le garde”, vous pouviez être emprisonné. Quand, à la fin d’un de ses discours télévisés, mon beau-frère dit en rigolant : “Changez de chaîne !”, il est conscient du fait que cette phrase peut coûter la vie à toute la famille. Pareil, quand mon neveu craque une allumette et chante “Joyeux anniversaire, Saddam !”, moquerie pareillement passible de la peine de mort. »

Pour déjouer les soupçons lorsqu’il tournait à l’extérieur de la maison, Abbas Fahdel s’est adjoint les services d’un ami, acteur dont il compare la popularité à celle de Gérard Depardieu chez nous. « En le voyant devant ma caméra, tout le monde pensait que je tournais pour la télévision officielle, et je n’avais aucun problème. ».

Des quatre périodes de tournage organisées avant et après la chute du régime, il a rapporté 120 heures de rushes, qu’il a montées dix ans plus tard. « La mort de plusieurs membres de ma famille et de proches m’a rendu impossible de regarder ces images. Il m’a fallu passer par une période de deuil pour être capable d’y revenir. Le dixième anniversaire de l’invasion américaine a été le déclic. J’ai téléphoné à ma sœur, qui m’a dit : “Si tu veux faire ton film, fais-le. Mais on ne le regardera pas.” Voir Haidar, son fils cadet, bouillant de vie, lui est toujours impossible. »

Sans autre source de financement que ses propres économies, Abbas Fahdel a dû apprendre les techniques de post-production pour terminer ce film fort, qu’une durée exceptionnelle (cinq heures et demie) pourrait priver de la diffusion qu’il mérite. Qu’on propose à son auteur d’en monter une version raccourcie pour toucher le public de la télévision, il y réfléchira. Pour l’heure, c’est une juste récompense qui couronne un travail porté par le courage, l’endurance et le cœur.

ARTICLE COMPLET – FULL ARTICLE

telerama_nouveau-logo


Le Blog documentaire

« Homeland (Iraq Year Zero) »

Un documentaire hors normes primé à Nyon

Nous vous en avions parlé dès le dévoilement de la programmation du festival «Visions du Réel». Le film monumental d’Abbas Fahdel, Homeland (Iraq Year Zero), s’est imposé à Nyon comme le grand vainqueur de la compétition, Sesterce d’or du meilleur long métrage et mention spéciale du Jury Interreligieux. Un documentaire courageux, et salutaire, venu illuminer la 46ème édition de la manifestation…

VISIONSDUREEL_AFFICHE_2015_web
« Il s’agit d’une œuvre de référence pour comprendre l’histoire et le présent du Moyen-Orient. Plus qu’un film beau, c’est un film nécessaire. Il devait être réalisé, il doit être vu ».
Telle est l’opinion du directeur de « Visions du Réel », Luciano Barisone, après que le jury de la compétition internationale a accordé le Sesterce d’or àHomeland (Iraq Year Zero), du réalisateur franco-irakien Abbas Fahdel.

Cette fresque de 334 minutes nous emmène en Irak pour nous plonger pendant deux ans dans la vie d’une famille – celle du réalisateur, avant et après l’intervention américaine. Un roman collectif avec « le souffle d’une saga », qui expose « la tragédie et la dignité du peuple irakien dans des moments d’une grande intensité ». Le jury composé de Jean-Stéphane Bron, Nicolas Philibert et Ann Carolin Renninger explique :« Abbas Fahdel dessine le portrait sensible et généreux d’un pays et d’un peuple sur lesquels nous n’avions jusqu’ici qu’une vision simpliste, forgée par 25 ans d’images d’actualités et de propagande. Peu à peu, les clichés s’estompent pour laisser place à des personnages, des hommes, des femmes, des enfants, qui deviennent nos proches. Mêlant le roman familial au roman épique, le quotidien et la guerre, la petite et la grande Histoire, le film nous entraîne de Bagdad aux rives du Tigre, berceau de l’humanité. Un grand film. »

Le jury du Prix Interreligueux (Aida Schläpfer Al Hassani, Mirela Vasadi Blasius, Marc Wehrlin et Daniel Wildmann) ajoute : « Le film pénètre la conscience des spectateurs et nous rapproche des protagonistes de Homeland. Visuellement, nous parvenons à faire partie de leur vie. Le cinéaste a couru de grands risques en faisant ce film et s’est vu également confronté à une tragédie personnelle ».

Avant l’ouverture du festival, Luciano Barisone précisait déjà : « Alors que nous avons visionné 3.700 films au fil de l’année, un documentaire exceptionnel a immédiatement retenu notre attention pour l’édition 2015 il y a quelques mois déjà. Il s’agit d’ailleurs du premier film dont la sélection a été confirmée en vue de sa projection en première mondiale durant le Festival ».

Le Blog documentaire, Cédric Mal, le 26 avril 2015

ARTICLE COMPLET

logo-blog-documentaire2


 

otros1

30 FESTIVAL INTERNACIONAL DE CINE DE MAR DEL PLATA 2015 (03) / CRÍTICAS BREVES (112): HOMELAND: IRAQ YEAR ZERO:

*** Obra maestra ***Hay que verla  **Válida de ver  * Tiene un rasgo redimible ° Sin valor

Por Roger Koza

513857585_640Homeland: Iraq Year Zero, Abbas Fahdel, Irak-Francia, 2015.  (****)

Una extraña obra maestra, una de las películas del año, un retrato de la vida en Irak antes y después de la invasión estadounidense en marzo de 2003, con las lógicas consecuencias de un acto bélico de esa naturaleza. El admirable trabajo de registro y montaje por parte de Abbas Fahdel, quien estudió en su momento con Jean Rouch, permite asir la cotidianidad en Bagdad y la cultura iraquí a partir del punto de vista articulado por el director, que sigue la vida familiar de los suyos en yuxtaposición con la crónica de su país, desde que empieza a conocerse el deseo por parte de Estados Unidos de derrocar a Sadam Hussein. La hazaña humanista de Fahdel consiste en sintetizar una experiencia colectiva, demostrando el desorden estructural que siembran los estadounidenses con sus expediciones democráticas, sin apelar a la demonización del enemigo. Pero este filme tan amable como devastador no sería el mismo sin la presencia de Haidar, el sobrino de 12 años del director, cuya curiosidad y simpatía infinitas entrarán en una deletérea dialéctica sin resolución con la irracionalidad y caprichosa vileza que amparan empresas de esta índole. El penúltimo plano del film sobrevivirá en el recuerdo por años.

Roger Koza / Copyleft 2015


 LE TEMPS

L’autre visage de la guerre en Irak

Publié le 25 avril 2015
 
(DR)

Le festival du film documentaire récompense «Homeland (Iraq Year Zero)», une œuvre bouleversante

Les films fleuve semblent avoir la cote dans les festivals. Après Winter Sleep (3h16) de Nuri Bige Ceylan, palmé d’or à Cannes, Mula sa kung ano ang noon (5h38) de Lav Diaz, pardisé d’or à Locarno, c’est au tour de Homeland (Iraq Year Zero) (5h34) d’Abbas Fahdel de toucher le Sesterce d’or à Nyon. Ces prix ne sont pas un indice d’élitisme cinéphile, car ils distinguent de grandes œuvres dont la longueur se justifie par l’intensité et la richesse du propos.

Homeland a «passé sous les radars de tous les festivals», s’étonnait – et se réjouissait Luciano Barisone. Parmi les 3700 films visionnés au cours de l’année écoulée, celui-ci a immédiatement retenu son attention. Il a été le premier sélectionné pour être projeté en première mondiale à Visions du Réel». Le directeur artistique parle d’un «film de deuil travaillant des blessures terribles, d’une œuvre de référence pour comprendre l’histoire et le présent du Moyen-Orient. Plus qu’un film beau, c’est un film nécessaire. Il devait être réalisé, il doit être vu».

La vie en temps de guerre

Dans Homeland (Iraq Year Zero), home movie à résonance universelle, Abbas Fahdel, relate deux ans de vie familiale en Irak, avant et après l’intervention américaine de 2003. On assiste au spectacle banal et toujours merveilleux de la vie quotidienne. Des frères et sœurs qui se chamaillent, qui rigolent en regardant Mr. Bean à la télé. Des oncles, des amis, des voisins qui prennent le thé, qui racontent des histoires, souvenir d’un incident cocasse à la mosquée ou d’une chèvre qu’une femme médecin trayait tous les matins pour nourrir ses enfants.

L’humeur est détendue, pourtant l’avenir s’assombrit. Entre Tigre et Euphrate, des oiseaux passent comme des menaces. Un bruit d’avion fait lever la tête. On prévoit des matelas contre les fenêtres. On carotte longuement le jardin pour atteindre la nappe phréatique et disposer d’un puits si l’eau courante venait à manquer. Un gosse à cette expression, «J’espère que les Américains ne se serviront pas d’armes de destruction massive», qui en dit beaucoup sur l’air du temps, sur l’humour et la peur.

De la guerre en Irak, les spectateurs occidentaux ont vu des images abstraites de nuits vertes zébrées d’éclairs. Puis des blindés roulant dans le désert, et d’éventuelles silhouettes lointaines, menaçantes. Homeland filme le contrechamp de la propagande américaines: des cieux profonds comme les 1001 nuits, des jardins touffus, des gens qui sont nos frères humains et que l’on quitte le cœur brisés quand le film prend brutalement fin. Comme disait un membre du jury, «Homeland ne peut que gagner».

Visions du Réel enregistre un nouveau record de fréquentation avec plus 35 000 spectateurs. Cette affluence confirme la qualité supérieure des 166 films présentés.

Samedi 25 avril 2015 , par Antoine Duplan

ARTICLE COMPLET – FULL ARTICLE


 24 heures

Homeland (Iraq Year Zero) remporte le prix du 

Meilleur Long Métrage au Festival Visions Du Reel 2015

La 46e édition de Visions du Réel arrive à son terme, mais il est encore temps de cueillir les fines fleurs de la manifestation puisque les films primés par les jurys des différentes catégories sont projetés aujourd’hui à la salle communale de Nyon.

L’occasion, pour ceux qui ne craignent pas les marathons filmiques, de se plonger (à 20h) dans le grand lauréat de la cuvée 2015, Homeland (Iraq Year Zero), distingué du Sesterce d’or du meilleur long-métrage de la Compétition internationale.

Pressenti comme l’un des événements de la sélection, le film d’Abbas Fahdel, diptyque d’une durée de plus de 5 h 30, témoigne de la vie en Irak avant l’intervention américaine de 2003 pour sa première partie et après pour la seconde. Immersion totale dans l’un des pays les plus déstabilisés de la planète.

ARTICLE COMPLET – FULL ARTICLE

24Heures


 TRIBUNE DE GENEVE

Visions du réel: l’Irak et la Syrie à l’honneur

«Homeland (Iraqi Year Zero), émouvant film-fleuve sur une famille irakienne, remporte le Sesterce d’or, tandis que le Sesterce d’argent va à «Coma», une coproduction syrienne et libanaise.

Le festival nyonnais bat son record de fréquentation avec plus de 35'000 spectateurs (Vendredi 24 avril 2015)

Le festival nyonnais bat son record de fréquentation avec plus de 35’000 spectateurs (Vendredi 24 avril 2015)

 Visions du Réel a attribué son Sesterce d’or à «Homeland (Iraqi Year Zero), une chronique émouvante de cinq heures et demie qui suit une famille irakienne avant et après l’intervention américaine de 2003. Le festival nyonnais bat son record de fréquentation avec plus de 35’000 spectateurs.

«Visions du réel confirme son rôle de festival leader en Suisse, avec Locarno et Soleure», a dit vendredi 24 avril à la presse Claude Ruey, président du festival. Avec 136 réalisateurs présents, plus de 1100 professionnels accrédités et 166 films projetés, dont 113 premières mondiales ou internationales, Nyon est un rendez-vous important de la création documentaire et sert de tremplin vers d’autres festivals.

Film hors normes

Cette année, le jury a distingué un film hors normes, de 334 minutes: «Homeland», de l’Irakien Abbas Fahdel. Le réalisateur, qui a étudié le cinéma en France, est rentré en Irak pour filmer la vie de sa famille avant et après l’intervention américaine.

Il livre un témoignage fort sur des gens «qui n’aspiraient qu’à vivre en paix» et qui vont voir mourir plusieurs de leurs proches de balles perdues, dont le propre neveu du réalisateur, un enfant de onze ans, a expliqué Luciano Barisone, directeur du festival.

Plus de 150 heures

Abbas Fahdel a tourné plus de 150 heures de film. Une première version durera neuf heures, puis, au prix de coupes difficiles, cinq heures et demie. Son travail donne un autre regard sur la réalité irakienne, loin des reportages rapides de l’actualité. Il sera diffusé samedi à Nyon de 20h00 à 02h00, en deux parties.

TRIBUNE DE GENEVE, le 24.04.2015

ARTICLE COMPLET – FULL ARTICLE


otros1

30 FESTIVAL INTERNACIONAL DE CINE DE MAR DEL PLATA 2015 (14): HOMELAND: IRAQ YEAR ZERO: EL OTRO ES EL CINE

img_5357

Por Roger Koza

¿Qué sabíamos de los iraquíes? Prácticamente nada. Lo último que habíamos visto sobre ellos era una película de un gran director estadounidense que los retrataba a la distancia y casi siempre por la mira de una sofisticada metralleta. Los iraquíes eran pura maldad o su correlativa inversión, personas dóciles, tal vez inocentes. Lo cierto es que en Francotiradorapenas tenían un rostro y la voz era inaudible. Por suerte existen películas extraordinarias como Homeland: Iraq Year Zero, de Abbas Fahdel, en la que todo lo que creíamos saber se cancela y la característica ignorancia occidental es conjurada por la gracia de una puesta en escena admirable y un punto de vista que no necesita injuriar al invasor pero sí entender las relaciones complejas que se establecen con él.

Fahdel arranca su country home movie filmando la cotidianidad de toda su familia, y en la medida en que lo hace va incorporando paulatinamente el barrio, la ciudad y las afueras de Bagdad. Sin darnos cuenta, en las primeras dos horas y media se aprende muchísimo sobre las costumbres y el orden doméstico, las formas de intercambio afectivo familiar y la cultura general de toda una región, que parece más secular que religiosa. El contexto histórico inicial es el previo a la invasión estadounidense, un poco antes de marzo de 2003, y no faltará algún comentario y una exposición precisa, incluyendo sus consecuencias, acerca de la Guerra del Golfo en 1991. La primera parte culmina ahí y el “guía turístico” es Haidar, el sobrino del director, a quien vemos crecer y cuyo vitalismo y curiosidad constituyen la ubicua dignidad de esta obra maestra de Fahdel.

La invasión quedará en fuera de campo, una elipsis conveniente, y toda la segunda parte se circunscribe a observar estructuralmente los efectos colaterales de la incursión de Bush hijo en esas tierras lejanas y supuestamente pletóricas de armas de destrucción masiva. Resulta revelador cómo desde la presencia estadounidense en adelante toda una forma de vida es arrasada mientras cunde la corrupción, la destrucción de la Historia y sus archivos (incluyendo un instituto de cine y todas sus películas) y la instauración de una especie de Lejano Oeste en el que todos los ciudadanos de un país se ven obligados a llevar armas por su seguridad.

En el desenlace, sucederá algo que sintetiza la abyección de las guerras y el absurdo de la racionalidad que pretende justificar estas empresas “civilizatorias” como un bien para la paz global; impugnación absoluta de un régimen, instante en que, como decía Serge Daney, la película nos mira de frente y por siempre.

Roger Koza / Copyleft 2015

30 FESTIVAL INTERNACIONAL DE CINE DE MAR DEL PLATA 2015 (14)_ HOMELAND_ IRAQ YEAR ZERO_ EL OTRO ES EL CINE « CON LOS OJOS ABIERTOS


Picture_10_400x400

Paz para Nós em Nossos Sonhos (Peace to us in our dreams), de Sharunas Bartas (Lituânia, 2015), A Obra do Século (La Obra del siglo), de Carlos Quintela (Cuba, 2015) e Terra Natal: Iraque Ano Zero (Homeland: Iraq Year Zero), de Abbas Fahdel (Iraque, 2015)

outubro 22, 2015 em Coberturas dos festivais, Em Campo, Pedro Henrique Ferreira

homeland (64)

Distopias e barbárie
por Pedro Henrique Ferreira

É praticamente inevitável que as nações que de algum modo viveram sob o ideário comunista no século XX lidem com as transformações de seus respectivos países a partir da abertura e o que esta proporcionou, seu significado mais profundo nos cenários e nas pessoas. A tônica de muitos destes filmes é a do desamparo e abandono, como se a guinada capitalista houvesse forçado um certo estado pós-apocalíptico. É algo presente no cinema de algumas figuras hoje um pouco mais conhecidas de nós, como, por exemplo, Béla Tarr, Zvyagintsev, Skolimowski ou Mungiu, mas também de figuras que são menos estabelecidas.

Um caso evidente é o de Sharunas Bartas. Inicialmente, encontramos poucos ou nenhum ponto de identificação com seu universo aqui nos trópicos. Razão pela qual não nos conectamos tanto com seu estilo, e a recepção de seus filmes no Brasil eventualmente passa um tanto mais batida do que deveria. Seu cinema, aparentemente difícil de ser tragado, é não obstante um dos mais importantes reflexos do destino do Leste Europeu pós-URSS. Seu mais recente, Paz para Nós em Nossos Sonhos, é um exemplar dos seus mais gélidos, lentos e silenciosos, o que em princípio pode afastar, embora quem esteja disposto a passar pela árdua experiência encontrará filme de alguma força. Não é das maiores obras de Sharunas Bartas, e segue em muito o diapasão de seu longa-metragem prévio, o noir O Renegado do Leste. Embora ainda carregue força particular, não está exatamente à altura de alguns de seus trabalhos anteriores (p.e.:Três Dias, A Casa ou Liberdade). Também não serve como mostruário de seu cinema, embora rapidamente notamos estar dentro de seu universo.

A premissa narrativa é uma viagem à casa de campo de um homem (encenado pelo próprio diretor), sua esposa (Yekaterina Golubeva) e sua filha (Ina-Marija Bartaite, filha biológica de Bartas). Todos vivem dramas e buscam remediá-los com a viagem. O longa-metragem ainda soma alguns outros personagens ao trio da família, outras figuras que vivem e participam do cenário melancólico. O que chama atenção é como a história destas figuras é construída isoladamente. A família convive no mesmo espaço e, no entanto, os dramas de cada um não têm muito nexo com os do outro. A câmera de Bartas não penetra nestes dramas: os observa como parte da superfície do mundo. Como em seus filmes anteriores, o diálogo é quase nulo. O vocabulário cinematográfico minimalista é feito de rostos, gestos, posturas e paisagens. A impressão que nos é deixada é a de um enorme vazio; uma poética construída em cima deste vazio, mais ligada à idéia de uma fotogenia epsteiniana com senso plástico mais contemporâneo (próximo, quiçá, ao de Leos Carax, com quem o diretor guarda proximidades pessoais e artísticas, embora aqui menos que em outros de seus filmes, como, por exemplo, A Casa) do que da angústia antonionesca. Não há incomunicabilidade, pois, para havê-la, pressupõe-se uma vontade não-atingida de diálogo. Os personagens de Bartas, no entanto, mais do que não se entenderem, mal se falam. Convivem meio que alheios uns aos outros, tratando-se quase como que objeto e cenário de suas vidas. Talvez a única exceção seja a violinista bergmaniana, cujo drama nos lembra um pouco o mal vivido pela protagonista de Através do Espelho – embora sem redenção, e quando tenta conversar sobre música clássica com a vizinha, logo nota ter sido uma má ideia sequer começar a investida.

As pequenas tramas vão se construindo paralelamente umas às outras até desaguarem numa tragédia, como no mais recente longa-metragem de Skolimowski. Em muitos sentidos, o filme de Bartas é uma versão mais bem-sucedida de 11 Minutos. A tragédia é também aparentemente conduzida pelo acaso, mas, no fundo, resultado de uma assertiva moral, porém menos externa às circunstâncias que no caso do primeiro, no qual o agente trágico era mais visivelmente um julgamento divino ex machina. Aqui não há Deus. São mais evidentemente as ações dos homens, cada um respondendo individualmente a seus próprios estímulos, dramas e fantasmas, como se os demais coabitantes daquele espaço fossem apenas uma outra parte do cenário. Em um dos discursos finais, uma das poucas falas de Paz em Nós para Nossos Sonhos, o protagonista diz que segue apenas suas vontades, que é assim que o mundo funciona e que qualquer outra atitude é simplesmente mentirosa. O discurso se quer realista e, no entanto, sua associação à tragédia posterior o torna um tanto cínico, como se este tipo de individualismo houvesse criado um mundo de sentimentos erráticos e vítimas aleatórias, como se o capitalismo houvesse nos conduzido moralmente mais próximo à barbárie. A trama minimalista é alçada à condição macro, mítica como nos filmes de Zvyagintsev. É uma visão dos descaminhos do Leste Europeu no mundo após a invasão da abertura de mercados, tornada, se não em dramas pessoais, justamente na exaltação do individualismo presente nos mais novos dramas da realidade cotidiana do país. A tentativa de reconexão com um sentido mais humanista é em vão; o final trágico, sua condenação moral (como em inúmeros dos produtos cinematográficos da região). A experiência comunitária algo distante, inconcebível no mundo moderno e capitalista, um produto de um passado morto e sonhado, referenciado no título.

Encontramos em A Obra do Século outro exemplar sobre o destino distópico de uma nação após o fim da União Soviética, embora quase oposto. Saltamos aqui para uma Cuba estagnada e sofrida, outrora o país de Terceiro Mundo que foi o principal investimento bélico do bloco comunista nas Américas. O que está em jogo é a contraposição entre uma república sonhada e uma realidade disforme. A dualidade é favorecida pelo dispositivo que contrapõe imagens documentais coloridas de propaganda da construção de uma usina nuclear titânica durante os anos da Guerra Fria e a encenação em P/B da vida cotidiana de pessoas que eventualmente se mudaram para uma cidade construída em torno da usina e que, hoje em dia, vivem em certo estado de sonambulismo. As imagens coloridas do passado anunciam desenvolvimento e vislumbram um futuro otimista. As imagens do presente são de uma cidade vazia, o resultado de um projeto naufragado, e revelam imobilidade torpe. A Cuba que enxergamos não é aquela do Caribe paradisíaco, mas um mundo em ruínas, que parou no tempo após o fim de seu principal investidor.

A trama acompanha três homens que vivem sob o mesmo teto. O engenheiro Rafael (Mario Guerra) mudou-se para a cidade durante a década de 1970 para trabalhar na usina. Desde o abandono do projeto, vive desempregado e sem ter dinheiro para sair de lá. Junto dele, moram seu pai, Otto (Mario Balmaseda), um senhor de opiniões retrógradas que acredita ainda mandar na casa, e seu filho, Leo (Leonardo Gascón), jovem que retornou ao apartamento do pai após separação traumática com a ex-mulher. Enquanto o exterior é um cenário amplo e vazio da cidade, centralizada pela monumental usina largada às moscas, o interior é um espaço apertado, que força as três figuras a estarem em contato o tempo todo. O lugar cria evidente conflito de gerações entre uma Cuba reacionária pré-regime, representada pela figura do avô, uma outra Cuba que participou do regime e hoje se vê frustrada pelos descaminhos da nação, representada na figura do pai, e ainda uma terceira Cuba jovem, apática, sem vontade de criar vínculos mais fortes com o passado e mais envolta em seus próprios dramas pessoais.

Os grandes méritos de A Obra do Século estão na capacidade inventiva e no olhar humano com a situação. O cenário apocalíptico não se torna desculpa para a frieza. Neste sentido, a atitude de Carlos Machado Quintela é quase oposta à de Bartas. Mesmo na medida em que paira sobre aqueles personagens um enorme sofrimento, nem por isso o cinema precisa enxergá-lo como tragédia. As situações são, com muita simplicidade, trabalhadas mais na chave do cômico, seja nas perguntas absurdas do avô, na autoindulgência do pai ou na falta de conexão com a realidade do filho. Mesmo o leit motif do peixe no aquário, figura que simboliza a paralisia daquela família, adquire mais conotações cômicas que propriamente pesadas. É como se o diretor cubano vislumbrasse que, mesmo na distopia, existe enorme capacidade de rir de si próprio. Eventualmente, mesmo genuínos laços fraternais. Em suma, que o cenário do abandono não elimina estados de espírito próprios ao homem em qualquer local ou situação, que não nos cobra necessariamente uma atitude realista diante da cena, que a inventividade e o sonho ainda são possíveis. Não à toa, A Obra do Século em alguns momentos flerta com a ficção científica, transformando o elefante branco em máquina, aproveitando-se do cenário pós-apocalíptico de forma semelhante, por exemplo, aBranco Sai, Preto Fica em alguns cenários da Ceilândia.

Quem mais se dedicou a mostrar a própria nação como um espaço pós-apocalíptico foi certamente o diretor Abbas Fahdel no impressionante documentário de cinco horas e meia Terra Natal: Iraque Ano Zero. As circunstâncias aqui são completamente diferentes das dos dois filmes mencionados anteriormente. Primeiramente, porque o Iraque não participou do bloco soviético; tornou-se inimigo dos EUA mais à frente. Depois, por causa do dispositivo. O longa-metragem de Fahdel investe no cinema direto, esboçando uma crônica de sua própria família nos momentos imediatamente anterior e posterior à invasão norte-americana.A Obra do Século também mostrava o passado, mas como projeto, não como cotidiano. Fahdel consegue extrair da primeira parte de seu longa-metragem um retrato fidedigno dos hábitos dos moradores de Bagdá, que faz também com que a segunda parte do filme se torne poderosa graças à oposição com a primeira.

Um comentário sobre o dispositivo: houve dois outros filmes exibidos no Festival do Rio que também fizeram experiências cinematográficas partindo do cinema direto e que, mais do que isso, se dedicaram a alçar o fato epistolar à condição de representante de uma fronteira geográfica/tempo histórico. No filme EmJackson Heights, Frederic Wiseman se via diante de um bairro nova-iorquino e seus múltiplos espaços, demonstrando a democracia norte-americana ideal em estado vivo. Em Istambul – Crônica de uma Revolta, Pilavci e Gottschilich faziam remissão à cidade enquanto filmavam uma praça, extraindo consequências sobre um estado político mais amplo. Em Terra Natal: Iraque Ano Zero, o destino do país é apresentado pelo vai-e-vém de uma família. No primeiro caso, Wiseman se abstém completamente de intervir na narrativa. No segundo caso, as duas diretoras se engajam politicamente em um dos lados da disputa e recontam as experiências vividas, adicionando inclusive a voz em off que reorganiza as imagens. Já Terra Natal: Iraque Ano Zero faz curioso jogo em que o diretor filma praticamente sua vida, aceitando-se como personagem, embora sempre oculto por trás da câmera. Recusa-se a omitir opiniões certeiras sobre os muitos assuntos discutidos, embora fique evidente a recusa à invasão norte-americana tanto quanto ao governo de Saddam Hussein.

Este modo simples de filmar se revela de enorme complexidade. Envolve a tarefa árdua de dialogar ativamente com o que está em cena e extrair o sentido dramático. Propor as regras da partida sem interferir no resultado. A capacidade de criar distância das imagens que fazem ou fizeram parte de seu próprio repertório cotidiano nos recorda o trabalho de Jonas Mekas, embora Fahdel aqui tenha de lidar com o fato presente, e não com a memória. Graças a esta habilidade e ao cuidado que tem para não se tornar o protagonista da filmagem de sua própria vida, o diretor consegue inventar, por exemplo, um personagem tão carismático quanto o do sobrinho, que, de figura ocasional, é enaltecido a representante de um mundo, seu destino tornado a condição de toda uma geração.

O título faz menção à obra de Rossellini, Alemanha, Ano Zero, em qua a vida de um outro menino encarnava o fantasma germânico do imediato pós-guerra. A morte dele era a tragédia do espírito e a expiação de um destino histórico. Em muitos sentidos, é o mesmo que acontece com o sobrinho em Terra Natal: Iraque Ano Zero. Do mesmo jeito que o personagem rosselliniano, a criança se porta como adulto. É o herdeiro de uma tradição, um tanto velha e cheia de verdades. O tempo todo, incorpora um espectro maior que seu pequeno corpo. O que chama atenção principalmente é como o longa-metragem consegue explicitar que a mudança sofrida por Bagdá após os bombardeios norte-americanos não está somente nos escombros de uma antiga civilização ou no cerceamento imposto pelo exército invasor. O Iraque passa a ser uma terra caótica e sem lei. Tiroteios são cotidianos. O desemprego cresce. Os moradores se adequam a esta nova realidade imposta pela guerra da forma como podem.

Mais importante que isso, a mentalidade começa a se transformar com a iminência da guerra. As crianças já brincavam de dar tiros e jogar bombas. Um sentido de barbárie penetra sorrateiramente naquele microcosmo. O herói rosselliniano de Alemanha, Ano Zero agia inconscientemente como que por brincadeira. A certa altura, a brincadeira se torna realidade. O mesmo acontece aqui. A guerra não destrói apenas os cenários. Ela inventa novas paisagens mentais. Transforma o mundo não somente a partir de uma disputa pelo poder, mas principalmente através do repertório de imagens que povoa o imaginário comum. Paulatinamente, acostumamo-nos a viver em outro mundo, com outras regras, onde tiroteios, por exemplo, são dados comuns. O que conduz Terra Natal: Iraque Ano Zero a seu momento ápice, surpreendente justamente porque passamos a nos acostumar com a aquilo tudo, o momento em que a tal brincadeira enfim ganha realidade. Neste sentido, o suicídio do menino em Alemanha, Ano Zero é um correlativo da morte do menino iraquiano. Ela surge como uma espécie de martírio mais amplo, uma revelação de que certas coisas foram perdidas.

http://revistacinetica.com.br/home/paz-para-nos-em-nossos-sonhos-peace-to-us-in-our-dreams-de-sharunas-bartas-lituania-2015-a-obra-do-seculo-la-obra-del-siglo-de-carlos-quintela-cuba-2015-e-terra-natal-iraque-ano-zero-h/


Medir a resiliência de um povo
Texto de Victor Guimarães, publicado originalmente (em espanhol) na cobertura do IV Festival Olhar de Cinema para a revista Desistfilm.

É extremamente difícil se referir a Homeland como um filme. Nomeá-lo assim é afirmar que essa existência pertenceria à mesma espécie ou categoria ontológica de um Jurassic World ou um filme como Soft in the Head de Nathan Silver (visto aqui no Olhar de Cinema). Certamente não é o caso. A obra monumental de Abbas Fahdel – e a experiência absolutamente inesquecível que é estar na frente da tela por pouco mais de cinco horas e meia – pertence a um conjunto muito limitado e preciso de obras da humanidade, entre as quais eu citaria Os Desastres da Guerra de Goya, Guernica de Picasso, Noite e Neblina de Resnais e A Oeste dos Trilhos de Wang Bing. O que une estas materialidades tão distintas não é apenas o dado de que sejam obras-primas ou até mesmo o fato de que todas tenham levado anos para se completar. Isso também conta, mas o que realmente conecta essas obras é o fato de que todas são figurações tão potentes, formalmente íntegras e irrepetíveis da aniquilação do homem pelo homem, que não é possível olhar para uma pintura, um filme ou um homem da mesma maneira depois de entrar em contato com elas.
Homeland é dividido em duas partes: antes e depois da invasão do Iraque pelos EUA em 2003 (o intervalo equivale ao momento dos bombardeios em Bagdá, que não vemos). Na primeira parte, o diretor filma de forma muito próxima sua numerosa família de classe média, enquanto seus entes queridos se preparam para o que está por vir. Os adultos compram lanternas e armazenam alimentos, enquanto as crianças se esmeram em cuidar do poço (faltará água e é necessário escavar o solo do jardim). Há apreensão e, especialmente, resiliência: ninguém se desespera, todos reagem com uma força inominável à guerra que se aproxima.
A imagem de Saddam Hussein é onipresente na televisão: em videoclipes dignos dos karaokês de Jia Zhangke, o ditador aparece como líder, herói, pai, divindade, estrela pop, imagem de proteção de tela. A família assiste TV e se cala, mas já é possível sentir a densidade do silêncio e imaginar o que se esconde por detrás dos olhares. O papel da televisão nos diários de Perlov ressoa nessas sequências, mas apontar uma referência cinematográfica é algo demasiado fútil aqui.
O homem com a câmera quase não faz perguntas, mas o olhar não é observacional: ele provoca as pessoas, prepara a cena com a mesma atenção que o torna pronto a se posicionar frente aos devires do real. Seu sobrinho Haidar – um menino de doze anos que se tornará protagonista e permanecerá para sempre em nossa memória – atira frutas do terraço para os seus colegas na rua e afirma: “assim não haverá mais frutas, tio”, como se rejeitasse o jogo proposto. Apesar do horror da situação, a mise en scène é divertida, não se deixa capturar pela tristeza. Há diálogos apreensivos, mas há também as bonitas luzes do aniversário no terraço e as cores de cada prato no almoço dominical. Abbas Fahdel aposta na alegria com o mesmo ímpeto com que rejeita o sentimentalismo: com uma coerência formal impecável, que atravessa todas as escolhas (não há sequer uma nota musical na trilha sonora que seja externa à cena).

Não há desespero porque a guerra de 1991 não terminou para o povo iraquiano. O embargo econômico faz o seu trabalho lento de destruição há duas décadas e todo o país é um amontoado de ruínas, como aquelas na belíssima cidade de Hit, onde as crianças brincam com armas de plástico. Sobre as ruínas tudo se torna alegoria e talvez não haja um momento tão forte como aquele em que o menino começa a trocar a fita isolante da janela (para evitar que se parta e os pedaços de vidro voem pela casa). A da última guerra ainda está lá e a fita torna-se uma metáfora de um país que nunca se recuperou da última catástrofe e já tem de enfrentar a próxima.
A convivência da família e os jogos infantis são cálidos e cheios de paixão, mas a encenação e a montagem são duras, secas, implacáveis. Em toda a primeira parte, o trabalho da câmera parece ser o de um instrumento que tem a ver com a física: medir a resiliência das janelas, das paredes, das mulheres, dos homens e das crianças. A dureza é refletida em uma escolha surpreendente e assombrosa: num dado momento, ainda antes do intervalo, um letreiro informa que o protagonista morrerá em poucos anos, antes de completar os quinze.
É então que percebemos que tudo o que vemos se trata de uma melancólica elegia. O ritmo da montagem torna-se mais lento, como se fosse necessário demorar-se na cor de cada refeição, em cada canto da casa, em cada rosto, antes que tudo desapareça para sempre. A vida pulsa e acompanhamos sua respiração na tela, mas o documentário se aproxima do seu limite mais extremo: filmar a morte já é possível em grande medida porque os personagens já estão mortos, já se tornaram fantasmas. A sombra da morte é invisível, mas se projeta inevitavelmente sobre o rosto do menino que sorri e zomba da irmã.
Mesmo o que não se mostra é extraordinário. O tempo sem imagens do intervalo entre uma parte e a outra não poderia ser mais afirmativo. As imagens da guerra já vimos na TV e sabemos que elas são um acúmulo de clichês e que se assemelham ao videogame. Imaginar o horror não é difícil. Já foi filmado inúmeras vezes e sempre tem gosto de sangue e cheiro de queimado. Não é preciso mostrar uma vez mais o que a gigantesca máquina de guerra norte-americana é capaz de fazer: para isso existe o jornalismo e as séries de televisão no pior dos casos, e no melhor, os filmes de Brian de Palma, Kathryn Bigelow e Clint Eastwood. Mas mesmoThe Hurt Locker e American Sniper parecem frívolos diante de Homeland.

A segunda parte começa e tudo muda depois dessa elipse, uma das mais fortes da história do cinema. Os ocupantes norte-americanos estão em toda parte e o que era uma ponte que levava à casa do avô se tornou “território militar”. O estado de exceção é o novo reino. Os soldados podem tudo e nada acontece: assediam, perseguem, matam e o direito e a lei são uma piada. O que era uma estação de rádio popular tornou-se um monte de ferro e concreto e a convenção internacional que proíbe o ataque contra as rádios é mais uma nota de rodapé esquecida pela história.
O menino que sorria e brincava contente com seus primos tornou-se um adulto precoce. Seu olhar é agora sério e cheio de uma revolta profunda. Os bate-papos alegres com seus irmãos deram lugar a uma inimaginável discussão acalorada com um traficante de armas fiel a Saddam. Atirar frutas na rua faz parte de um passado distante; o garoto agora se rebela contra os pais porque não pode disparar a metralhadora para comemorar a morte dos filhos do ditador com seus vizinhos. O que era ternura agora é ódio e sangue nos olhos.
A forma também muda radicalmente. O que era registro do cotidiano da família torna-se reportagem e peregrinação pelas ruas, bairros, novas ruínas que substituem as antigas. A observação dá lugar à entrevista e à reivindicação inflamada. A câmera que era paciente e delicada se converte em megafone multitudinário: mal chega a um bairro, as pessoas se aglomeram em torno do cineasta, prontas a disparar mais um testemunho sombrio sobre as ações dos militares. Há desaparecidos, vizinhanças  inteiras destruídas por mísseis, mulheres e homens que choram e gritam por alguma ajuda. O inferno é cinza, sujo e tem a cor da poeira do deserto. Mas há também aqueles inúmeros retratos de crianças, adultos e velhos iraquianos que nos olham  com um sorriso e preenchem toda a duração do Homeland. O povo é o que continua a surgir em cada olhar.
“A vida era melhor antes do petróleo”, diz um deles. Um comunista lembra-se que Saddam converteu o povo iraquiano em uma multidão de esquizofrênicos: a censura fazia com que a pessoa fosse uma no trabalho e outra em casa; uma pessoa por fora e outra por dentro. O irmão do cineasta explica que a guerra criou um enorme exército de saqueadores, sempre dispostos a agir nesse enorme caos que dá lugar à violência cotidiana. E se tudo mudou é apenas para continuar igual: a ameaça aos adversários do governo anterior persiste na revolta desse homem pobre que recolhe lixo em uma carreta e se pergunta por que os soldados sempre lhe apontam as armas gratuitamente; as valas comuns da ditadura perduram no tiro anônimo na rua, matando um jovem que levava uma peça sobressalente para ajudar o vizinho e nunca será investigado.
A desesperança é brutal, mas as piadas ainda estão presentes: todos se burlam da professora integrante do partido Baath que pediu aos alunos para rasgarem “com respeito” a foto de Saddam contida no livro didático. Esses homens e mulheres (os que ficaram) encontram energia onde há apenas destruição e a resiliência desse povo parece eterna. Mas a vida do menino, a vida única e irrepetível desse menino, não é. Nós já sabíamos, mas nem mesmo a integridade estética inesgotável de Abbas Fahdel tinha nos preparado para esse momento da noite em que se escuta um disparo, um grito e um corte seco nos leva a uma fotografia mortuária na parede. A essa fotografia e ao silêncio mais denso que experimentei na vida ao sair de uma sala de cinema. Depois das cinco horas e meia de Homeland, os mortos-vivos somos nós.
Homeland: Iraq Year Zero / Terra natal : Iraque ano zero

Iraque/França, 2015, 334 min.
De  Abbas Fahdel
Crônicas do cotidiano no Iraque antes e depois da invasão Norte-americana.

Parte I: Antes da queda (160 min.)

Durante vários meses o diretor filmou um grupo de iraquianos, na sua maioria membros de sua própria família, em suas expectativas sobre a guerra. Essa primeira parte do filme se encerra com o início dos ataques norte-americanos à Bagdá.

Parte II: Após a batalha (174 min.)

Os americanos invadem o Iraque, e o filme mostra as consequências dessa invasão no cotidiano dos personagens.

galhardete-VI-cachoeiradoc-21 Homeland_ Iraq Year Zero _ Terra natal _ Iraque ano zero _ CachoeiraDoc

__________________________________________________________________

 Terra Natal: Iraque Ano Zero

homeland (60)

É das coisas mais incríveis e potentes a experiência de assistir a Terra Natal: Iraque Ano Zero na sala de cinema, sessão mais que especial programada no CachoeiraDoc. É um filme de cinco horas e meia que nos coloca no epicentro da vida no Iraque, divididoem dois momentos: antes e depois da invasão bélica americana no país.

Mas Abbas Fahdel não só abre as portas da realidade do seu país, captada pelo seu olhar, como nos apresenta esse microcosmo a partir da sua própria casa e família, acompanhando a vida dos que lhe estão perto. Talvez por essa proximidade o cineasta tenha demorado tanto para nos apresentar esse filme pronto, bem distante do ano de 2003 quando fez as últimas imagens, logo após a invasão americana.

Há a dimensão volumosa do próprio material filmado, mas também a dimensão emocional, certamente um abalo forte para o cineasta e um ato de coragem por em cena a tragédia que é ter sua vida atravessada pela guerra, algo que bate no público de uma forma muito intensa, mas em outra medida, é claro.

A primeira parte do filme é um riquíssimo panorama da vida cotidiana em Bagdá. Evolui da rotina familiar do cineasta, os pequenos afazeres e encontros dentro de casa, e depois ganha as ruas, o rosto do povo, seu trabalho, sua inscrição numa paisagem que não será a mesma. O filme também cresce em tensão a partir de uma invasão que se torna iminente e ganha aos poucos o conhecimento do povo. Para os não iraquianos é também um momento de aproximação com cultura e costumes tão diversos e filtrados por olhares exóticos, turísticos e limitadores que encontramos em muitos discursos por aí – e isso é inerente a qualquer país ou cultura.

É muito forte ver essas imagens nos dias de hoje quando já sabemos o que espera aquele país, a barbárie que virá. Há desde imagens na televisão de Saddam Hussein afirmando estar pronto para a batalha e certo da vitória, até garotas brincando e rindo colocando fraldas na cara como uma possível solução em caso de explosões de bombas de gás.

A montagem exemplar dessa parte do filme avança da vida comum àquela que começa a sondar a possibilidade de guerra, muitas vezes desacreditada, até tornar-se um assunto de preocupação geral e então emana como algo palpável. É como se soubéssemos desde sempre aonde tudo isso chega, mas sem querer encará-lo – e talvez a duração alongada seja um alívio momentâneo nesse sentido. Há também a presença do sobrinho de Fahdel, o garoto Haidar, mas falarei dele posteriormente.

A segunda parte do filme nos coloca numa perspectiva dupla: mostra a destruição que já esperamos ver, mas também surpreende um tanto. Isso porque a vida segue em Bagdá, a cidade resiste, as pessoas continuam a trabalhar, frequentar a universidade, sair nas ruas. Claro que tudo isso acontece na medida do possível, daquilo que restou de pé, da vontade que ainda emana de alguns. A cidade não foi dizimada, mas a dor é constante. Os que ficaram e sobreviveram lidam com a perda e o sentimento de ausência constante.

Daí que uma das maiores forças de Terra Natal é nunca filmar a barbárie em si – na verdade os conflitos bélicos mais intensos já acabaram e os americanos já dominam o país. O diretor não mostra o caos, mas o caos está lá, presentificado a todo instante, aonde quer que ele vá, pelas histórias das pessoas na rua, pelos escombros e os restos do que sobrou e resistiu ao fogo, pelas perdas e dores dos quais o filme não deixa de revelar.

Terra Natal não está preocupado em soar piegas e urgente, denuncista e choroso, porque seu tempo é outro, de mais maturação e penetração numa realidade difícil de mensurar e adentrar quando não se passou por aquela situação – talvez deslize no espetaculoso quando explora as cicatrizes de uma criança encontrada na rua. Mas ao mesmo tempo o filme não deixa de comover por aquilo que aquelas imagens representam e evocam, pela força que elas encerram. Um dos momentos mais dolorosos, pela sua significação, é quando o diretor visita um antigo estúdio de cinema e se depara com uma série de rolos fílmicos queimados, destruídos, irrecuperáveis; as imagens feitas por um povo, registro de sua cultura e de um tempo, fagulha de vida e criação, destroçados pela guerra. É triste ver o cinema documentar a morte do cinema. Porém, as memórias e as marcas do homem não são mais importantes do que os próprios homens, forçados a viver nesse contexto de dor e ausência.

E então chegamos a Haidar, o sobrinho de Fahdel, que atravessa toda a narrativa do filme e marca presença como personagem que cresce cada vez mais como homem político, testemunha obrigado a ressignificar as novas imagens e situações que lhe são confrontadas, que lhe atravessam a vida de forma cruel. Numa decisão duríssima, tão sincera e dolorosa por parte do diretor, o filme prenuncia, lá na metade do primeiro segmento, o destino trágico que o garoto vai encontrar, colocando o espectador num estado de inquietação maior.

Esse movimento representa a essência de uma história que a todo instante trabalha com as imagens e percepções que já trazemos de antemão, mesmo que elas não deixem de nos surpreender em muitos momentos, prefigurada na História, mas intensificada pelo trabalho insistente de Fahdel. É como a apuração de um olhar carregado de dor e determinação.

Haidar visita um lugar bombardeado onde pessoas morreram, então transformado numa espécie de galeria a ser visitada e lembrada como lugar de horror. Ele aponta para fotos de corpos mortos de crianças que ali estavam, e a cena dói como prenúncio fatídico de um futuro interrompido para Haidar. É o prenúncio do horror que temos de olhar, não acreditar, torcer para ser diferente, mas no fim enfrentar, de alguma maneira, com toda sua crueza. É no mínimo uma experiência emocional devastadora.

Postado por Rafael Carvalho

Article complet

CachoeiraDoc banner


f2357020-2317-0133-7dee-0a67ec7fcf67

REVIEW: Patria (Irak Año Cero)

Por
Marco César Monroy

Homeland 1

Calificación Cine Pro: 5/5

A lo largo de casi tres horas, Abbas Fahdel abre la ventana al mundo musulmán, hasta ahora aparentemente hermético para los occidentales. A través de su mirada conocemos a su pueblo en una situación fatal: la llegada de una guerra. Motivo suficiente para desencadenar una reflexión sobre la vida misma y el amor a un país. La segunda parte abarca las consecuencias de una guerra narradas desde la perspectiva de los ciudadanos de Bagdad. El trabajo propone una visión civil donde no domina el dramatismo, sino la confusión e integración de la guerra a la vida cotidiana de un pueblo.

Casi seis horas de película son suficientes para que se abra un mundo frente a nosotros. Un mundo que normalmente había sido retratado desde fuera, lejano y ajeno. Un mundo que únicamente conocíamos por el nombre de Irak. Patria (Irak año cero) del director iraquí Abbas Fahdel no sólo muestra los conflictos bélicos que se suscitaron en Irak tras la invasión estadounidense en 2003, sino que va más allá y manifiesta la forma de vida de toda una nación entera.

Una cámara en mano, manipulada por el ojo del propio director, registra en un primer momento la vida de su propia familia, en una especia de película casera guiada casi a modo de tour por Haidar, el pequeño sobrino de doce años de Fahdel. En principio se muestra lo elemental de la estructura familiar para la conformación de una sociedad con relaciones aún más complejas, y que siempre tienen su correlato con determinadas épocas históricas. Pero no sólo vemos éste entramado de relaciones sociales, más importante aún es que se nos hace patente el conflicto emocional, interno y personal que vive y vivirá cada miembro de la familia. Así transcurrirá la primera parte de la película, en la que progresivamente se dejarán los linderos familiares para entretejer y entrever cada vez más las bifurcaciones que van surgiendo.

La segunda parte se filma a partir de la ocupación por parte del ejército estadounidense, dejando fuera de la pantalla el conflicto armado, pues aquello que ignorábamos era lo que internamente se vivía más no el hecho mismo de la guerra. Ya no habrá tanta concentración en el nido familiar, la atención ahora se ocupará más del caos que habita en las calles. De este modo Abbas Fahdel borra el “entre” y se ocupa de sus dos polos: el antes y el después; el antes de la caída y el después de la batalla. Sin duda esto responde a unas de las principales preocupaciones del film: el problema de lo Otro. Lo que tanto le preocupa al director no es ya una reflexión, sino una flexión sobre la realidad inmediata que viven los iraquíes, la cual nos hace preguntar: ¿Quiénes son y cómo viven esta realidad que los circunscribe? Una pregunta que no es exclusiva para el espectador y que alcanza a sus propios protagonistas.

Las imágenes son libres y se mueven únicamente con el propósito de encarnar lo que ellas mismas son. Bajo esta premisa se podría conjurar el ejercicio cinematográfico que ejecuta Fahdel en su película; el cine muestra eso que está ahí pero que normalmente no se percibe y que al mismo tiempo reclama ser visto. Muestra también los fantasmas de fuerzas que se consumen unas a otras en una lucha interminable que no está mediada por ninguna moral y que se explica e implica a través de la oscilación que va de la vida a la muerte y de la muerte a la vida. Patria (Irak año cero) no es una película más sobre la guerra, es una obra magna que se alza y se guarda a sí misma un lugar dentro de la Historia del cine.

https://cineproentertainment.wordpress.com/2016/03/06/review-patria-irak-ano-cero/


logo_carta_maior

Iraque Ano Zero: Como destruir um país

O filme mostra as consequências dessa invasão americana no dia-a-dia. Foi o silêncio mais denso que experimentei na vida ao sair de uma sala de cinema.


A penúltima imagem seguida da noite da tela negra e de um tiro seco, no filme do monumental documentário de quase seis horas (dividido em duas partes), Terra Natal/Iraque ano Zero: Antes da Queda e Depois da Batalha, do cineasta franco-iraquiano Abbas Fahdel, é um soco no rosto do espectador. Tão violenta a situação filmada, que o diretor, depois daquele instante trágico, durante dez anos não conseguiu tocar no material com o qual filmou a sua própria família, em Bagdá, a partir de fevereiro de 2000.

homeland (7)

Agora, depois de recusado por exibidores e produtores europeus pela sua duração fora dos padrões comerciais, o filme de Fahdel inicia, enfim, um circuito de apresentações em festivais. Em Tribeca, em Nyon, na Suiça, Locarno e em três sessões,  na Mostra Fronteiras, no Festival do Rio, este mês. Homeland está sendo mostrado também no New York Film Festival. Na primavera de 2016 estreia na França com distribuição da produtora árabe Nour.

No Festival de Tribeca foi recebido como “documentário fundamental para se compreender o Oriente Médio do passado e do presente.%u20B Não é preciso mostrar uma vez mais o que a gigantesca máquina de guerra norte-americana é capaz de fazer. Para isso existe o jornalismo, as séries de televisão e os filmes de Brian de Palma, Kathryn Bigelow e Clint Eastwood que parecem frívolos diante de Terra Natal,” escreveu o crítico Victor Guimarães, durante o Festival de Nyon.

Sem narração em off nem comentários de qualquer espécie, até para preservar a segurança familiar, a primeira parte, Antes da Queda, antecede a invasão americana. Foi realizada durante a censura feroz da ditadura de Saddam Hussein. As imagens dessas crônicas familiares de Fahdel têm uma força tal que levam o espectador a acompanhar, escorregando para ela até desapercebido, a vida cotidiana sem maquilagem e quase nada conhecida, de uma família – a do diretor – de classe média, da capital do Iraque, culta, educada, bem posta, de intelectuais, profissionais liberais, moças e rapazes estudantes universitários, originada da cidade de Hit, cerca de 150 quilômetros de Bagdá, à beira do Eufrates – ocupada atualmente pelo exército do Estado Islâmico.

Abbas Fahdel aposta na alegria de viver, nessa primeira parte, apesar da vida difícil, e rejeita o sentimentalismo. Não há uma nota musical na trilha sonora que seja externa à cena. Tudo é aparentemente tranquilizador na confortável casa com chão forrado de tapetes. As mulheres trabalham na cozinha, o fogareiro no meio da sala aquece, a televisão ligada (e censurada) nos seguidos discursos ridículos de Saddam. O terraço árabe, o pomar do vizinho, a sombra das macieiras, a placidez. Mas os takes insistentes no relógio de mesa parecem lembrar que o tempo está se esgotando para mais uma guerra começar, depois das guerras do Irã e do Golfo – é fevereiro de 2002.

Um dos sobrinhos de Fahdel assume o protagonismo. Menino de 12 anos, carismático, perspicaz e inteligente, amadurecido antes do tempo, Haydar será um fio condutor, no filme, de várias situações apresentadas: na feira, no mercado, no sebo de livros antigos, nas férias com os colegas em Hit. A nova guerra que está por vir não assusta. ”Guerra é o nosso destino,” diz um professor cujo parco salário de 15 dólares em escolas na capital o faz retornar para trabalhar na propriedade da família, em Hit.

Lá, galos cantam nos jardins e os meninos brincam no Tigre. Judeus convertidos ao islamismo na década dos anos 80 são entrevistados. Outros, comunistas declarados, também. “A vida era melhor antes do petróleo”, diz um. “O embargo (N.R. econômico) já uma guerra,” diz outro, comentando a falta de medicamentos, o racionamento de alimentos e os estoques de pão e cestas básicas distribuídas pelo governo que começam a serem providenciados (mais uma vez) pelas famílias.

Um comunista, na segunda parte, lembra: Saddam converteu o povo iraquiano em uma multidão de esquizofrênicos. A censura fazia com que a pessoa fosse uma no trabalho e outra em casa; uma pessoa por fora e outra por dentro, diz ele.

Antes da queda, no entanto, as crianças falam, com naturalidade, sobre  guerras, bombas e mísseis.

Em Depois da Batalha (que não houve) da capital e da invasão americana não há mais, é claro, militantes do partido Baath, nos bairros, percorrendo regularmente as residências para fiscalizar o retrato de Sadam pendurado na sala. As ruínas estão por toda parte. Vê-se prédios públicos incendiados depois de bombardeados; um deles, os estúdios do antes avançado cinema iraquiano, com todos os seus arquivos. “Pode-se vingar de um regime político, mas não de uma cultura; e transformar a memória de um povo em pó,” diz, desolado, um parente de Abbas.

Os americanos chegaram, e o filme mostra as consequências dessa invasão no dia-a-dia dos personagens. A poderosa crônica do cotidiano do Iraque mostra a tragédia do povo e ganha momentos mais intensos.

Um grupo de garotos mostra um companheiro com as pernas atrofiadas, que seria alvo do deboche de soldados americanos. O irmão do cineasta explica que a guerra criou um exército de saqueadores, sempre dispostos a agir no imenso caos da violência cotidiana da cidade dos ladrões e da dilapidação sem trégua. Todos devem se armar e guardar munição em casa para tentar garantir a segurança familiar. Não há polícia nem ao menos guardas para ordenar o salve-se quem puder do trânsito. As moças não saem de casa, sozinhas, porque correm o risco permanente de estupro. Se tudo mudou é apenas para continuar igual. A ameaça que antes se dirigia aos adversários do governo anterior, baathista, persiste agora sobre os acusados (muitos, injustamente) de terem pertencido ao partido de Saddam, e estão condenados ao desemprego permanente e ao desespero.

Um homem muito pobre, revoltado, recolhendo lixo em uma carreta, se pergunta por que os soldados sempre apontam suas armas, gratuitamente, contra ele. E se antes eram as valas comuns da ditadura, depois da invasão, é a bala que mata um jovem carregando a peça sobressalente de um automóvel para ajudar o vizinho. Um crime que nunca será investigado porque não há ninguém para investigar.

“Um documentário meu, Back to Babylon, foi exibido em um canal de TV francês. Uma indagação perturbadora, no artigo publicado em jornal, sobre o filme, me deixou abalado,” diz Abbas Fahdel. ”Seremos os últimos a ver aquelas pessoas vivas?” perguntava o autor do texto. A pergunta me chocou.  A idéia de que os membros da minha família, meus amigos e as pessoas desconhecidas que eu filmei poderiam não sobreviver à próxima guerra era quase insuportável para mim. Sob a pressão de certa superstição não admitida, decidi voltar ao Iraque e continuar a filmar a parte dois. Fui levado pela esperança, também supersticiosa, de que poderia salvá-los do perigo iminente. Infelizmente, a espiral de violência que tomou o país, em breve mergulharia a minha família no luto.”

O sobrinho de Fahdel, o menino Haydar, de 12 anos, foi alvejado e morto por uma bala perdida, dentro do carro que atravessava uma avenida de Bagdá. Em sua companhia estavam o tio e o próprio Fahdel com a sua câmera na mão. Terra natal/Depois da Batalha termina com o grito de Haydar. Em seguida, a tela negra.

“Foi o silêncio mais denso que experimentei na vida ao sair de uma sala de cinema,” escreveu um crítico suíço. Mesma sensação nós experimentamos, deixando o cinema do Instituto Moreira Salles, na Gávea, no Rio de Janeiro.

(Abbas Fahdel é autor dos docs Back to Babylon e We Iraquis. Nasceu na região da antiga Babilônia e vive na França desde os 18 anos. Estudou cinema em Paris com Jean Rouch e mora na cidade com a mulher e a filha. Com o seu passaporte europeu conseguiu entrar e sair do Iraque com o material filmado de Homeland/Iraq Year Zero – e com a ajuda de amigos da capital iraquiana e de um diplomata francês. Atualmente filma Bagdah.)

*Jornalista.

Créditos da foto: reprodução


 

logolakome

خارج مجال الرؤية
إكرام إبن الشريف

.الزمان : سنة صفر
.المكان : العراق
.القصة : 334 دقيقة من حياة أسرة قبل و بعد الغزو الامريكي
.الجزء الاول : مشهد انتظار لا ينتهي لهجوم حتمي
.الجزء الثاني : ما نجا و ما لم ينجو من وطن جريح
حين عاد عباس فاضل للعراق، قبيل اندلاع حرب 2003، أراد اكثر من اي شيء اخر ان يكون بجانب أسرته. هو خوف على ذويه من صراع دموي جديد قبل ان يكون إرادة توثيق لحظة فارقة، أنتجت سنوات لاحقا، شريطا وثائقيا استثنائيا عنوانه “وطن…العراق سنة صفر”.
يحكي المخرج قصة أسرته. ترصد الكاميرا بيئة معقدة ببساطة و عمق. مشاهد حياة يومية، دردشات الإخوة ، جلسات الشاي ، قهقهات امام التلفاز.. يحكي عباس فاضل تفاصيل الانتظار، انتظار حرب بعد حصار طويل. ينتهي الجزء الاول بمشاهد القصف الاولى. في قاعة العرض بسيول لم يعرف الجمهور من القصة تلك سوى هذا المشهد على الأرجح. انقضت اكثر من ساعتين لكن القصة لم تنتهي بعد.
نخرج شيئا فشيئا من المشهد الصغير للمشهد الأكبر، بغداد بعد الغزو، صور الفوضى، غضب العراقيين يلتقطها عباس فاضل الذي ترك بلده في سن 18، يلتقطها بشعرية وجمالية عالية. ابتسامة حيدر، شخصية الفيلم الرئيسية، لا تفارق مخيلة المشاهد حتى وان فارق حيدر الحياة في ربيعه الحادي عشر. 5 ساعات تنتصر خلالها الحياة على الحرب والموت و تتبدد معها 30 سنة من صور البروبغندا.
لم يستطع المخرج العراقي اخراج صور قريبه الصغير وتوضيبها الا عشر سنوات فيما بعد. في كوريا الجنوبية و اليابان و نيويورك و أمريكا اللاتينية وعشرات المهرجانات التي عرض فيها”وطن.. العراق سنة صفر” ترك الشريط وقعا عميقا. كتب عنه الكثير، فيلم مواساة، رواية جماعية، قصة يجب ان تحكى وتشاهد.. احسسته اكبر من محاولة كتابة فصل من فصول تاريخ العراق، ابداع اكبر من مجهود توثيق صرف. كأنه محاولة استعادة لحظات انقضت ولن تعود، عراق ما قبل الغزو، صوت حيدر، وكل تلك الأشياء التي افتقدها عباس فاضل في إقامته الفرنسية وأشياء اخرى استعادها خلال إنجاز هذا الوثائقي. حين سئل المخرج عن ما يمثله الشريط له قال ان “وطن…العراق سنة صفر” هو حياته.
اجل كل شيء ذاتي في تصوري، لا شيء موضوعي في الفيلم الوثائقي. أفضل استعارة وصف فريديريك وايزمان مخرج الأفلام الوثائقية الامريكي الشهير الذي استبدل مصطلح “موضوعي” “بعادل”. شريط عباس فاضل لا يعطي دروسا حول حرب 2003 بل يدع المشاهد يكتشف ما يريد من أفكار ومشاعر وصور. في ذلك قدر من العدالة و في ذاتية القصة قدر من العالمية تذوب معها الخلفية المحلية بتعقيداتها لتصبح إبداعا جماليا محضا.

المقال في موقع لكم


Le réalisateur Abbas Fahdel reçoit le Sesterce d'Or du meilleur long métrage au festival Visions Du Reel, à Nyon, en Suisse, le 24 avril 2015. المخرج عباس فاضل يستلم الجائزة الذهبية عن فئة الأفلام الطويلة في مهرجان رؤى الواقع في سويسرا 2015

المخرج عباس فاضل يستلم الجائزة الذهبية عن فئة الأفلام الطويلة في مهرجان رؤى الواقع في سويسرا 2015

بمنحه جائزة سيستيرس الذهبية في المسابقة الدولية للأفلام الطويلة للفيلم العراقي “وطن… العراق سنة صفر” للمخرج عبّاس فاضل، أسدل مهرجان السينما الواقعية بنيون يوم السبت 25 أبريل 2015 الستار على فعاليات دورته السادسة والأربعين التي كانت استثنائية على كل المستويات، وسجّلت خلالها السينما العربية حضورا لافتا وقويا

وبفضل الحضور القياسي الذي تجاوز هذا العام 35.000 مشاهد، والأعمال التي عرضت لأوّل مرّة على الساحة الدولية وفاقت 113 فيلما، يؤكّد هذا المهرجان “ريادته على الساحتيْن السويسرية والدولية”، وفقا لرئيسه كلود روياي

لقد لاقت الجودة الفنية التي ميّزت الأفلام المائة والستيَن المشاركة في دورة هذا العام الإشادة والتنويه من طرف النقاد وأعضاء لجان التحكيم على السواء. وأشار المدير الفنّي للمهرجان لوشانو باريزوناي إلى أنه “من بين 54 بلدا المشاركة في هذه الدورة، يوجد تمثيل للقارات الخمس في الأعمال الفائزة بجوائز مما يدلّ على حيوية الإنتاج السينمائي الوثائقي في جميع أنحاء العالم”

الحياة زمن الحروب

جائزة سيستيرس الذهبية للمسابقة الدولية للأفلام الطويلة والتي تموّلها مؤسسة البريد السويسري والبالغ قيمتها 20.000 فرنك كانت هذا العام من نصيب المخرج العراقي عبّاس فاضل لفيلمه “وطن… العراق سنة صفر“، وهو عمل قلّ نظيره يمتدّ عرضه على مدى ستّ ساعات كاملة، ويرصد حياة عائلة عراقية قبل الغزو الامريكي للعراق سنة 2003 وبعده

ويستغرب المدير الفنّي لمهرجان نيون، كيف أفلت هذا العمل السينمائي المتقن الحبكة والإخراج من رصد رادارات المهرجانات الدولية الأخرى، ويقول: “من بين 3700 عمل قمنا باستعراضه خلال السنة الجارية، كان هذا الفيلم، أوّل الأعمال التي شدّت انتباهي. وكان الفيلم الأوّل الذي وقع الإختيار عليه في عرضه الدولي الاوّل بمهرجان “الرؤى الواقعية”

ويضيف لوشانو باريزوناي متحدثا عن عمل المخرج فاضل عبّاس فيقول: “إنه فيلم مواساة، يحاول مداواة الجروح الغائرة، ويصلح أن يكون مرجعا لفهم ماضي منطقة الشرق الأوسط وحاضرها. وإضافة إلى أنه فيلم جيّد، هو فيلم ضروري. كان لابدّ أن ينجز، ولابد أن يُشاهد”

“الوطن.. العراق سنة صفر”

 في عمله السينمائي “الوطن… العراق سنة صفر”، الذي حاز على اشعاع عالمي، يروي المخرج عبّاس فاضل عاميْن من حياة أسرة في العراق قبل وبعد الغزو الأمريكي عام 2003

الفيلم الطويل جدا (ستّ ساعات بالتمام والكمال) يعرض مشاهد بسيطة ولكن متناهية الروعة والجمالية من الإيقاع اليومي لحياة هذه العائلة. أشقاء وشقيقات في علاقة حميمية يضحكون وهم يشاهدون شريطا هزليا لـ “مستر بين”، عبر شاشة التلفزيون. أعمام، وجيران، وأصدقاء، يشربون الشاي، ويقصّون القصص، ويتذكّرون حادثة مضحكة في المسجد، أو قصة الطبيبة التي تحلب عنزتها لإطعام طفلها

يستمر الهزل ويتواصل في حين تتدهور الأوضاع، وبين نهريْ دجلة والفرات، تمرّ أسراب الطيور لتعلن قدوم الأخطار. وتوضع الفرش لغلق النوافذ لرد الهجمات المحتملة. ويتمّ حفر آبار بالحدائق للوصول إلى المياه الجوفية استعدادا لإنقطاع مياه الشرب. ويقول أحد الأطفال مازحا: “أتمنّى ألا يلجأ الأمريكيون لإستعمال أسلحة الدمار الشامل”، وتبدأ المراوحة بين الفكاهة والخوف

لم يشاهد الجمهور الغربي من الحرب الامريكية على العراق سوى بعض الصور لشماريخ متعددة الألوان، ثمّ بعض المركبات المصفّحة تجوب الصحراء، وظلال أشخاص من بعيد. فيلم “الوطن…العراق سنة صفر”، هو إذن ردّ قوي على الدعاية الامريكية: سماواتٌ حبلى مثل ألف ليلة وليلة، وحدائق مورقة، وأشخاص هم أشقاء المخرج وشركاؤه في الإنسانية يغادرهم فجأة عندما يتوقّف تصوير الفيلم. ومثلما قال أحد أعضاء لجنة التحكيم هذا الفيلم لا يمكن إلا أن يفوز بجائزة

 أبريل 2015 سويس إنقو

لقرائة المقال بأكمله الرجاء الضغط هنا

swi_logo_medium_footer


 وطن (العراق سنة صفر)” يحصد الجائزة الذهبية لمهرجان رؤى الواقع بسويسرا”

نشر في  26 أفريل 2015
 

حصد فيلم “وطن.. العراق سنة صفر” للمخرج العراقي عباس فاضل الجائزة الذهبية للدورة 46 لمهرجان “رؤى الواقع” للسينما الوثائقية وذلك بمدينة نيون السويسرية.

فيلم “وطن.. العراق سنة صفر” من النوع الوثائقي يدوم خمس ساعات ونصف ويتناول الحياة اليومية في العراق قبل وبعد الإحتلال الأميريكي سنة 2003.

logo4


1473028_1613129615571473_1303607933591970601_n

11181206_1613129495571485_5310942543653962618_n

L’AUBE DU MONDE 

L'AUBE DU MONDE

REVUE DE PRESSE / PRESS REVIEWS

Télérama :
« L’Aube du monde est une vraie surprise. Un film qui semble venir de loin, signé par Abbas Fahdel, un réalisateur né en Irak, qui a fait ses études en France et qui a déjà réalisé deux documentaires. Il a aussi été critique avant de devenir cinéaste et cela se voit : il cadre avec soin, varie les points de vue, procède par métaphores. Sa fable moderne décrit le sort malheureux des Arabes du marais, mais puise aussi dans la mythologie. La guerre, la malédiction, les traditions sont, ici, autant de barrages qui empêchent Riad d’être fidèle à sa promesse. Servi par une photographie splendide, le film emprunte des détours sinueux, oscille entre espoir et désolation, et s’approche de la fantasmagorie. Jusqu’à finir par la vision hallucinante d’une cohorte de survivants hagards et abandonnés, possible tableau d’un lendemain d’apocalypse. »

Libération :
« L’Irak sous un jour nouveau. Un premier film sensible.

Un arbre solitaire, au milieu d’un marais sur lequel se lève le soleil, s’écroule soudain dans un craquement sourd. Comme une métaphore du film dans son intégralité, la première image de l’Aube du monde annonce toutes celles qui suivront. Le jardin d’Eden existerait-il donc ? Plus exactement, il existait encore il y a peu. D’origine irakienne, Abbas Fahdel choisit de faire de la région des marais situés à la frontière de l’Iran et de l’Irak, entre le Tigre et l’Euphrate, le théâtre de sa première fiction, et de rendre hommage à un peuple aujourd’hui disparu : la tribu des Maadans, aussi appelés Arabes des marais. Victimes, dans l’indifférence générale, des affrontements secouant le secteur depuis presque un quart de siècle, ils auront vu l’étang qui abritait leurs embarcations regroupées en minuscules villages bombardé, asséché par Saddam Hussein et sa destruction achevée par la Guerre du Golfe.
Zahra est donc une fille des marais, promise à son cousin Mastour : d’enfant, nous la verrons grandir sous les traits de Hafsia Herzi, éblouissante Rym de la Graine et le Mulet de Kechiche. Et devenir femme au jour du départ de son jeune mari au combat, réquisitionné par l’armée irakienne pour combattre le Mal américain. Elle le sent, elle lui dit : il ne reviendra pas. Le supplie de déserter. Avant de partir pour toujours, Mastour prend soin de demander à Riad, soldat badgadi rencontré sur le front, de veiller sur Zahra. Ce dernier accédera à la dernière volonté de son ami à tout prix. Et, malgré le mépris qu’à Bagdad on lui a toujours inculqué pour cette tribu «arriérée», s’apprête à toutes deux les épouser. Dans un village déserté, le film les abandonne à leur sort après un orage de fin du monde, tels Adam et Eve au matin originel.
Loin de l’exotisme ou du folklore, la musique composée par l’Allemand Jürgen Knieper, compositeur fétiche de Wim Wenders, achève de faire de l’Aube du monde une expérience sensorielle. Fahdel lève avec cette histoire d’amour postapocalyptique le voile sur un territoire inconnu mais déjà disparu, effacé par la brutalité du monde moderne. »

L’Humanité :
«Une œuvre sensible, qui conjugue splendeur visuelle et émotion.»

Cinema.evous :
« L’Aube du monde est un film magnifique et poignant accumulant des scènes inoubliables. L’un des plus beaux films de 2009 assurément. »

Le Courrier de l’Atlas :
« D’une ambition plastique impressionnante, ce long-métrage d’une grande poésie laisse chaque geste, chaque parole, chaque plan, chaque morceau musical faire sens.»

aVoir-aLire :
« L’Aube du monde est une œuvre à la beauté formelle souvent époustouflante.»

Ecran Noir :
« Tout ce qui est explicatif est relégué hors champ. Par contre, un arbre qui tombe, un avion qui s’embourbe lentement, une barque qui flotte, viennent ponctuer un récit composé d’ambiance et de silence plutôt que de rebondissements spectaculaires. Au spectateur d’être capable de voir et surtout de ressentir ce que ce subtil “paratexte” véhicule comme intentions: hommage à un peuple, chronique d’une époque révolue, dénonciation de l’intolérance… Un premier long métrage envoûtant.»

DVDrama :
« L’Aube du monde est habité de cinéma, il foisonne et peut se targuer de véritables et légitimes ambitions.»

CinéMovie :
“Autant d’images qui impriment la rétine durablement : symboliques, dépouillées, elles s’accordent aux dialogues peu nombreux, à la densité rugueuse des situations, à la beauté farouche du site.»

Critikat :
« La force du film réside surtout dans sa symbolique magnifiée par la belle composition des plans à l’aspect onirique et rêvé (la photographie relève d’une intéressante poésie crépusculaire). L’environnement naturel est filmé dans un style tarkovskien avec des séquences qui insistent sur la puissance de l’élément eau. Inspiré par le cinéma de la modernité, Fahdel use également de plans à la Ozu, sorte de blocs de temps en forme d’interludes, qui permettent de souligner le caractère calme et rêvé de lieux naturels considérés comme le jardin d’Eden. »

Paris-Match :
« Abbas Fahdel a réussi à faire d’un thème sordide – le génocide des Maadans par Saddam Hussein – un film tout en poésie.»

ELLE :
« C’est un genre de film de guerre où les coups de feu sont rares et silencieux. Cela peut évoquer “L’Odyssée”, les embûches et le temps qu’il faut pour retrouver sa terre après la guerre, du point de vue de celles qui attendent. Les plans sont longs et fixes, mais ils pourraient être encore plus longs et fixes, on ne s’ennuierait pas.»

L’Union L’Ardennais :
“Un premier film lumineux… Un film utile servi par une magnifique photographie.”

Ouest France:
“Du cinéma épuré et dépouillé comme un drame à l’antique fourbi par le destin et la fatalité, dans une région qui n’a que la guerre pour horizon.”

Télé Câble Sat Hebdo:
“Une vraie surprise que ce film, avec une magnifique Hafsia Herzi. Il bénéficie d’une image et d’un cadre extraordinaires et très maîtrisés. A découvrir de toute urgence.”

La Revue des Ressources.org:
“En un lieu comme hors du temps, la tragédie de l’Histoire fait son apparition. Abbas Fahdel nous offre un film émouvant à la photographie splendide. Un vrai petit bijou.”

L’Heure de la Sortie.com:
“Des visages superbes, des paysages sublimes. On est subjugé par tant d’audaces esthétiques, quand le propos stigmatise la barbarie des hommes… Mais c’est la vie qui va triompher… c’est la grâce…”

Selection DVD.blogspot.com:
“Un film rare, à découvrir.”

Danactu-Resistance:
“Cette première oeuvre de fiction est totalement réussie. A la seconde vision, le film fonctionne toujours aussi bien et l’émotion demeure intacte, signe des films qui, sans doute, vieillirons biens.”

France-Soir:
“L’Aube du monde vaut pour un traitement inédit du conflit irakien. Jamais la guerre du Golf n’avait été montrée ainsi, du point de vue des habitants des campagnes les plus reculées (…) Hafsia Herzi tient le rôle de Zahra. Entre force et fragilité, elle incarne cette jeune fille veuve à 16 ans, tragiquement belle.”

Pariscope:
“A travers l’histoire d’amour d’une fille des marais et d’un citadin qui transgresse les conventions sociales, l’hommage à un peuple oublié.”

Il était une fois le cinéma:
“Une oeuvre à la limite de la science fiction dans son esprit post-apocalyptique, le premier long métrage de Abbas Fahdel pourrait se résumer en un mot: universalisme.”

Direct Matin:
“Avec L’Aube du monde, Abbas Fahdel dévoile la précarité des tribus Maadans. La beauté des paysages et la lumineuse Hafsia Herzi font souffler une brise de légèreté sur ce film intense.”

Figaro Scope:
“L’absurdité de cette guerre invisible, tout en absence, vue du côté irakien.”
A nous Paris:
“Incursion chez les “Arabes des marais”, dont le rythme de vie, quasi primitif, calé sur le rythme lent du fleuve, colle à celui du film, L’Aube du monde est une oeuvre pour le moins surprenante, montrant d’une manière à la fois poétique et très singulière les stigmates de la guerre sur cette population d’exclus.”

Gala:
“Le réalisateur a pris le parti de la poésie pour dire l’horreur.”

The National:
“Dawn of the World has received much critical acclaim, and with good reason. The director and writer Abbas Fahdel has lovingly rendered a little-known corner of Iraq, and succeeds in conveying the ravages of war with almost no recourse to violence. The storyline is elegant in its simplicity, with only a handful of characters moving composedly through the most appalling situations. The deep quiet of the film, wrought through sparse dialogue and music, sharpens one arresting image after another – of soldiers trudging through a desert of half-buried corpses, of the wrecked body of a bomb in the still marsh waters…”

Prix  

Le réalisateur de L’AUBE DU MONDE parle de son film

L’action de L’AUBE DU MONDE se déroule dans les marécages du delta du Tigre et de l’Euphrate, au sud de l’Irak. Pouvez-vous nous parler de la spécificité de cette région?
– Cette région, située à cheval sur la frontière avec l’Iran, est réputée pour être le pays du mythique Jardin d’Eden. C’est là que vivent les tribus des Maadans, appelés aussi les Arabes des marais. C’est là aussi que se sont réfugiés les vaincus des batailles qui ont marqué l’histoire de l’Irak, et plus récemment les déserteurs de la guerre Iran-Irak et les survivants de l’insurrection de 1991 contre Saddam Hussein. Pour faire disparaitre de la carte ce sanctuaire difficile à contrôler, Saddam Hussein avait ordonné d’assécher les marais, provoquant un désastre écologique et humain majeur.

Pourquoi avoir choisi de vous intéresser en particulier au sort des Arabes des marais ?
– Parce que justement leur sort n’intéresse pas grand monde. Quand Saddam Hussein a lancé sa compagne d’extermination à leur encontre, personne ou presque s’en est ému, pas plus en Irak qu’à l’étranger.

Comment expliquer cette indifférence ?
– L’indifférence des non-Irakiens peut s’expliquer par le fait qu’ils ignorent l’existence même des Arabes des Marais. Pour ce qui est des Irakiens, beaucoup d’entre eux méprisent les habitants des marais au point d’utiliser le mot “maadan” comme une insulte synonyme d’arriéré, sauvage. Saddam Hussein lui-même les considérait avec mépris, allant jusqu’à les qualifier publiquement de menteurs et de voleurs sans morale. En fait, l’extrême pauvreté des Maadans et leur mode de vie primitif, inchangé depuis des siècles leur ont valu d’être placés au plus bas de l’échelle sociale en Irak.

Une histoire d’amour comme celle racontée dans le film, entre une fille des marais et un citadin de Bagdad, ne peut donc être fréquente ?
– Elle ne peut être fréquente dans la mesure qu’elle transgresse les conventions sociales. Les deux amoureux du film en sont d’ailleurs conscients et l’évoquent franchement.

Quelle est la situation actuelle des Arabes des marais ?
– Après la chute de Saddam Hussein, quelques dizaine de milliers d’entre eux, qui avaient fui en Iran, étaient revenus dans les marais. Ils ont même fait sauter à la dynamite les barrages dans l’espoir de ramener l’eau et donc la vie dans leurs marais asséchés. Mais je crains que leur culture ne soit définitivement condamnée. En exil, leurs enfants ont découvert l’électricité, la télévision, le téléphone portable et autres gadgets de la civilisation urbaine, et je les vois mal s’adapter au mode de vie primitif dans les marais. En fait Saddam Hussein et la guerre n’ont fait qu’accélérer un processus commencé avec la découverte du pétrole dans la région. Il y a un peu plus d’un demi-siècle, quand l’explorateur et ethnologue anglais Wilfred Thesiger était venu vivre parmi les Arabes des Marais, il avait pressenti la fin de leur civilisation. Pendant la préparation du film, j’avais en tête les écrits de Thesiger et un poème écrit à la même époque par le poète irakien Saadi Youssef, dans lequel il lançait:

“Crie-leur à propos de notre peuple

oublié dans le silence des eaux.

Inscris tes cris sur les fronts,

une marque de feu qui s’effacera,

lorsque la vie frémira dans notre peuple

oublié dans le silence des eaux.”

Il est troublant aujourd’hui de constater que le cri du poète n’a pas été entendu et que les Arabes des marais sont plus que jamais oubliés, oubliés dans le silence des eaux et, pour beaucoup, dans le silence des charniers collectifs légués par Saddam.

 Vous n’avez pas tourné le film sur le lieu de l’action, en Irak, mais en Egypte. Est-ce pour des raisons de sécurité ?
– Amener une équipe de tournage dans le sud de l’Irak n’était pas envisageable à cause de la situation que vous connaissez. Mais ce n’est pas la seule raison du choix de tourner ailleurs. Le film décrit les marais du sud de l’Irak tels qu’ils étaient avant que Saddam Hussein ne décide de les assécher. J’ai fait des repérages du côté iranien des marais, et même là on voit les conséquences des “travaux” des ingénieurs de Saddam Hussein. La surface des eaux a beaucoup rétrécit et les parties intactes sont interdites d’accès par l’armée iranienne sous prétexte qu’elles sont encore minées (depuis la guerre Iran-Irak). Vu l’impossibilité de tourner en Irak et la difficulté de tourner en Iran, je me suis mis à chercher ailleurs et fini par choisir de tourner en Egypte, dans le lac Manzala, près de Port-Saïd.

Où vous avez fait construire un village irakien.
– Nous avons commencé par construire une île artificielle, sur lequel nous avons bâti le village. Il a fallu aussi construire une flottille de petites embarcations irakiennes dont l’équivalent n’existe pas en Egypte.

Il y a aussi cet avion à moitié englouti dans la baie du village et dont on ne sait s’il est irakien ou américain !
– Cet avion ne correspond à aucun modèle existant. J’avais demandé au chef-décorateur de concevoir un objet à la Miyazaki, c’est-à-dire un objet plus poétique que réaliste. Idem pour la cellule de prison dans laquelle le héros du film se trouve enfermé et que nous avons construite dans la cour d’un immeuble, au Caire

 Le film est dialogué en irakien, or la plupart des acteurs ne sont pas irakiens. Quelle difficulté cela a-t-il représenté ?
– Il y avait trois coachs irakiens qui travaillaient en permanence avec les acteurs. Ceux-ci devaient apprendre à parler l’irakien parfaitement. C’était indispensable pour la crédibilité du film. Cela dit, comme je ne suis pas friand de films bavards, je n’ai gardé que les dialogues qui me semblait absolument nécessaire pour la compréhension de l’histoire.

L’un des personnages du film s’appelle Hadji Noh, autrement dit pèlerin Noé. On est tenté d’y voir une référence au patriarche biblique, d’autant que le personnage lui-même qualifie l’établissement dans lequel il vit et travaille d’arche de Noé ?
– Le vieux sage Hadji Noh évoque effectivement le patriarche Noé, personnage né en Mésopotamie bien avant la Bible, puisqu’on le trouve mentionné pour la première fois dans le Poème du Supersage, qui date du XVIIIe siècle av. J.-C.

Riad et Zahra, les deux protagonistes survivants dans les vestiges dévastés du Paradis terrestre d’antan, pourraient eux aussi évoquer des figures mythiques. Adam et Eve pour être précis.
– C’est une référence à laquelle j’ai aussi pensé. Riad et Zahra ce sont les Adam et Eve d’un monde post-apocalyptique; et l’on peut penser que la survie de l’humanité, du moins dans les marais, dépendra et de leur survie et de leur amour.

Le thème de la survie semble vous obséder. Vous l’abordiez déjà dans votre documentaire Retour à Babylone, dans lequel vous confessiez être ” hanté par ce sentiment de culpabilité propre aux survivants”.
– J’appartiens à une génération de survivants. Les guerres successives m’ont enlevés beaucoup d’amis et de proches. Faire des films c’est une manière de leur redonner vie. L’Aube du monde, je l’ai écrit en partie en pensant à un ami d’enfance nommé Riad, comme le héros du film, qui avait été porté disparu durant la guerre avec l’Iran.

Vous êtes titulaire d’un doctorat en cinématographie, vous avez aussi exercé le métier de critique de cinéma; en quoi l’approche théorique du cinéma a-t-elle aidé ou influencé votre travail de cinéaste ?
– L’approche théorique forge le goût et apprend à se poser la question du « point de vue », considérée tant sous l’angle éthique qu’esthétique. Pendant le tournage de L’AUBE DU MONDE, j’avais sur moi une copie du découpage illustrée par des photos tirées des films de Mizoguchi, Tarkovski, Bergman et quelques autres réalisateurs dont l’œuvre exprime une idée du monde en même temps qu’une idée du cinéma. Je me servais de ces photos comme références et elles ont facilité mon dialogue avec le chef opérateur et le chef-décorateur.

Vous utilisez beaucoup le plan-séquence. 
– Le plan-séquence permet de préserver l’intensité et la respiration propre à chaque scène. En plus, il aide les acteurs à développer leur jeu en restant dans la note juste.

Vous tournez aussi en plan fixe, et quand la caméra bouge, c’est de manière presque imperceptible.
– Je n’ai utilisé les mouvements de caméra qu’en cas de nécessité, pour suivre le mouvement d’un personnage par exemple ou pour recadrer l’image sans recourir à l’artifice du découpage. Il faut filmer simple et éviter de faire le malin avec la caméra.

Pouvez-vous nous parler de la musique et du choix du compositeur allemand Jürgen Knieper ?
– Je connaissais et admirait le travail de Jürgen Knieper pour Wim Wenders. Aussi quand il fut question de choisir un compositeur allemand (pour des raisons de coproduction), j’ai tout de suite songé à lui. Dès notre première rencontre, nous nous sommes mis d’accord sur le fait que la musique du film ne doit être ni folklorique ni exotique. L’AUBE DU MONDE a été conçu comme une expérience sensorielle, ce à quoi devait participer la musique.
Il y a aussi deux chansons en arabe.
– Elles sont composées et chantées par la palestinienne Rim Banna, artiste engagée et une des plus belles voix arabes actuelles.
Le premier plan du film présente un arbre solitaire qui tombe soudain avec un craquement sourd. Comment interpréter ce plan ?
– Ce plan est une métaphore. Il résume et contient tout le film. Cet arbre qui tombe, c’est l’annonce des horreurs qui vont transformer le jardin d’Eden en enfer.

Dans le dernier plan du film, la caméra s’élève et quitte les protagonistes survivants pour dévoiler l’étendu de la désolation aux alentours…
– Le dernier plan est l’écho amplifié du premier. L’horreur encore mystérieux du premier plan est devenu concret. Au bout d’une heure et demie de film, nous savons la nature de cette horreur et sa cause.

Sa cause, selon le film, c’est aussi bien Saddam Hussein que les Américains.
– Oui, l’appétit de puissance de l’un et le pouvoir de frapper des autres. Cela dit, L’AUBE DU MONDE n’est ni un film politique ni un film de guerre. La guerre y est certes omniprésente, mais elle est moins montrée que suggérée par ses ondes de choc qui se propagent jusqu’aux coins les plus reculés du pays.
Les dernières séquences montrent un monde dévasté, dépeuplé après le cataclysme, avec juste quelques survivants qui ont des allures de morts-vivants. Cela apparente presque le film au “post-apocalyptique”, sous-genre de la science-fiction.
– Le post-apocalyptique dépeint généralement les conséquences d’un cataclysme plutôt que le cataclysme lui-même. C’est ce que j’ai essayé de faire dans L’AUBE DU MONDE.
Autre point de rapprochement: l’évocation de la destruction d’une civilisation et l’émergence du chaos.
– Avec cette différence que le post-apocalyptique emprunte beaucoup au fantastique, alors que moi je reste près de la réalité historique et géographique. Le cataclysme que je décris a bel et bien eu lieu.

Vous empruntez quand même au fantastique dans la scène de l’apparition du fantôme de Mastour.
– C’est plus un emprunt poétique, à la Mizoguchi. J’appréhendais beaucoup cette scène avant de la tourner. Comment filmer un fantôme sans tomber dans le grotesque ?

Pour le mot de la fin, si L’AUBE DU MONDE devait exprimer une ambition, ce serait laquelle ?
– Ce serait celle exprimée par la formule de Dostoïevski: ” La beauté sauvera le monde “, et par la réflexion d’Emily Dickinson: “La nature est une maison hantée; l’art, une maison qui essaie de l’être”. L’AUBE DU MONDE ambitionne d’être un film hanté par le mystère et la beauté dissimulés derrière les horreurs qui forment la trame du monde réel.

________________________________________________________________________

L’Aube du monde : paradis et damnation

Par Morgan Le Moullac
Drame poétique et réaliste sur la disparition d’un village de paysans irakiens due à l’acharnement de l’armée de Saddam Hussein, l’Aube du monde est un film magnifique et poignant accumulant des scènes inoubliables. L’un des plus beaux films de 2009 assurément.
A l’heure où ces lignes sont écrites, le festival de Cannes bat son plein et les critiques s’escriment à prouver que Lars Von Trier, Almodovar, Tarentino et consort renouvellent toujours leur cinéma, les distributeurs, eux, déroulent et continuent à sortir des film hors festival dans une relative confidentialité, presque comme un désaveu…
L’Aube du monde de Abbas Fahdel est l’un de ces petits films qui n’ont pas à rougir de leur éloignement de la Croisette. L’histoire débute en Irak, en 1983. Mastour (Waleed Abou El Magd) et Zahra (Hafsia Herzi, superbe et juste de bout en bout) sont deux jeunes enfants appartenant aux Maadans, une tribu de paysans habitant les marais. Pendant que les hommes du village disparaissent un à un, réquisitionnés par l’armée Irakienne dans son combat contre l’Iran, Mastour fait la promesse de ne jamais quitter sa mère et sa future femme, Zahra. Sept ans plus tard, les canons irakiens sont pointés vers les Etats-Unis. Alors que leur mariage n’est pas encore consommé, Mastour est contraint de partir à la guerre. Il n’en reviendra pas. Riad (Karim Saleh), son compagnon d’infortune chargé par Mastour de prendre sa place au sein du village et dans le cœur de Zahra reviendra à sa place et assistera, impuissant, à la destruction progressive d’une peuplade centenaire, par la force des armes et d’un mépris inhumain.

Pour son premier film, Abbas Fahdel frappe fort. Sa caméra est comme la plume d’un poète désenchanté cueillant la beauté avant qu’elle ne se fasse faucher. Nombre de scènes sont à la lisière du poétique et du fantastique, telles ces déambulations superbes dans le delta du Tigre et de l’Euphrate (emplacement supposé du jardin d’Eden), ou cette déambulation effrayante de Mastour et Riad, perdus dans le désert et suivant tels des zombies un sentier bordé de cadavres à moitié ensevelis sous le sable. Dans l’Aube du monde, tout est condamné à disparaître, à commencer par ce magnifique village de paysans monté sur pilotis qu’habitent encore à la sueur de leur front quelques irréductibles tels Zahra ou Hadji Noh, l’homme à tout faire de la région, qui tentent de résister à la famine et au dédain meurtrier d’un Saddam Hussein dont le portrait, fixé dans la cahute du chef du village par les autorités militaires, semble faire la nique à celui de Mastour, le fils et le mari regretté, qui, lui, chute sans raison.
Tout est au diapason dans ce film, à commencer par les dialogues, simples, sans un mot de trop, intenses, la photographie magnifique de Gille Porte ou encore la musique minimaliste mais envoûtante de Jürgen Knieper. Les costumes et les décors de Hussein Baydoun achèvent d’installer cette atmosphère poétique et réaliste propre au film, et propice au développement de l’un de ses thèmes principaux, à savoir le morcellement des corps, des familles et des peuples qu’induit la guerre. Par petites touches, Abbas Fahdel montre des corps réduits à une seule partie de leur anatomie, des familles décimées et le village de Zahra se déliter peu à peu jusqu’à n’être habité que par deux veuves sombrant dans la folie.
L’Aube du monde est alors un réquisitoire magnifique et désolant contre la guerre : l’aube d’un jour nouveau fait toujours suite au crépuscule d’un jour mort.

L’Aube du monde

- Sortie le 27 mai 2009
- Drame, Allemagne, France, 1h36, 2007
- Ecrit et réalisé par Abbas Fahdel
- Produit par Pascal Verroust, Olivier Damian, Ahmed El Attar
- Photographie de Gille Porte
- Musique de Jürgen Knieper
- Montage de Sylvie Gadmer
- Décors de Hussein Baydoun
- Avec : Karim Saleh, Hafsia Herzi, Hiam Abbass, Waleed Abou El Magd, Sayed Ragab, Mahmoud Nagui, Mohamed Ali Keshta, Nabil El Deeb, Mina Soheil, Amr Ossama

http://www.evous.fr/cinema/L-Aube-du-monde-paradis-et,1541.html

________________________________________________________________ 

 L’Aube du Monde ou L’art du Politique

Par Jean-Baptiste Guégan
l_aube_du_monde_haut
 
Il est des films que l’on attend et d’autres qui surprennent. Certains étonnent par le talent de leurs metteurs en scène et d’autres séduisent plus simplement par l’audace de leurs intentions ou le jeu tout en subtilité de leurs acteurs. L’Aube du monde est assurément de cette seconde catégorie, celle des films discrets qui laissent transparaître plus que des promesses au travers de leurs faiblesses et de l’histoire qu’ils nous content.
 

Raconter et oser
« Les marais, cette région située à cheval sur la frontière avec l’Iran, est réputée pour être le pays du mythique Jardin d’Eden. […] C’est là que vivent les Arabes des marais et que se sont réfugiés les vaincus des batailles qui ont marqué l’histoire de l’Irak, et plus récemment les déserteurs de la guerre Iran – Irak et les survivants de l’insurrection de 1991 contre Saddam Hussein. Pour faire disparaître de la carte ce sanctuaire difficile à contrôler, ce dernier avait donc ordonné d’assécher les marais où vivent les tribus des Maadans, provoquant un désastre écologique et humain majeur. » Abbas Fahdel
Tout en pudeur, L’Aube du monde se donne en effet pour objectif de raconter l’une des pages les plus sordides des années durant lesquelles Saddam Hussein a exercé son sinistre gouvernement, la persécution des Maadans, les arabes des marais. Habitant les zones marécageuses se situant aux confluences entre le Tigre et l’Euphrate dans le sud irakien, ces hommes et ces femmes étaient devenus aux yeux du dictateur, l’incarnation d’une opposition potentielle et surtout l’un des endroits du territoire où sa main de fer ne trouvait que peu de prise. Lieu où les fuyards, les opposants et les déserteurs de la première Guerre du Golfe se rendirent, ces marais incarnaient assurément l’un des endroits avec le Kurdistan qu’il fallait reprendre et contrôler. Au risque de mater pareille situation par les armes et dans le sang.

Or, c’est justement ce que le sanguinaire despote se décida à faire, à savoir user de la plus insupportable violence pour s’assurer de la « fidélité » d’une région dont les habitants sont depuis des décennies, la risée des Bagdadiens. Ainsi, à l’instar des exactions et de la violence sans pitié qu’illustre L’Aube du monde, ce dernier conduisit ses troupes et ses ingénieurs à l’une des opérations les plus contestables qui soient : détruire progressivement l’espace marécageux en l’asséchant. Avec pour ambition d’en faire partir ceux qui depuis des années, s’y étaient installés ou plus encore, ceux qui y trouvèrent un refuge aussi salvateur qu’inhospitalier.
Récit d’une éradication qui aura pour pendant les massacres qui ensanglantèrent le Kurdistan à la fin des années 1980, L’Aube du monde se donne ainsi pour programme de raconter les atrocités commises et impulsées par le chef du Parti Baas. Comme Whisper in the wind, récemment projeté et récompensé à Cannes dans le cadre de la Semaine Internationale de la critique, le premier film d’Abbas Fahdel nous narre au travers de personnages archétypiques et engageants, les sombres heures de ces lieux qui concentrèrent les foudres du pouvoir irakien. Aussi poétique que frontale, l’œuvre de ce dernier a donc le mérite premier de nous confronter à l’une des plus tortueuses et meurtrières périodes du régime irakien, celui de l’intolérance et d’une répression sans merci.

Toucher et dénoncer
« C’est justement parce que leur sort n’intéresse pas grand-monde que Saddam Hussein a pu procéder sans gêne. En effet, quand ce dernier a lancé sa compagne d’extermination à leur encontre, personne ou presque s’en est ému, pas plus en Irak qu’à l’étranger. L’indifférence des non-Irakiens peut s’expliquer par le fait qu’ils ignorent l’existence même des Arabes des Marais. Pour ce qui est des Irakiens, beaucoup d’entre eux méprisent les habitants des marais au point d’utiliser le mot “maadan” comme une insulte synonyme d’arriéré, de sauvage. […] En fait, l’extrême pauvreté des Maadans et leur mode de vie primitif, inchangé depuis des siècles, leur ont valu d’être placés au plus bas de l’échelle sociale en Irak et d’être ainsi persécutés et exterminés… » Abbas Fahdel
Et force est de constater dans le cas de L’Aube du monde que la puissance du cinéma opère à plein malgré des faiblesses rythmiques ou narratives. Car le film a ce pouvoir de montrer et surtout de recréer l’horreur de situations qui nous parlent immédiatement. Sans filtre ni biais. Dans toute la sécheresse sanglante de la situation et avec une humanité aussi compatissante que révoltée ! Ainsi, comme d’autres films avant lui lorsqu’ils dénoncèrent les purges soviétiques, les persécutions nazies et les exactions de tant de régimes totalitaires, L’Aube du monde ouvre malgré de vraies défaillances, une page de l’histoire irakienne souffrant d’une béance insupportable.

Réhabilitant le sort de ces populations pourchassées et occupées, il offre sous les traits des immenses Hiam Abbas et Hafsia Hersi, l’occasion d’une vraie prise de conscience, celle d’une folie exercée au nom d’un pouvoir autocratique et salement autoritaire. Celle d’une intolérable abjection. Et quand on sait de surcroît que le déroulement de cette histoire prend pour cadre premier, une déchirante histoire d’amour avant d’être relayée par la suite par l’irrésistible attraction d’un Bagdadien pour une Maadan, on ne peut que saisir la portée éminemment politique d’un tel film. Certes, décevant dans sa forme et sa construction, il n’en porte pas moins au-delà de ses seules apparences, l’envie citoyenne de montrer que l’on peut dépasser la violence, l’injustice et les différences. Et tout autant,L’Aube du monde avec la poésie qui limbe certains plans, ose-t-il une audace que l’on aimerait plus évidente encore, celle d’un engagement envers les êtres et leur mémoire qui dépasse de loin toute oppression.

_______________________________________________________________ 

 

 L’AUBE DU MONDE d’Abbas Fahdel
Par Larissa Clement-Belhacel

 Abbas Fahdel a présenté L’Aube du monde  à Vesoul, en première européenne. Nous avons pu le rencontrer au cours du festival, pour lui poser quelques questions sur son travail, auxquelles il a répondu en langue arabe(arabe moderne et dialecte irakien). Son film a obtenu le Prix du Public, ainsi que le Prix du Jury NETPAC.

Ce qui frappe d’abord dans “L’Aube du monde“, c’est le cadre de vie des Maadans. L’explorateur Wilfried Thesiger, qui a vécu parmi eux, leur a consacré un livre, intitulé “Les Arabes des marais“. Ils vivaient dans le Shatt-el-Arab, au sud de l’Irak, entre le Tigre et l’Euphrate, à proximité de la frontière iranienne. Les habitants de cette région de lacs, d’îles et de roseaux pratiquaient la pêche, la chasse et l’élevage. Ils subsistaient dans des conditions difficiles, utilisant des savoirs-faire ancestraux, qui remontaient parfois à l’époque sumérienne. Abbas Fahdel a choisi de tourner son film en Egypte, après qu’un tournage en Iran, où on trouve aussi ces zones de marais, ait été envisagé, puis abandonné. Il s’est aidé de photos, de repérages faits en Irak, afin de reconstituer la région telle qu’elle pouvait exister il y a trente ans. Les marais ont en effet souffert des guerres successives, de la construction de barrages (en Turquie) et ont surtout été asséchés par Saddam Hussein. Celui-ci ne tolérait pas que cette région soit un lieu de refuge pour les déserteurs de son armée pendant la guerre Iran-Irak, ni un repaire pour les survivants de l’insurrection de 1991 (parmi lesquels des Kurdes). Dans le film, on a un aperçu de cette politique, avec des militaires qui poursuivent les déserteurs, et qui tuent d’autres habitants, censés les cacher. La population des Maadans est passée de 250 000 à 10 000 habitants aujourd’hui. La plupart ont émigré en Iran, ce dont le film se fait également l’écho, à la fin, quand le petit garçon “qui a des poils là où il faut” dit qu’il a choisi de revenir, plutôt que de partir avec les autres. Aujourd’hui, certains Maadans sont rentrés en Irak. Ils vivent à Bagdad (parfois dans des bidonvilles), plutôt que dans une zone à l’équilibre écologique désormais très fragile. Ce qu’on voit dans le film n’existe plus. Les plans de cette région “réinventée” pour le film sont souvent très beaux. Les levers de soleil et les paysages lacustres sont splendides. Les personnages des Maadans sont souvent montrés au travail, ce qui donne une impression de vie, ainsi qu’un certain ancrage “documentaire” au film.
L’intrigue du film est simple, presque ténue. Elle est résumée sur le site du film : “Rescapé de la guerre du Golfe, un soldat irakien se réfugie dans la région des grands marais du delta du Tigre et de l’Euphrate, où il rêve de recommencer une nouvelle existence aux côtés de la jeune veuve d’un camarade mort à la guerre…” Le personnage de Riad, interprété par Karim Saleh est celui du rescapé. Ce n’est pas le personnage principal au début du film. Il apparaît pour la première fois dans une longue scène où il marche aux côtés de Mastour, dans le désert, au milieu de cadavres à moitié ensevelis par le sable. Cette séquence est très forte. On peut penser à d’autres images, certes assez éloignées du contexte des guerres en Irak, mais qui ont une même puissance évocatrice, comme celle des chevaux pris par la glace après une bataille dans “Kaputt” de Curzio Malaparte, ou bien celle des deux jeunes gens, dont un seul survivra, perdus dans un désert de sel dans “Gerry” de Gus Van Sant. Soudain, on entend une déflagration. Mastour a sauté sur une mine, et gît, encore conscient. Son pied, emporté par la fumée de l’explosion, est mis en évidence, au premier plan. Il est mortellement touché, et n’a que le temps de se confier à son ami : il souhaite que Riad épouse Zahra, pour la protéger.
Riad est un survivant. Il continue à vivre, alors que les autres meurent, et ce tout au long du film. J’ai pensé à un de ces héros de westerns, étranges, solitaires et tenaces, qui échappent à tous les dangers, et à la mort qui rode partout où ils vont. La rencontre de Riad avec un soldat américain dans le désert est à ce titre intéressante. Elle fonctionne grâce à des signes que nous reconnaissons (bruits, uniformes, contexte de la guerre…) ainsi que sur la surprise. On entend le son crachotant d’une radio. Puis on voit, d’abord en partie, ensuite en totalité, un soldat afro-américain, titubant, une vieille radio autour du cou. Il passe devant Riad, on ne sait ce qui va se passer, il le dépasse, et s’écroule, mort. On peut croire un instant qu’il va y avoir un affrontement entre eux, un vainqueur et un vaincu. Pourtant, dans cette rencontre, on ne retrouve pas les rapports de force de la guerre. Ce ne sont peut-être plus que des individus qui luttent pour leur survie, en deça de leurs appartenances. Abbas Fahdel ajoute ceci dans une interview au journal algérien El Watan: “Dans la guerre d’Irak, il n’y a pas de vainqueurs. Il n’y a que des vaincus. Même si les Américains ont envahi l’Irak, ils sont vaincus. Ils sont morts, pas de gloire; même matériellement, ils n’ont pas gagné. Peut être qu’ils profitent du pétrole. Mais ils perdent plus qu’ils n’en gagnent. Les peuples qui connaissent la guerre, après ils ont envie de paix, en fait.”
La guerre est en arrière-plan dans le film, même si elle empêche de vivre une vie “normale”. Chaque personnage réagit différemment : Mastour s’engage, un autre déserte, Zahra a le pressentiment que Mastour ne reviendra pas. Il est d’autant plus compliqué pour un individu de se positionner que le pays est plongé dans une multitude de situations conflictuelles : la Guerre du Golfe et l’invasion américaine, mais aussi la répression que mène Saddam Hussein. Il y a dans une moindre mesure la difficulté pour Riad, qui vient de la ville, de se faire accepter par les Maadans lorsqu’il se rend dans les marais, une première fois pour anoncer la mort de Mastour, une seconde fois pour demander Zahra en mariage. Riad reste un étranger, par rapport aux difficultés et aux coutumes des hommes des marais : “as-tu déjà eu faim?” lui demande Hadji Noh, un des vieux du village les plus influents, qui veut s’assurer de sa robustesse.
Ce qu’il y a entre Riad et Zahra, personnage interprété par Hafsia Herzi, est assez troublant. On ne sait exactement ce que c’est, tant leurs sentiments sont montrés avec pudeur. Au début du film, Zahra est mariée avec Mastour, son ami de toujours. On les appelle “les enfants”. Elle n’ose se donner à lui pour leur nuit de noces, et s’apprête à le faire lorsque Mastour est appelé à la guerre. On voit dans cette scène, toute en retenue, Zahra se dénuder jusqu’au dessus de la poitrine. La jeune femme a toujours rêvé de se marier à un étranger. Ce souhait se trouve exaucé de façon inattendue. Sa relation avec Riad reste pourtant en suspens tout au long du film. Zahra est entre retrait et proximité. On devine peu à peu son amour partagé pour le jeune homme. Son accord est tacite, tout comme celui de sa mère et de Hadji Noh. Les silences et les regards prennent toute leur importance ; les rares échanges de parole n’en ont que plus de poids. “Ce qu’avant tout vous vous rappellerez d’un être aimé profondément (…) c’est les silences que vous avez vécus ensemble ; car c’est la qualité de ces silences qui seule a révélé la qualité de votre amour et de vos âmes” écrivait Maurice Maeterlinck (dans “Le Silence , in. Le trésor des humbles). Les acteurs sont parvenus à créer cette intensité, à nous faire croire à cette rencontre “à ‘ancienne”. Ils essaient de montrer leurs personnages “à nu”, aussi rugeux qu’ils le sont, sans en rajouter.
L’histoire d’amour apparaît alors en surimpression des évènements, qui se succèdent, tous dramatiques. A la fin du film, les deux amoureux sont les seuls survivants, avec le petit garçon et la mère de Mastour (interprétée par Hiam Abbass). Cette dernière a perdu la raison et prend Riad pour son fils. On comprend qu’il n’y aura plus d’obstacle à la relation entre Riad et Zahra. Cette fin n’en est pas pour autant “heureuse”. Il se dégage des dernières scènes une sensation de douleur, de pesanteur, sur laquelle se détache timidement l’affirmation de la vie.
Le principal intérêt cinématographique du film est peut-être la façon dont la narration se mélange à des éléments poétiques. On dit que c’est en Mésopotamie que se trouvait le jardin d’Eden, ou que fut construit l’Arche de Noé. La voix d’Abbas Fahdel nous faisait déjà partager ce passé mythique dans son documentaire” Le retour à Babylone ” : “A l’appel du muezzin, le jour se lève (…) paysage couleur d’aube du monde, préservé, hors du temps”. Il parle de villes provinciales “aussi anciennes que la puissante Babylone de l’Antiquité. Filles gâtées de l’Euphrate, elles étaient le coeur du croissant fertile de la Mésopotamie. A en croire les habitants, c’est ici que se situait le jardin d’Eden de la Bible. Comment leur donner tort? J’y retrouve les sensations et la douceur de vivre de la Babylone de mon enfance”. Ceci aide à comprendre pourquoi tout paraît hanté dans ce film, les arbres, les paysages, les eaux…, pourquoi on est comme envoûté. Les lieux représentés sont eux-mêmes chargés d’histoires, de légendes. L’intrigue – qui n’occupe pas exactement le centre du film – est placée dans un entre deux, elle avance sans qu’on ne sache comment. L’onirisme est présent, malgré la réalité de la guerre. On ne sait par exemple à qui appartient l’avion noyé dans un des marais – son aspect fantasmagorique s’explique quand on sait qu’il a été dessiné d’après les plans des hydravions de “Porco Rosso “, le dessin animé de Myazaki.
Le rythme du film, doux, parfois lent, nous berce. La musique, signée Jürgen Kniepr, le compositeur des films de Wim Wenders, est très belle. Elle a été travaillée d’une manière qui nous éloigne de tout folklore – “universelle”. La référence aux récits bibliques donne un poids supplémentaire au film. Les images des morts et des vivants, surtout dans la dernière partie du film, sont particulièrement âpres. Elles véhiculent, comme telles, les questions de la valeur de la vie, de la survie, aussi bien individuelle que collective. L’Aube du monde montre la fin d’un monde, celui des Ma’adans, dont le mode de vie est détruit. Le film se situe dans la lignée des réflexions de Tarkovski dans “Stalker“, qui évoquait des situations apocalyptiques et post-apocalyptiques, ainsi que des préoccupations écologiques. Tout comme il évoque des drames quotidiens, qui sont le lot de ceux qui connaissent la guerre, dans toutes ces formes (pour le cinéma, on pense ici à l’histoire d’amour gâchée par la guerre du film “Quand passent les cigognes” de Mikhaïl Kalatozov, même si celle de “L’Aube du Monde” se termine par une promesse, implicite, entre Riad et Zahra). On n’a pas besoin de connaître l’histoire des Ma’adans, ni l’histoire des religions, ni ces références cinématographiques (ou bien on peut en trouver d’autres), pour ressentir tout cela en voyant “L’Aube du monde“.
Le film a été tourné dans des conditions parfois délicates. L’équipe était composée de personnes de différentes nationalités (égyptienne, française, franco-libanaise, tunisienne, soudanaise…) et on peut y noter – outre un casting de “premier choix” – la présence comme chef opérateur de Gilles Portes, le réalisateur de “Quand la mer monte “. C’est toute cette équipe, autour d’Abbas Fahdel, qui a fait un film riche de sens, qui peut parler à tous, et qu’on a envie de conseiller.
Lien de l’article:
 __________________________________________________________________ 
 
Attribué par un jury d’exploitants de salles, de programmateurs et d’élus du domaine culturel, le prix spécial du XXe festival est revenu à L’Aube du monde du franco-irakien Abbas Fahdel. Une récompense décidée à l’unanimité et saluée par les murmures approbateurs des spectateurs. «C’est un conte violent et magnifique », a simplement lâché Maurice Desindes, président du jury. Pour le réalisateur : «Voir ce film terminé était déjà une récompense.» L’Aube du monde prend pour décor une zone marécageuse, paradis naturel du sud de l’Irak, aujourd’hui disparue. « J’ai voulu montrer comment la guerre, la violence et la dictature ont, en quelques mois, anéanti un paysage, une civilisation, des traditions… » Sorti en France au printemps dernier, le film vient d’être primé à Beyrouth et devrait être diffusé sur Canal +. En attendant, pour sa première participation, Abbas Fahdel appréciait l’ambiance chaleureuse du festival fameckois. «J’ai eu ici l’occasion de toucher un public différent. Je retrouve le cinéma dans son sens premier extraordinaire : celui d’un art populaire. »
Lucie BOUVAREL
 

 LA CRITIQUE LORS DE LA SORTIE EN SALLE DU 27/05/2009

Plein soleil, des roseaux, des marécages. Rien à voir avec l’image habituelle qu’on se fait de l’Irak. Nous voilà dans le delta du Tigre et de l’Euphrate, le jardin d’Eden, selon le livre de la Genèse. Au coeur de cette région vivent des Arabes pauvres et persécutés. Parmi eux, le jeune Mastour, à peine marié et enrôlé de force pour combattre les Américains dans la guerre du Golfe. Du conflit, on aura juste un aperçu brûlant : Mastour marchant au ralenti en plein désert, en compagnie d’un soldat camarade, au milieu d’un champ de mines. Longue séquence, tendue, suspendue. Un faux pas, Mastour saute. Mais juste avant de mourir, cet ange sacrifié fait promettre à son ami Riad de rejoindre et de protéger sa jeune épouse, interprétée par Hafsia Herzi, plus sensuelle que jamais.

L’Aube du monde est une vraie surprise. Un film qui semble venir de loin, signé par Abbas Fahdel, un réalisateur né en Irak, qui a fait ses études en France et qui a déjà réalisé deux documentaires. Il a aussi été critique avant de devenir cinéaste et cela se voit : il cadre avec soin, varie les points de vue, procède par métaphores. Sa fable moderne décrit le sort malheureux des Arabes du marais, mais puise aussi dans la mythologie. La guerre, la malédiction, les traditions sont, ici, autant de barrages qui empêchent Riad d’être fidèle à sa promesse. Servi par une photographie splendide, le film emprunte des détours sinueux, oscille entre espoir et désolation, et s’approche de la fantasmagorie. Jusqu’à finir par la vision hallucinante d’une cohorte de survivants hagards et abandonnés, possible tableau d’un lendemain d’apocalypse.
Jacques Morice, Télérama

http://www.telerama.fr/cinema/films/l-aube-du-monde,383868.php

 

aube-du-monde.jpg

Vous le savez si vous suivez depuis quelque temps notre site, nous aimons les découvertes…Alors nous aimons souvent des premiers romans ou des premiers films.
C’est le cas ici, avec cette fable réussie d’Abbas Fahdel d’un jeune réalisateur franco-irakien, né à Babylone en Irak. Venu en France pour étudier le cinéma, il a suivi les cours d’Eric Rohmer et de Serge Daney, obtenant un doctorat en cinématographie de l’Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Documentariste, réalisateur, il est aussi journaliste et critique de cinéma.
Cette première oeuvre de fiction est totalement réussie.
L’histoire est simple, tenant en deux lignes. Et comme chacun le sait les histoires simples donnent souvent, en littérature et au cinéma, les plus belles réussites…
Dans le sud de l’Irak, dans la région des grands marais du delta du Tigre et de l’Euphrate, deux enfants grandissent, Mastour et Zahra. Ils se marient très jeunes. Mais c’est sans compter sur la guerre du  Golfe. Mastour ne veut pas vraiment partir, mais il est mobilisé d’office.
C’est le début de cette belle et touchante histoire.
La caméra du réalisateur est souvent discrète, elle se coule entre les personnages, profite d’un décors exceptionnel et surtout permet de nous immerger totalement dans cette vie, silencieuse, éloignée de la civilisation citadine. Les marais étant également un personnage à part entière.
Il ne fait jamais bon être civil en temps de guerre, dans aucun pays…
Car il s’agit aussi de cela dans ce film, de la survie, au-delà de la guerre, au-delà de la mort d’un être, au-delà d’une dictature, au-delà de l’isolement…

Survivre…
A la seconde vision, le film fonctionne toujours aussi bien et l’émotion demeure intacte, signe des films qui, sans doute, vieillirons bien.
Le film est tellement réussi, surtout pour un premier film, que l’on aurait aimé, surtout après sa faible distribution en salles (comme souvent pour les premiers longs métrages) quelques compléments lors de cette parution en DVD…
Enfin, au-delà du talent d’Abbas Fahdel, on ne peut que remarquer la confirmation de la naissance d’une actrice aussi originale qu’émouvante, Hafsia Herzi, que nous avions découvert dans le sublime film de Kechiche “La graine et le mulet”. Cette actrice ira loin si elle sait toujours aussi bien choisir ses films.
Participe également à cette belle réussite, la musique originale de Jürgen Knieper, pianiste et compositeur allemand ayant souvent travaillé avec Wim Wenders ou encore Doillon et Margarethe Von Trotta.

L’AUBE DU MONDE
Ecrit et réalisé par Abbas Fahdel
Editions Montparnasse
2010 / 1 H 32 / VOSTFR


 REVUE DE PRESSE

“Un premier film sensible”
Libération

“Une vraie surprise et une photographie splendide”
Télérama

“L’un des plus beaux films de 2009 assurément.”

Cinéma.Evous

“Une oeuvre sensible, qui conjugue splendeur visuelle et émotion”
L’Humanité


La guerre jusque dans les marais

Publié le dimanche 29 août 2010

Un premier film lumineux pour Abbas Fahdel. Ce réalisateur irakien qui a fait ses études en France a déjà signé deux documentaires avant de traiter du sort des Maadans, des Arabes pauvres et persécutés qui vivent repliés dans des marais irakiens, dans le delta du Tigre et de l’Euphrate. Méprisés par Saddam Hussein qui entreprit d’assécher la zone, et par les habitants de Kaboul, ils ont aussi été victimes des nombreux conflits touchant l’Irak. C’est par le biais d’une fable que Abbas Fahdel met en lumière l’existence de ce peuple au mode de vie primitif. Ils vivent dans des cabanes lacustres tout en roseau et au confort très sommaire. En racontant la dramatique histoire d’amour entre un soldat revenu de la Guerre du Golfe et une jeune Maadan, il met l’accent sur les tragiques conséquences de la guerre pour les Arabes des marais. Un film utile servi par une magnifique photographie.
« L’Aube du monde ». Flm franco-allemand (2009 – 1 h 32). Editions Montparnasse. 15 euros.

L’Union l’Ardenais

http://www.lunion.presse.fr/article/autres-actus/la-guerre-jusque-dans-les-marais


 

L’aube du monde

23 août 2010

Rescapé de la guerre du Golfe, un soldat irakien se réfugie dans la région des grands marais du delta du Tigre et de l’Euphrate. Il rêve de recommencer une nouvelle existence aux côtés de la jeune veuve d’un camarade mort à la guerre. Les deux hommes, amis d’enfance , en avaient fait la promesse…

 
“L’aube du monde” de Abbas Fahdel
Avec : Hiam Abbas, Karim Saleh, Hafsia Herzi
Sortie le 25 août 2010
Distribué par Editions Montparnasse
Durée : 96 minutes
Nombre de : 1
Film classé : Tous publics
Le film : ★★★★☆

Grand Prix du Meilleur Scénariste-Trophée du 1er scénario (CNC)-Prix du public et du jury Netpac – Festival international du film asiatique de Vesoul 2009-Grand prix – Gulf Film Festival 2009

« Crie-leur à propos de notre peuple oublié dans le silence des eaux. Inscris tes cris sur les fronts, une marque de feu qui s’effacera lorsque la vie frémira dans notre peuple oublié dans le silence des eaux. »
Saadi Youssef, poète irakien

C’est un film fragile, au sens où le tragique se mêle à la beauté des choses. Des visages superbes, des paysages sublimes. On y devine la guerre toute proche, la main mise d’un dictateur, mais dans ce petit village perdu au bord des marais, malgré un quotidien âpre et sans lendemain, la vie s’impose malgré tout.
Zahra a vu partir son mari pour le front, et elle sait qu’il ne reviendra pas. Le deuil qu’elle porte, c’est aussi celui de toute cette petite communauté, qui admet difficilement que l’annonciateur de la mauvaise nouvelle puisse s’attacher au regard de la jeune veuve.
C’est toute la sensibilité de Abbas Fahdel qui s’immisce dans l’intimité de ces pauvres gens, sans jamais les dévoyer d’un destin qu’ils jugent à l’aune de leur honneur.
Le récit est simple, l’écriture ne l’est pas moins, et c’est ce qui confère à l’histoire toute sa force et son aura. Car le lieu ici est fortement symbolique. Entre le Tigre et l’Euphrate, c’est le jardin d’Éden, celui de la bible, qui dit que la vie a commencé là. C’est peut-être pourquoi le réalisateur conserve derrière son objectif toute sa virginité à travers des plans superbes et un cadre parfait.

Il faudrait s’arrêter sur quelques photos, pour en goûter pleinement  le sens et la pertinence.

On est subjugué par tant d’audaces esthétiques, quand le propos  stigmatise la barbarie des hommes, que l’on aperçoit subrepticement à la recherche d’un déserteur. Impitoyable, l’armée abat ceux qui les cachent. Elle brûle leur maison. La mort prend son temps, mais c’est la vie qui va triompher nous dit Abbas Fahdel, dans l’évanescence d’une poésie oubliée, là-bas dans un coin de l’Irak des années Hussein.
C’est  la grâce qui triomphe, et Hafsia Herzi en est l’incarnation parfaite, comédienne qui depuis « La Graine et le mulet » n’arrête pas de m’étonner. Elle semble pouvoir jouer tous les registres, dans toutes les langues, et avec un cœur toujours aussi immense. On dit parfois que telle ou telle actrice accroche parfaitement  la lumière. Hafsia Herzi la rend encore plus lumineuse, derrière cette caméra, qui la suit , avec une telle discrétion, une  telle retenue , que l’on oublie le film, pour le vivre totalement .

Avec également Karim Saleh dans le rôle de l’ami ,Waleed Abou El Magd (Mastour, l’époux décédé ), et Hiam Abbass (La mère de Mastour)

http://www.lheuredelasortie.com/critique-dvd-laube-du-monde/?awesm=fbshare.me_ARcU9&utm_medium=fbshare.me-facebook-post&utm_source=facebook.com&utm_content=fbshare-js-small#axzz0xTrIvgBZ


 “L’Aube du monde” film de Abbas Fahdel en dvd (parution le 24 août)

En un lieu comme hors du temps, la tragédie de l’Histoire fait son apparition. Abbas Fahdel nous offre un film émouvant à la photographie splendide. (Régis Poulet)

Région des grands marais du delta du Tigre et de l’Euphrate, au sud de l’Irak. C’est là que grandissent Mastour et Zahra, dans un village lacustre nommé Hufaidh, perdu au cœur des roselières.
Mastour et Zahra sont cousins et comme le veut la tradition de leur peuple, ils se marient très jeunes. Mais voici qu’éclate la guerre dite du Golfe. Mobilisé d’office, Mastour part y mourir. Avant de mourir, il fait promettre à un camarade d’épouser Zahra pour la protéger.
Rescapé de la guerre du Golfe, un soldat irakien se réfugie dans la région des grands marais du delta du Tigre et de l’Euphrate, où il rêve de recommencer une nouvelle existence aux côtés de la jeune veuve d’un camarade mort à la guerre.
Une fable moderne, sensible et métaphorique, au cœur du jardin d’Eden, qui décrit le sort malheureux des Arabes des Marais persécutés par Saddam Hussein dans l’indifférence générale. La guerre, la malédiction, les traditions, le film oscille entre espoir et désolation. La réalisation fait preuve d’une retenue exemplaire, qui permet au film d’éviter tout sentimentalisme ou manichéisme. Un vrai petit bijou…

http://www.larevuedesressources.org/+l-aube-du-monde-film-de-abbas-fahdel-en-dvd-parution-le-24-aout,857+.html

_______________________________________________________________________

The NETPAC Award Winner, Dawn of the World (L’aube du monde), an Iraq-France co-production, directed with much conviction by Abbas Fahdel, was a very moving experience. The entire film which runs for 95 minutes, has been shot on location, and deals with conflict and its damage on people. The location is the Mesopotamian marshes on the delta of two rivers in South of Iraq.
Two cousins grow up in the village and get married at a young age. However before the marriage is consumated, the bridegroom leaves for the battlefield where he is killed. Before dying, he takes a promise from his friend that the friend will return to his village and see his wife. The friend takes over from there and returns to the village where he meets the bride, now a widow …
The jury was unanimous that the film portrayed the human sentiments under war with absolute courage and determination. Director Abbas Fahdel works with competence on a subject which is both difficult and distant from box office-driven formulae.

Aijaz Gul
(a senior film critic from Pakistan)
March 22, 2009

____________________________________________________________________

Bu yıl Vesoul Film Festivali’nde en iyi film ödülünü Irak asıllı yönetmen Abbas Fadıl’ın ‘Dünyanın Şafağı’ (L’Aube du Monde) adlı filmi kazandı. Film 1992’de yaşanan 1. Körfez Savaşı’nın bireyler ve belirli kültürler üzerindeki yıkıcı etkisini etkili bir dille gösteriyor.(..)
Festival’de bir çok jüri ve bir çok da ödül vardı. Benim de üyesi olduğum NETPAC (Asya Filmlerinin Promosyonu Ağı) jürisi olarak en iyi film ödülümüzü Irak asıllı yönetmen Abbas Fadıl’ın ‘Dünyanın Şafağı’ (L’Aube du Monde) adlı filmine verdik. ‘Dünyanın Şafağı’ 1992’de 1. Körfez Savaşı sırasında geçiyor. Fırat ve Dicle’nin oluşturduğu deltadaki bataklık alanda yaşayan köylüler (Maadanlar) filmin baş kahramanları. Film, savaşın hem bireyler hem de belirli kültürler üzerindeki yıkıcı etkisini etkili bir sinemasal dille gösteriyor. Filmin ritmi, kamera kullanımı, çerçeveleri tümüyle başarılı. İstanbul Film Festivali’nde ‘Balıklı Bulgur’la tanıdığımız muhteşem oyuncu Hafsia Herzi’yi de yeniden görmek ayrı bir keyifti. ‘Dünyanın Şafağı’ seyirciler tarafından da festivalin en iyi filmi seçildi.
Cüneyt Cebenoyan

21 Şubat 2009

 ___________________________________________________________________

A WORK OF ARTISTRY

Dawn of the World
Director: Abbas Fahdel
Starring: Karim Saleh, Hafsia Herzi, Hiam Abbass, Waleed Abou el Magd

From the undeveloped marshlands between the Tigris and Euphrates rivers comes the simple tale of Dawn of the World. The film begins with a pair of children, Zahra (Hafsia Herzi) and Mastour (Waleed Abou el Magd), living in a small, isolated community forever suffering as a consequence of distant wars being waged by their country. The story follows them into the beginning of adulthood, as the young man becomes a soldier and the young woman shortly thereafter becomes his widow. Mastour’s dying wish is for his best friend in the army, Riad (Karim Saleh), to marry Zahra and care for her. Riad travels to the marshlands and faces up to the challenges from both Zahra’s community and the military world he has left behind.
Dawn of the World has received much critical acclaim, and with good reason. The director and writer Abbas Fahdel has lovingly rendered a little-known corner of Iraq, and succeeds in conveying the ravages of war with almost no recourse to violence. The storyline is elegant in its simplicity, with only a handful of characters moving composedly through the most appalling situations. The deep quiet of the film, wrought through sparse dialogue and music, sharpens one arresting image after another – of soldiers trudging through a desert of half-buried corpses, of the wrecked body of a bomb in the still marsh waters.
Dawn of the World is primarily a work of artistry. It cannot be appreciated without a good degree of patience, so anyone looking for pure diversion would do well to steer clear. However, those willing to go along with the film’s slow pace and austere story will be richly rewarded.

Aisha Tariq
August 04. 2009


 

المخرج عباس فاضل يتحدث عن فيلمه فجر العالم 

برنامج رسائل سينما حول فيلم فجر العالم


 المخرج العراقي عباس فاضل وابداع في الغربة

الحوار المتمدن .

2013 / 11 / 10 بروين زين العابدين – الحوار المتمدن

Abbas Fahdel à Stockholm, septembre 2013 عباس فاضل في ستوكهولم 2013

Abbas Fahdel à Stockholm, septembre 2013
عباس فاضل في ستوكهولم 2013

لا يهدأ للعراقي بال إلا حين يثبت تفوقه أينما حل وكيفما ارتحل ، لأن الابداع هو طبع أصيل من طبائع الإنسان العراقي . ولطالما جادت هذه الأرض المعطاء بأناساً أثبتوا للشرق والغرب تفوقهم في شتى مجالات الحياة . ، فهو العراق معقل الألق وسحر الابداع والعلامة المتميزه في سفر التحضر والتطور قبل أصقاع كثيرة من الأرض التي كانت ترزح تحت وطأة الجهل والتخلف ، فلا عجبا أن يحمل الهامها كل من يعيش على هذه الأرض و يتنفس من هوائها وعبير شطآنها ، كلنا ندرك ان هناك رابط أزلي يربط بين الإبداع و هذه الأرض على مر العصور
. عباس فاضل ، مخرج عراقي يقيم الآن في باريس ، حاصل على شهادة الدكتوراه في السينما من جامعة سوربون (sorbnne) . كان قد خرج من العراق و عمره ١-;-٨-;- سنة ، و عمل صحفياً وناقداً في السينما الفرنسية . نشر كتاباً تحيليا عن أعمال المخرج الألماني (Wim Wenders) ، فاز فلمه الروائي الطويل (فجر اليوم) بالمرتبة الأولى في مهرجان الفلم العراقي الاول الذي أقيم في العاصمة السويدية ستوكهولم. وتحت شعار : من (جعفر علي الى برغمان)لنبدع معا .. الذي اقيم على قاعة ميدبوريا سكولان بتاريخ ٢-;-٥-;- – ٢-;-٧-;-من اكتوبر ٢-;-٠-;-١-;-٣-;- .. وبحضور الوزير المفوض في السفارة العراقية في السويد الدكتور حكمت جبو والسيد سمير مزبان رئيس جمعية المصورين العراقيين وجمع كبير من الفنانين والناشطين السويدين والعراقين كان عدد الأفلام حوالي ٦-;-٠-;- فلما تم اختيار ٢-;-٥-;- فيلم من بينها للعرض النهائي للفوز بجوائز المهرجان

يقول عباس فاضل : كرست عملي كمخرج سينمائي وتلفزيوني وأخرجت الكثير من الاعمال التلفزيونية والسينمائية ومنها (العودة بابل ) و (نحن العراقيون) والفلم الروائي الذي فاز من قبل لجنة التحكيم في هذا المهرجان ( فجر اليوم ) وفلم جديد انتهيت من مونتاجه وعنوانه ( الوطن ) وفلم اخر ( العراق عام الصفر) ، في خضم انشغاله بالحوارات والاسئلة من الجمهور الحاضر الذي اعجب بفيلمه الفائز تسنى لي ان احاوره بضع دقائق حيث قلت له 
: * : ما هو شعورك وانت الفائز الاول في هذا المهرجان؟
عباس فاضل : الفلم فاز بجوائز عديدة وفي مهرجانات عربية وعالمية ولكن لهذه الجائزة قيمة ومكانة خاصة في نفسي لأنني اعتبرها تكريم من أهلي حيث انها اول جائزة عراقية أحظى بها 
ما هي الصعوبات التي واجهتك عند إنجاز هذا الفلم وتصويره وايجاد البيئة الملائمة له ؟
عباس فاضل : كان من المفروض أن يصور الفلم في العراق وفي منطقة الأهوار تحديداً ، ولعدم امكانية تصوير الفلم في العراق لأسباب أمنية اولا وثانيا لجفاف الأهوار وعدم وجود الحياة الفعلية فيها كالسابق ، فلذلك اضطررت للبحث عن بديل للتصوير وكان لي خيارين : أحدهما المغرب والثاني ايران . ولم افلح في البلدين إذ لم أعثر في المغرب على بيئة مشابهة لبيئة الأهوار وفي ايران أيضاً هناك صعوبات الرقابة والتدخل في مضمون الفلم لذلك اضطررت للبحث عن بلد اخر والذي كان (مصر) ، إذ رأيت منطقة مشابهة لحد ما لأهوار العراق ، فعملت على خلق بيئة مشابهة وبدأنا بالعمل والتصوير هناك أيضاً ، وواجهت صعوبات ومعوقات ولكن مع ذلك نجح الفلم وانا سعيد لانه أخذ المركز الاول 

كنت اود ان استرسل بحواري معه للتعرف عليه عن قرب .. لكن رغبة الحضورمن النقاد والجمهور باخذ حصتهم من التحدث اليه .. سبقتني في ذلك لذلك تمنيت له كل الموفقية والنجاح في اعماله القادمة ليشكل اضافة حقيقية لتاريخ السينما العراقية المتميزة 


البعد الرابع

السينما العراقيه تتألق في العاصمه السويديه ستوكهولم.

ناظم رشيد السعدي

البعد الرابع الجمعة 25-10-2013

كان موعدا خاصا للفرح العراقي في العاصمة السويدية ستوكهولم حي احتضنت شاشة العرض في( اودن بلان) عروض لنخبة من المبدعين الشباب والرواد الذين شاركوا باعمالهم وافلامهم في مهرجان الفيلم العراقي الاول .. حيث قدم جميع المشاركين افلام متميزة رغم الامكانيات البسيطة التي توفرت لهم . ابدعوا في وصف المشهد العراقي في المرحلة الحالية والماضية من خلال افكار اختصرت اوجاع وارهاصات المجتمع العراقي بمنتهى الصدق فاستمتع الجميع بهذا اللقاء الانساني الكبير .. مدير المهرجان الاستاذ سلام قاسم تحدث لبانوراما عن المهرجان قائلا هذا المهرجان الذي نقيمه ( تحت شعار من جعفر علي الى برغمان لنبدع معا ) بجهود جمعية المصورين العراقيين في ستوكهولم بالتعاون مع مدبورية سكولن ووزارة الثقافة حيث استلمت اللجنة المنظمة للمهرجان ٧٨ فلما روائيا وتسجيليا ، عرضت هذه الأفلام على اللجنة التحكيمية وتم اختيار ٣٠ فلما منها لتعرض في المهرجان تنافست الافلام للحصول على الجوائز ،وعددها (20) جائزة ستقدم للافلام المتميزة موضوعا واخراجا واردف تم التحضير للمهرجان منذ 6 اشهر حيث وجهنا الدعوات لجميع الاخوة المبدعين من الفنانين الرواد والشباب فكانت هذه الافلام الرائعة التي تشاهدونها الان هي حصيلة اختيار وفرز من بين مجموعة كبيرة ارسلت الينا للمشاركة وبالتاكيد كل الافلام التي تحاكي واقع المجتمع العراقي هي متميزة لانها تعكس الحقيقة كما هي واكد لنا ان العام المقبل سيشهد مشاركة اوسع واكبر للافلام العراقية من اجل احتضان الطاقات الخلاقة في هذا المجال وقدم شكره وامتنانه لمواكبتنا كل الاحداث المهمة في الوطن وارجاء العالم وقال ان حضورنا هذا المهرجان اضافة مشرفة وكبيرة نستقبلها بكل الحب والامتنان .. بداية المهرجان الذي افتتحه الدكتور حكمت داود جبو الوزير المفوض في سفارة جمهورية العراق في مملكة السويد كانت من خلال افتتاح معرضا للصور الفوتوغرافية لمدينة بغداد بعنوان(بغداد الماضي والحاضر) والذي ضم 50 صورة حيث القى الدكتور جبو كلمه قصيرة بالمناسبة اشاد فيها بجهود القائمين على المهرجان واثر السينما في ابراز معالم وتاريخ الشعوب واهمية مثل هذه الفعاليات في لم شمل الجالية العراقية وكذلك تقديم الفن العراقي بما يليق به امام المجتمع السويدي وبعد ان عزف النشيد الوطني العراقي والذي ردد معه ابناء العراق قسم المحبة والولاء لوطننا الواحد الذي يحتوي كل ابنائه بمحبة وكبرياء وحنين .. القى السيد سلام قاسم مدير المهرجان كلمة ترحيبية بالحضور وكذلك السيد سمير مزبان رئيس جمعية المصورين العراقيين في ستوكهولم وبعده السيدة هيلين رايس مديرة مدرسة مدبورية سكولان اعلن بعد ذلك عن افتتاح المهرجان بالفلم الاول الذي كان بعنوان ( هنا بغداد) للمخرج سلام قاسم وتوالت افلام اليوم الاول من المهرجان والذي سيستمر لثلاثة ايام حيث تمتع الجمهور الحاضر بمشاهدة الافلام ( مشرق الشمس) اخراج احمد عباس ( حالة رقم ) اخراج حسين كولي ( هو) اخراج سجى باسم ( رداء الاموات) اخراج ياسر كاطع ( زهرة) اخراج حسين تاج في فترة الاستراحة بين العروض التقينا نخبة من الجمهور الحاضر وكانت هذه ارائهم …الدكتور عماد زبير .. الخطاط والرياضي والشخصية المتميزة في اوساط الجالية العراقية .. ان هذا النشاط يقدم نتاجات قيمة تستحق المشاهدة وحضور هذا الجمهور بالتاكيد يمنح العروض رونقا خاصا الاستاذ سلام الخالدي استاذ الادب الانكليزي اكد ان للسينما علاقة حميمة مع الانسان العراقي فلطالمنا تجمعنا في عروض متميزة في الحقب الماضية من تاريخنا في الوطن فشكرا لهذه الجهود القيمة السيد رغدان الخزعلي عضو اللجنة التحضيرية للمهرجان كان فعلا وجه مشرف للمحبة العراقية حيث حرص على استقبال الجميع بروحية العراقي النبيل وكان مع صحيفتنا في كل مكان يقدم لنا المعلومات والتفاصيل بمنتهى الحميمية بعد الاستراحة كان موعد العرض الاخير لليوم الاول حيث عرض الفلم الروائي الطويل فجر العالم اخراج عباس فاضل والذي كان متميزا في اخراجه وموضوعه ويعكس امكانيات مخرجه ولمساته المتالقة في تصوير احداث الفلم…. كان يوم من السعادة حملنا بعيدا فحلقت ارواحنا حمائم سلام ومحبة لتراب الوطن الذي يعيش في اعماقنا مهما كبرت وامتدت مسافات الغربة قدم من خلاله الجميع ابداعتهم وافكارهم بما يحاكي الواقع العراقي الذي نتمنى ان يرتقي للافضل دائما لتعود هذه الطيور المهاجرة تبنيه وتنثر في ارجائه زهور الامان والمحبة .. كل تقديرنا لجهود لجنة التحكيم المؤلفة من الدكتور فواد الطائي والدكتور محمد الكحط والفنان علاء مجيد وحيدر الفتلاوي اضافة الى السيد سلام قاسم

ناظم رشيد السعدي


 

“عباس فاضل لـ”العالم الجديد

الرحالة ثيسيغر دفعني لإخراج فلم عالمي عن الأهوار

Abbas Fahdel عباس فاضل

Abbas Fahdel عباس فاضل

حاوره جمال الخرسان
الثلاثاء 6 آب 2013
 

عباس فاضل مخرج عراقي من مواليد الحلة، درس في العراق وانتقل إلى فرنسا بعمر الثامنة عشر، أكمل دراسته هناك وحصل على الدكتوراه من جامعة السوربون في مجال السينما. أخرج العديد من الأفلام منها: “العودة إلى بابل”، “نحن العراقيون”، “فجر العالم”، وهو الفلم الذي يتحدث عن الأهوار، حصل على الكثير من الجوائز الدولية عن فلم “فجر العالم” وعن تجاربه السينمائية الأخرى

“وللاقتراب أكثر من تجربة عباس فاضل في فلمه عن الأهوار، التقته “العالم الجديد

لماذا هذه التسمية؟ “فجر العالم” إلى ماذا ترمز؟

العنوان يحتوي على رمزية، فلكل مشاهد تفسير خاص، لكن بشكل عام السبب الأساسي هو أن هذه المنطقة هي مهد الحضارات، كما أن جنة عدن هي في الأهوار، في بلاد ما بين النهرين وفقا للمؤرخين، وحتى بعض الكتب الدينية المقدسة، ترى أن الخليقة حينما بدأت كانت ماءً وقصبا ثم جزرا ثم قارات، وهكذا نشأت وتكونت الحضارات. هذا هو التفسير التاريخي والفلسفي لبداية الخلق. وفيه نوع من الأمل للعراقيين، بأن البذرة الحضارية موجودة في العراق. قد مرّ على هذا البلد الكثير من المآسي والانتكاسات التاريخية في فترات المغول وغيرها من الفترات التاريخية المظلمة ولكن في كل مرة يعود العراق معافى بسبب هذه البذرات التاريخية التي تبعث فيه الروح من جديد. هناك دوّنت ملحمة كلكامش وأسطورة الفيضان، وهناك الكثير من النصوص القديمة جدا.. هناك ولدت الكثير من العلوم

كيف خطرت لك فكرة الفلم؟

فكرة الفلم بالأساس تولّدت عندي حينما قرأت كتابا هنا في فرنسا للرحالة الانكليزي ولفريد ثيسيغر، الكتاب هو “عرب الأهوار”، هذا الرجل قدّم لي الأهوار بطريقة جعلتني أنبهر بها، يدوّن مشاهداته حينما ذهب إلى هناك في الخمسينات من القرن الماضي وعاش تفاصيل الحياة هناك، انه قدم الأهوار بشكل رائع فيما كان ينظر لها معظم العراقيين بشيء من التعالي، وبنظرة طبقية غير منصفة. انه خلّد الأهوار بشكل رائع

“فجر العالم” فلم روائي أخرج بدافع من ثيسيغر.. الملفت أن هذا الرجل حتى بعد مماته يؤثر ويخدم هذه الرقعة الجغرافية، كيف ترى ذلك؟

الرحالة يلتفتون لكثير من التفاصيل ويعيرونها أهمية ربما نحن نتجاوزها ولا نلتفت لها

قدمت قبل “فجر العالم” أفلاما وثائقية عديدة لماذا اخترت للأهوار النمط الروائي، وليس الوثائقي..؟

لأن الفلم يتحدث عن واقع سكاني ومنطقة دمّرت وانتهت تقريبا، الفلم يتحدث عن أحداث حصلت في حرب الخليج الثانية وما رافقها من تدمير للأهوار، وبما أن الفلم يتحدث عن أحداث قديمة من هنا لابد لي أن اختار الأسلوب الروائي وليس الوثائقي، إضافة لسبب آخر وهو أني أحرص على التنويع في ما أقدمه من أفلام مرة وثائقي وأخرى روائي وهكذا

لماذا لم تختر الجانب الإيراني، فهناك أهوار ملاصقة للحدود العراقية وجزء منها في إيران والبيئة تكاد تكون مشابهة؟

بداية كنت أرغب بتصوير الفلم في العراق، لكن تمويل الفلم كان أوروبيا 100 بالمائة، ومن شروط التمويل أن يكون العدد الأكبر من الكوادر هم من بلدان أوروبية، وكانت فترة الإعداد للفلم وفترة التصوير هي ذروة التدهور الأمني في العراق، كان ذلك في الفترة بين 2004- 2007 من هنا استحال التصوير في العراق، لذلك بحثت عن بديل وكان البديل المناسب هو منطقة جنوب إيران، فهناك أهوار ملاصقة للعراق وهي جزء من الأهوار العراقية الشرقية، لكنها داخل الحدود الإيرانية، ذهبت الى إيران وقضيت هناك ثلاثة أسابيع في الأهوار من الجانب الإيراني، وكنت أعدّ العدة للتصوير قرابة سنة كاملة، وهيّأنا كل شيء، خصوصا وأن الإيرانيين يمتلكون صناعة سينمائية متطورة، لكن الرقابة الدينية المفروضة في إيران، وخصوصا مسألة الحجاب المفروض على الممثلات، مع وجود مشاهد لابد أن تصوّر دون حجاب، إضافة الى أسباب أخرى خاصة. من هنا كان البديل الآخر الأنسب هو مصر

الفلم صوّر في مصر كيف استطعت التغلب على تفاصيل البيئة المختلفة، خصوصا وأنك لم تعش في الأهوار، وربما بعيد عن تلك المناطق؟

استعنا كثيرا بالتفاصيل التي ذكرها ثيسيغر، والصور التي التقطها، فهو مصوّر محترف، في غرفة الإعداد كنا قد ألصقنا الكثير من الصور على الجدران من أجل أن تبقى التفاصيل قريبة منا، لذلك كان الديكور جيد جيدا. وكانت المشكلة الأساسية في لهجة الممثلين، لان الاشتراطات التي فرضها التمويل بأن تكون معظم الكوادر أوروبية أو من حملة الجوازات الأوروبية أجبرنا على الاستعانة ببعض الممثلين العرب من لبنان، فلسطين، وشمال إفريقيا من حملة الجنسيات الأوروبية. وحتى هذه المشكلة ليست عائقا لأني قللت الحوارات في الفلم، وركّزت كثيرا على الفكرة، حاولت أن أطرحها بنظرة تجريدية بعض الشيء، بحيث يمكن أن يكون العمل قريبا معبرا عن الكثير من قضايا أخرى مشابهة في أميركا الجنوبية وفي أماكن أخرى من العالم. أيضا لابد من التذكير بأن الكثير من التجارب السينمائية في الغرب طرحت من خلال ممثلين من غير البلد المعني، المهم في الموضوع هو الفكرة الأساسية بغض النظر عمن يطرحها. المخرج الايطالي “فلّيني” اختار الكثير من الممثلين الأميركان لأفلامه رغم أنه إيطالي. “يوسف شاهين” كان يختار ممثلين من غير المصريين. المخرج السويدي “بريغمان” اختار الممثلة النرويجية “ليف أولمان” للتمثيل في قرابة 20 فلما، بينما هي ليست سويدية، والسويديون يعرفون أنها تتكلم السويدي بلهجة نرويجية، لكن ليس ذلك المهم، المهم هو الأداء بالدرجة الأولى. وبشكل عام لو توفرت الظروف المناسبة جدا كان بالإمكان الاستعانة ببعض الممثلين العراقيين، لكن الصعوبات حالت دون ذلك

بعضهم يعتبر أن ما قدمته في هذا الفلم من دلالات رمزية هو نفس طوباوي جدا في ظل واقع الأهوار البائس؟

نحن نتحدث عن منطقة فيها مهد الحضارات لذلك لم أحمّلها أكثر مما تحتمل، فهناك جنة عدن كما يقول المؤرخون، هناك دجلة والفرات والحضارات الأخرى الملاصقة لسومر، لم أتحدث اعتباطا. لكن الشيء الذي يمثل فارقا بين الفلم الذي أنتجته وقدمته عن الأهوار وبين بعض ما شاهدته في الأهوار، الفارق هو الإهمال المتعمد في الأهوار والغياب شبه التام للخدمات وغياب الاهتمام بالبيئة، بحيث يظهرها بمظهر لائق، نعم هذه تمثّل فارقا بينما أردت تقديمه من خلال الفلم وما عرفته عن الأهوار فيما سبق، وبين حال الأهوار حاليا. أسميت القرية في الفلم باسم قرية “حفيظ”، والاسم مقتبس من كتاب ثيسيغر، حينما يتحدث عن أسطورة حفيظ، أما نهاية الفلم، فهو مشهد للبطل والبطلة وترتفع الكاميرا، ليبقى الاستنتاج مفتوحا وفيه أيضا إشارة إلى أن آدم وحواء يمكن أن يعيدوا الحياة من جديد

هل هناك إدانة في هذا الفلم أو يحمل أي توجّه؟

الفلم بالنتيجة يحمّل النظام المستبد الكثير مما لاقته الأهوار، وفيه إشارات أيضا للجانب الأميركي، لكن لا توجد إدانة صارخة لأحد، لأن الفلم ليس سياسيا بالدرجة الأولى

هناك خلطة فنية ملفتة في هذا الفلم خصوصا في الموسيقى والغناء.. المؤلف الموسيقي ألماني والمغنية فلسطينية، ما الهدف منها؟

أردت بذلك شيئا من التغيير والابتعاد عن الموسيقى الشرقية هذه المرة، لقد عرض الفلم في بلدان عديدة لم يتساءل أحد عن ذلك إلا العراقيون، أتفهم ذلك. مؤلف الموسيقى هو أكبر موسيقار ألماني، في البداية أعد لي موسيقى بطابع شرقي، لكني رفضت لأني أردتها أن تكون مختلفة عما ورد في الأفلام السابقة. والمغنية هي مغنية فلسطينية قريبة من العراق، وهي “ريم بنا”. وهناك تفاصيل حرصت عليها كي يكون للفلم أيضا بعد عالمي، ونموذج للكثير من القضايا، فهو مثلا ينطبق على بعض ملامحه من فلسطين، ولذلك أحبه الفلسطينيون كثيرا. من هنا جاءت بعض التفاصيل مختلفة


 فجر العالم- خطوة سينمائية جريئة لاستنطاق واقع عراقي اخرس طافٍ على الماء

محيي المسعودي

تكمن قيمة فيلم “فجر العالم” في موضوعته تلك الموضوعة التي تتناول تاريخ اجتماعي سياسي عراقي اخرس , لم يُستنطق طوال عقود خلت . انسان الجنوب العراقي مهمل ابدا على عكس ثرواته التي لقيت الاهتمام الاكبر من السياسة العراقية والعالمية . حتى الدراما العراقية كانت ولا زالت تتناول حياة الجنوبيين من اجل الكوميديا الساذجة التي تاتي دائما على حساب قضايا هامة يعيشها ذلك الانسان . وهنا جاء الفيلم كخطوة جريئة من عباس فاضل لانه كشف لغير العراقيين شيئا ولو بسيطا من حياة وبيئة سكان “الجبايش” تلك القرى العائمة على مسطحات مائية تسمى الاهوار . الاهوار التي تحكي اساطيرها بداية الخليقة في اسفار سومر
ترك المخرج في فيلمه اشارات ورموز عن تلك الاساطير مثل المساحات المائية الصامتة التي ترمز الى بديات الخليقة في الاساطير السومرية والى الالهة “تيامت” الهة العماء وكذلك ترك رمز للطوفان السومري بنجاة القليل من سكان الاهوار من ابادة نظام صدام حسين لهم بعد ان جفف الاهوار . والتجفيف اشارة الى محاربة الحياة التي يرمز لها الماء , هذا اذا علمنا ان ابناء الجنوب العراقي يطلق عليهم لقب ابناء الماء كما يصفهم الشاعر الجنوبي المعاصر مسلم الطعان. والجبايش مجمعات سكنية عائمة على الماء ياكل سكّنها من الماء ويتنقلوا فوق الماء ويناموا على الماء ويصحو على الماء و”الجبايش” معزولة عن العالم , لها طقوسها وعاداتها الخاصة وتاريخها وتقاليدها التي تنطوي على اسرار موغلة في القدم, الى الان لم يُكشف النقاب عنها, ولم تستطع سلطة سياسية او عسكرية اخضاع هذه المجمعات لسيطرتها خاصة وان الاهوار مفتوحة على ايران , حتى صدام بكل جبروته لم يستطع السيطرة على سكان هذه المناطق الى ان جفف الاهوار التي يمتد تاريخها المكتوب عشرات القرون وكان التجفيف كارثة بيئية لم يشهدها العالم طوال تاريخه كما وصفتها الامم المتحدة
من هنا اخذ الفيلم “فجر العالم” اهميته وربما حتى تسميته . لم تكن حبكة الفليم شيئا غريبا على العراقيين خاصة وان الفيلم يتحدث عن حكاية لا يخلوا مكان عراقي واحد منها وهي قصة تقع في زمن محدود هو حرب الخليج الاولى والثانية اللتين لم تزل احداثهن واضحة في ذاكرة العراقيين. وتدور احداث الفيلم حول علاقة قصة حب بين الشاب مستور وابنة عمه زهرة في منطقة الاهوار جنوبي العراق. تتطور هذه العلاقة بين حربي الخليج الأولى والثانية إلى أن يتزوجا مع بداية حرب الخليج الثانية، تماما في الوقت الذي يُستدعى فيه مستور الى الالتحاق بالجيش، ثم يترك موت مستور أثناء الحرب، فراغا وجرحا عميقا في قلب زهرة. مثلها مثل آلاف العراقيات انذك. وفي نهاية الفيلم لا ينجو إلا أربعة أشخاص فقط هم طفل يتيم، وأم مستور، وأرملته زهرة، ورياض – الجندي البغدادي الذي تعرف عليه مستور أثناء الحرب- وأودعه وصيته قبل أن يموت بان يهتم بزوجته زهرة ويتزوجها كي يحميها
ياتي رياض إلى الاهوار ويخبرأهل مستور بوفاة ابنهم، وعندما يرى زهرة لأول مرة يميل قلبه نحوها، ويحاول ان يجد مكانا له في قلبها، لكن زهرة تمضي في حزنها، ويمضي رياض – ابن مدينة بغداد- في سعيه لاستمالتها، ويظل معها زمنا في الاهوار، فيتعرف على الناس هناك وعلى حياتهم، لكن مع كل هذا لم يتغير قلب زهرة نحوه، إلى أن يضغط احد رجال الاهوار على زهرة لتتزوج به عندها تقبل الزواج من رياض.
يقول احد منتقدي الفيلم ان بقاء زهرة وحيدة وعدم قبولها بمن يتقدم لها امر غير مقنع ولا مبرر في الفيلم. وهنا يبرز جهل الناقد العربي بشخصية المرأة العراقية التي تمثلها زهرة . فمن تابع حرب الخليج الاولى سوف يرى آلاف العراقيات اللواتي قُتل ازواجهن في الحرب فبقين ارامل ولم يتزوجن رغم الضغوط الكبيرة عليهن كتعبير منهن عن الوفاء لازواجهن او الحرص على اولادهن . وبعضهن تزوجن طلبا “للسترة او منعاً للقيل والقال” كما يقول المثل الشعبي العراقي. والنوعين من النساء انما فعلن ذلك بسبب التقاليد والعادات الاجتماعية. اما المُحبة منهن فهي من تكتفي بذكرى زوجها او بما لديها منه من اولاد. اذن لم يكن غريبا موقف زهرة ورفضها حتى لرياض ولم يكن قبولها به رغبة او تحوّل في مشاعرها بل هو مراعاة للتقاليد ومنعا لالسن الناس من الحديث عنها.
وكان المخرج عباس فاضل موفقا في الصمت والهدوء والحزن الذي رافق الفيلم, ذلك لان الحزن هو السمة الغالبة على العراقيين جميعا فما بالك باهل “الجبايش” الذين يحيطهم الماء من كل الجهات. كما ان المخرج اشتغل على حسه العراقي عندما اعتمد التاثير عاطفيا على المتلقي

الحوار المتمدن – العدد: 2810 – 2009 / 10 / 25
المحور: الادب والفن

www.ahewar.org


عباس فاضل: احاول وصل ما انقطع من السينما العراقية
شارك فيلمه ‘فجر العالم’ في مهرجان السينما العربية الفرنسية بعمان مؤخرا

ما زال المخرج العراقي عباس فاضل مرشحا لحصد مزيد من النجاح عن فيلمه الروائي الأول ‘فجر العالم’، الذي حظي بثناء النقاد، وإعجاب المهتمين، كما نال عدة جوائز قيمة من خلال مشاركاته في المهرجانات السينمائية، كانت آخرها جائزة لجنة التحكيم الكبرى في مهرجان الرباط الدولي لسينما المؤلف في حزيران (يونيو) 2009، بالإضافة إلى الجائزة الأولى لأفضل فيلم روائي طويل في مهرجان الخليج السينمائي عام 2009، وجائزة الجمهور وجائزة النقاد في مهرجان فيزول الدولي للسينما الآسيوية عام 2009، وجائزة أفضل سيناريو من المركز الوطني الفرنسي، بالإضافة إلى مشاركات في ألمانيا وبلجيكا وتونس وكوريا الجنوبية وغيرها.
الفيلم المكتوب بلغة سينمائية مؤثرة، يدور في منطقة الأهوار العراقية عن آلام الإنسان العراقي وعذاباته في زمن الحرب، فالشاب مستور الذي يتم اقتياده للحرب أثناء حرب الخليج الأولى، يقتل وتقتل معه قصة حبه لزهرة التي زف إليها للتو، ليوصي قبل موته صديقه رياض، الجندي القادم من بغداد والذي نجا من الموت في الحرب، بالزواج منها لرعايتها، لكن رياض يقع في حبها فعلا مع تواصل الثقل الكابوسي للخوف والحرب والموت
وعباس فاضل هو مخرج وناقد سينمائي وكاتب سيناريو عراقي، من محافظة بابل، يقيم في فرنسا منذ سن الثامنة عشرة، ويحمل شهادة الدكتوراه من جامعة السوربون في السينما. أخرج أعمالا تلفزيونية، ثم اتجه إلى السينما، فقدم ثلاثة أفلام قصيرة هي: الاشياء في الظل، يوم الأحد في مقهى الضواحي، عالم المصور ويجي. ثم أنجز فيلمين وثائقيين هما: ‘العودة إلى بابل’ عام 2002، عن آثار الحرب والحصار الذي فرض على العراق ، وفيلم ‘نحن العراقيون’ تأكيدا على الهوية الوطنية عام 2004
في مهرجان السينما العربية الفرنسية الذي يقام سنويا في عمان، كانت لفيلمه مشاركة جديدة، حيث جرى هذا الحوار حول الفيلم، وحول تجربته السينمائية

قمت بإخراج الفيلمين الوثائقيين ‘العودة إلى بابل’ عام 2002، ثم فيلم ‘نحن العراقيون’، وأخيرا فيلمك الروائي الطويل الأول ‘فجر العالم’ عام 2008، وكلها أفلام منشغلة بهاجس الوطن. هل كان حنين المهاجر دافعك لصناعة تلك الأفلام؟ أم ثمة دوافع أخرى؟
الحنين إلى الوطن -وأنا المهاجر عن العراق منذ كنت في الثامنة عشرة من عمري- هو بالتأكيد أحد الدوافع الأساسية لصنع تلك الأفلام، فرغم ابتعادي الطويل عن العراق، إلا أنه لم يبتعد عني يوما، إنني أحمله معي دائما في مهجري الفرنسي، لم أنسه يوما، وعايشت الأحداث التي عصفت به، وكنت شاهدا عليها. فيلمي ‘العودة إلى بابل’، كان عام 2002، حيث ذهبت إلى العراق، ورصدت ما حل به وبالناس من أثر الحرب والحصار في تلك الفترة، كما أن صلتي بالوطن وبأهلي الموجودين فيه لم تنقطع يوما، وأقوم بزيارات دائمة. العراق حاضر في حياتي دائما، وهو همي الأكبر.
لكن المسألة لدي لم تكن حنينا مجردا، وهذا ما تناولته في أفلامي، فأنا أعتبر نفسي أحد الناجين من بين كثيرين، أصدقاء كنت أعرفهم، ابتلعتهم الحروب التي عاشها العراق وقضوا فيها. في أفلامي ذهبت إلى أيامي تلك، أتذكرهم وأبحث عنهم، وأميط اللثام عن مصائرهم التي كتبتها الحروب، وأرصد من خلالهم ما خلفت من بؤس على أرواح البشر
أما الدافع الثاني، فهو قناعتي بضرورة الأرشفة لمرحلة من تاريخ العراق، ومحاولة وصل ما انقطع من تاريخ السينما العراقية، ولعلك تعلمين أن أرشيفنا السينمائي قد ضاع في الحرب الأخيرة
وتجربتي ربما تختلف عن كثير من الفنانين العرب المهاجرين خارج أوطانهم، لا سيما في أوروبا. لقد وجهت طاقتي السينمائية واهتمامي نحو وطني، لأنه هويتي وذاكرتي، وهو ما يعنيني إطلاع العالم عليه، ومعالجة قضاياه وأزماته، ورغم الصعوبات والمشاكل التي تعرضت لها مثل كل عربي وعراقي مقيم في أوروبا، إلا أنها لم تشكل لدي هاجسا إبداعيا كما كانت بالنسبة لآخرين من المخرجين العرب، الذين صنعوا أفلامهم لمعالجة قضاياهم الحياتية في المهجر، ولم يلتفتوا لقضايا أوطانهم وبيئاتهم الأصلية. الجذور بالنسبة لي هاجس وهم دائم إنسانيا وإبداعيا

في فيلمك ‘فجر العالم’ اشتغال فني رفيع على اللغة البصرية، خصوصا ما يتعلق بجماليات المكان، لقد شاهدنا لوحات فنية مرسومة بحساسية عالية. أفهم محورية المكان في الرواية مثلا، ولكن في فيلم ثمة عناصر فنية ربما تفوقه أهمية، لماذا كان كل ذلك الاحتفاء ببيئة الفيلم المكانية؟
في هذا الفيلم تحديدا كان المكان هو الشخصية الرئيسية بالنسبة لي، واشتغلت عليه فنيا على هذا الأساس. منطقة الأهوار تاريخيا هي ملتقى نهري دجلة والفرات، حيث تشكلت الدلتا، وكانت في الماضي تسمى ‘جنة عدن’، وهذا رمز يحمل دلالة في الفيلم، فهي منطقة لها حضور تاريخي طويل في العراق. لم يكن اختياري لها عبثيا، ومن تلك البقعة، أردت التسجيل للوطن ضمن الاستمرارية التاريخية الحضارية للمنطقة. وقد عالجت العمل بدلالاته الأسطورية، فالأهوار ترمز لهذا العالم، وشخصية حجي نوح، الذي شكل مرجعية للأهالي، كان إحالة على سفينة نوح، عنوان النجاة من الطوفان القادم، أما شخصيتي الجندي رياض، والفتاة زهرة، فهما رمزان لآدم وحواء. في المشهد الأخير، تختفي كل العناصر، ولا يبقى سواهما، أردت من خلالهما القول أن الحب ينبت ثانية، وبقوته ستعيد البشرية بناء الحياة، من قلب الحرب والدمار والخوف

ألا تجدها رؤية شديدة الطوباوية في ظل واقع يعمه الخراب؟
ولتكن رؤية طوباوية، أين المشكلة؟ ما قيمة الفن والإبداع إن اكتفى بنقل الحياة، وتقديمها كما هي؟ لا بد أن يحمل الفن رؤيته الخاصة به المبشرة بالجمال والخير، والتي تجعل من الأمل إمكانية دائمة لاستمرارية الحياة. لو لم أكن حالما لما كنت فنانا، ولما اتجهت بشكل أساسي لدراسة السينما

في بعض المشاهد، بدا المكان كأنه مكان افتراضي، لا يحيل إلى بيئة محددة أو منطقة بعينها، ما المغزى من ذلك؟
هذا صحيح، لقد تعمدت التجريد في المكان، فالقرية في الفيلم لا يمكن ببنائها وديكورها أن تكون معبرة عن قرية حقيقية، عدد البيوت لم يكن يتجاوز الثلاثة، والشخصيات التي ظهرت كانت قليلة أيضا، وفي نهاية الفيلم، تختفي حتى الحيوانات والطيور، وتبدو الصورة بالغة التجريد، وهذا كله بالنسبة لي لخدمة فكرة العمل. لقد انطلقت من الخصوصية العراقية، لأذهب إلى الأفق الإنساني للفكرة، بحيث يمكنها أن تلامس أي متلقٍّ وفي أي مكان. وفي نفس الوقت، فإنها تمتلك القوة الكافية لعكس مأساة الإنسان العراقي، الذي عاش الحروب لأعوام طويلة، دون أن يتاح له عيش الحياة كغيره من البشر

إذن، فهل تعتبر نفسك فنانا ملتزما بقضية عراقية، أم أن ما قدمته من أفلام ارتبط فقط بلحظة تاريخية يعيشها العراق، بينما تجد ذاتك كمخرج في منطقة أخرى؟
بداية فإنني أعرّف نفسي بأنني عربي عراقي قبل أن أكون فنانا، فعلاقتي بالوطن سابقة على علاقتي بالفن، وهو كما قلت سابقا، همّ أحمله معي دائما، لذلك فإن علاقتي الإبداعية به متواصلة، وإن كانت اللحظة الحالية الأكثر حرجا. ولكن هذا الارتباط بوطني لن يقل في المستقبل بالضرورة، فموقفي الفني لا ينفصل عن موقفي الفكري. ولكني لا أود تحديد هويتي الفنية بالعراق، إنني أشتغل على أفكار وهموم إنسانية، قضية فلسطين مثلا تهمني كعربي، كما تعنيني المجاعات التي يتعرض لها الإنسان في إفريقيا، كل هذه هموم وقضايا ألتزم بها كإنسان وفنان أيضا. لذلك أعمل على منح تجربتي السينمائية بعدا إنسانيا حتى في إطار الموضوع العراقي. من الضروري أن أنجح بإقامة الجسور كإنسان وكفنان مع الآخر

ولكن البعض قد يعتبر موقفك هذا تنصلا من هوية وطنية، لتحقيق انتشار ربما أو شهرة؟
إن من يوجه لي مثل هذا الاتهام لا يدين إلا نفسه. ما الذي يضطرني لخوض الصراعات ومواجهة الصعوبات أكثر من ثلاثة أعوام حتى أتمكن من العثور على تمويل لتحقيق فيلم، علاوة على معاناة صعوبات الإنتاج الأخرى؟ وهل الانتشار حافز كاف يدفعني للتصوير في مناطق وظروف خطرة تهدد حتى حياتي، كالتي واجهناها أثناء تصوير فيلم ‘بابل’؟ كما أنني لا أصنع أفلاما تجارية، يمكن أن تشاهد في دور السينما العادية، وبالتالي تحقق لي الشهرة والانتشار. هذا كلام عار عن الصحة، وبالتأكيد ليس لدي حسابات شخصية
من جانب آخر، من حقي كسينمائي أن أمتلك أسلوبي الخاص، الذي قد يتفق أو يختلف مع آخرين، بل إن ذلك طموح بالنسبة لي، بأن أمتلك بصمتي في كل فيلم أقدمه، والوصول إلى سينما حقيقية، مع معرفتي بأن الجمهور في الوطن العربي يفتقر إلى الثقافة السينمائية، بالإضافة إلى قلة المبدعين ذوي الأسلوب الإخراجي الخاص بهم، والساعين نحو سينما حقيقية خالصة. ولهذا كانت فرحتي غامرة عندما نلت جائزة المؤلف في مهرجان الرباط السينمائي، لأنها مثلت اعترافا بقدرتي على امتلاك أدواتي الفنية المتفردة. وأرى أنه على كل مبدع أن يمتلك أسلوبا يشير إليه فور مشاهدة أعماله

تنوعت جنسيات الممثلين في فيلمك، مصرية، لبنانية، فلسطينية، تونسية، لماذا لم تستعن بممثلين عراقيين؟
رغبتي الأولى والحقيقية كانت العمل مع ممثلين عراقيين، كنت أفضل ذلك، ولكن صعوبة الظروف الإنتاجية وقفت عائقا، فقد كان من شروط التمويل الأوروبي، مشاركة ثلاثة ممثلين على الأقل من حملة الجنسيات الأوروبية في الفيلم، ولم أعثر على ممثلين عراقيين يحملون تلك الجنسيات، بالإضافة إلى تعقيدات إنتاجية أخرى، فكان الحل باللجوء لممثلين عرب

هل تتفق معي بانتماء أسلوبك الإخراجي في هذا الفيلم لما يعرف بتيار السينما الشاعرية؟ كيف قمت بتوليف عناصر الفيلم لتحقيق ذلك الأسلوب؟
نعم أتفق معك إلى حد كبير، فثيمة العمل القائمة على الأحاسيس الإنسانية قادتني لذلك وفق رؤيتي الفنية. كانت العناصر مكتملة في مخيلتي، فالقرية قمت برسمها بشكل الهلال، مع دراسة وافية لزوايا شروق الشمس وغروبها، بما يخدم مشهدية المكان التي رغبت بإبرازها، وذلك كله قبل تنفيذ الديكور في منطقة بورسعيد المصرية، وكان لا بد من تكامل بقية العناصر لتكون في نفس السياق الشاعري مثل الموسيقى وأداء الممثلين والتقطيع وغير ذلك

نال الفيلم جائزة أحسن سيناريو، وأنت بالطبع كاتبه. جاء الحوار على قلته، مشحونا بلغة شعرية عالية، من أين أتيت بتلك اللغة؟ هل خلف المخرج يختبئ شاعر مثلا؟
لست شاعرا بالتأكيد، ولكنها ربما روح شاعرية أمتلكها، وأردت توظيفها في أسلوبي، خصوصا وأن العمل يتحرك في إطار المشاعر الإنسانية، وبما أن الفيلم يقوم على الصورة الشاعرية، والحوار جزء من هذه الصورة، فكان لا يمكن كسر هذا المناخ وهذه الصورة، بحوار صارخ مباشر مثلا، أو مفردات قاسية. إذن فهو التكامل الذي كان ضروريا لتحقيق الأسلوب السينمائي، وإنجاح الفيلم

اتسم أداء الممثلين بالتعبيرية، واستغلال لغة الجسد إلى حد كبير، ما هو مفهومك للصورة للوصول إلى لغة سينمائية عالية؟
السينما تتأسس على لغة الصورة، واعتماد الأداء على كثرة الحوار المنطوق دلالة عجز من قبل المخرج عن امتلاك أدواته الفنية، أو كسل على أقل تقدير. لا أستطيع الاستمرار بمشاهدة فيلم لا يقدم لي سينما حقيقية، وهذا ليس ذوقا شخصيا، وإنما فهما علميا للسينما، فحيث عشت بفرنسا، وهي رائدة فن السينما في العالم، تمكنت من صقل موهبتي بمشاهدة المئات من أفلام السينما الخالصة، وبالتالي لم يكن صعبا بالنسبة لي أن أسيطر على أدواتي في فن أعشقه منذ طفولتي. وبالمناسبة، فقد بدأت السينما صامتة، باعتبارها فن الصورة، ثم أضيف الحوار لاحقا لإكمال الصورة، وليس للاستعاضة عنها

كانت أحداث الفيلم مختزلة ومكثفة. لم تذهب في الفيلم إلى تفاصيل الأحداث، كانت هناك إيحاءات تحيل إلى الحدث، لماذا؟ هل تقصدت التركيز في مستوى معين من الفكرة؟
بالتأكيد تقصدت ذلك، فأنا من المؤمنين بضرورة إشراك المشاهد وتحقيق تفاعله مع الصورة السينمائية، لا بد أن أستفز ذهن المشاهد ومخيلته ليكمل معي الكلمات المختبئة خلف السطور، وأنا هنا لا أتحدث فقط عن المشاهد العراقي أو العربي، وإنما المشاهد الغربي أيضا، الذي سيفهم ويشعر بما أردت قوله، لأنني أختزل ولكني لا ألغي الوقائع الأساسية التي بني عليها الفيلم، وهي رؤيتي الفنية بشكل عام ولا تقتصر على هذا الفيلم
كما أنني لا أريد فيلما يؤدي دور الوثيقة التاريخية، ثمة فرق بين العمل الفني السينمائي الخالص والعمل التوثيقي، أريد أفلاما تبقى ويمكن مشاهدتها حتى بعد تجاوز العراق لمرحلة الحرب وآلامها. أريد فيلما إنسانيا وسينمائيا بالدرجة الأولى. أعلم طبعا أننا هنا في العالم العربي لم نصل بعد إلى ثقافة سينمائية حقيقية، فالمشاهد يطالب بتفسيرات وإيضاحات، وقد لمست هذا بالنسبة لبعض المشاهدين العراقيين تحديدا، الذين ربما توقعوا مشاهدة تسجيل لمرحلة، لكنهم سيتفهمون اسلوبي لاحقا

في فرنسا، وأنت مقيم فيها منذ سنوات طويلة، هل تعتبر نفسك مهاجرا، أم منفيا؟ ماذا أعطتك تجربتك في فرنسا شخصيا وفنيا؟
إنني من جيل نشأ على حب الثقافة والمعرفة، وعندما غادرت إلى فرنسا، كان التحصيل العلمي والمعرفة دافعي، وأحد الأسباب كان رغبتي بداية بتعلم اللغة الفرنسية، عشت هناك وعانيت مشاكل المهاجرين العرب الآخرين في أوروبا، كما استمتعت وتعلمت الكثير من ثقافة ذلك البلد في بناء شخصيتي الإنسانية والفنية. ولا أعتبر نفسي منفيا، فخروجي لم يكن قسريا، ولا يحمل أبعادا سياسية، وإنما أقيم في بلد تعلمت وأعمل فيه، وفي نفس الوقت أحمل مسؤوليتي الوطنية ومشروعي الثقافي الذي يمكنني من خلاله خدمة بلدي العراق والإنسان العراقي. وبعد المهرجان سأغادر عمان إلى العراق، لزيارة الأهل، حاملا في نفس الوقت فكرة فيلم وثائقي، متمنيا أن تتيح لنا الظروف هناك تنفيذه

في مشهد بين الجندي رياض صديق مستور وزهرة، جرى حوار عذب وجميل، يعكس موقفا تقدميا تجاه المرأة، ورفضا لظلمها من قبل المجتمع. كيف ترى علاقتك مع المرأة؟ وماذا يمكن أن تقدم لها على صعيد أعمالك السينمائية أيضا؟
لن أكرر كليشيهات مستهلكة حول أهمية المرأة في الحياة، ببساطة نشأت محاطا بنساء، أمي وثلاث أخوات أعتز بهن، ولن أضيف الكثير إذا قلت أن وجود المرأة مهم جدا في حياتي، وفي حياة المجتمع أيضا، كما أنها المؤشر على ارتقائه أو انحطاطه. وقد راعني تراجع وضع المرأة العراقية الحالي، وعودة الحجاب بقسوة، وانكفاؤهن على منجزاتهن المبكرة نسبيا. وهو تراجع أصاب المرأة العربية ايضا
النساء كن دائما من دفعن ثمن الحروب في العراق، كما هو الحال دائما في كل مكان، حيث تكون النساء أول المتضررين من الحرب وآثارها. ومأساة العراقيات على خطورتها، إلا أنها للأسف مغيبة ولا تحظى بالاهتمام حتى الآن. إنني من أشد الرافضين لهذا الوضع البائس للمرأة العربية، الذي يكاد يقضي على إمكانياتها الإنسانية في العراق، وفي العالم العربي. وأعتبر أن مسؤوليتي تاريخية تجاه المرأة ثقافيا وسينمائيا. فمثلا خلال بحثنا لتنفيذ الفيلم، كان من أحد أسباب رفضي للتصوير في الجانب الإيراني من الأهوار، هو اشتراطهم ظهور الممثلات محجبات
إنني فنان، وواجب الفن والسينما تحديدا التبشير بالتغيير لا تكريس الواقع، وعلينا كفنانين العمل على تفعيل رؤانا الفكرية والفنية في تناولنا لما يمس المرأة بما يطور واقعها، لا بما يتواطأ مع الاختلالات الحاصلة حاليا. حتى اختياري للممثلات في أعمالي، فإنه يقوم على سمات وخصائص تعزز صورة المرأة القوية المجابهة لظروفها، والرافضة للخضوع.
كما أسعى لتقديم نماذج مضيئة من النساء، فلدي حاليا مشروع سينمائي حول مناضلة جزائرية اسمها جميلة بوباشا، من زمن الاستعمار الفرنسي، امرأة قوية مؤمنة بعدالة قضيتها، تعرضت للاعتقال والتعذيب فترات طويلة، وقدمت التضحيات في سبيل قضيتها الوطنية. مثل هذا النموذج من النساء الوطني والإنساني هو ما يثير إعجابي وما يهمني فعلا

في الفيلم مشهد للجندي رياض بعد مقتل صديقه مستور في حرب الخليج الأولى، يسير في الصحراء، بين جثث الجنود القتلى، في رمزية للتيه واليأس وعبثية تلك الحرب، ثم يخرج جندي أمريكي يسير باتجاهه بنفس ملامح التيه، ليقع ويموت. هل كنت تسجل في ذلك المشهد موقفا يدين الحروب؟ وهل ينسحب موقفك هذا على حروب التحرير مثلا؟
مبدئيا فإنني أرفض الحروب وأدينها، وأعتبرها عبثا مدمرا، إنها ضد الإنسان وضد استمرارية الحياة، لأنها تسلب الإنسان حياة منحت له ليحياها، ولا تخلف سوى الدمار واليأس والأرواح المشوهة، والمآسي على اختلافها. هذا هو موقفي الوجودي من الحروب، والذي سجلته في الفيلم، ولكن النضال بالتأكيد مسألة أخرى. يقول سميح القاسم: أكره كل حرب إلا حروب التحرير

لا يمكن اعتبار الحركة السينمائية العراقية طارئة، فقد بدأت إرهاصاتها في الأربعينات، على أنها لم تسجل حضورا كبيرا في المشهد السينمائي العربي، هل تعتبر نفسك ومجايليك مؤسسين للسينما العراقية، أم متابعين للتجارب السابقة؟
نعم لقد كانت هناك بدايات منذ الأربعينات، لكن لم تكن هناك يوما صناعة سينمائية عراقية، وإنما كانت هناك أفلام متفرقة ومتباعدة زمنيا، متفاوتة المستوى فنيا، وأول تلك الأفلام وأهمها تجربة الفنان سعيد الأفندي.
قطعا لا أعد نفسي من المؤسسين ، ولكن الأفلام التي نصنعها هي محاولات جادة ومخلصة للعمل، من قبلي ومن قبل فنانين آخرين مثل المخرجين محمد الدراجي، قاسم حول، وعدي رشيد، وآخرين ربما لم أتمكن من الاطلاع على تجاربهم، ونرجو أن تكون تجاربنا مشجعة لتبني صناعة السينما في العراق مستقبلا، حيث أنها صناعة تتطلب إمكانيات ضخمة وتمويلا لا بد من مساهمة مؤسسات عديدة فيها
وأعتقد أن الوضع المأساوي في العراق بكل ما فيه من فوضى وعبثية، يعتبر مصدرا غنيا حاليا للفنانين وخصوصا المخرجين للتعامل معه سينمائيا، بما يمكننا من خلق صناعة سينما عراقية تليق بالعراق الذي نطمح لبنائه في المستقبل

شاركت بفيلمك في العديد من المهرجانات وما زال مرشحا لمهرجانات أخرى، كما نلت عدة جوائز عنه في تلك المهرجانات. ما أهمية تلك المهرجانات بالنسبة لك؟ وما دورها في تطوير الحركة السينمائية العربية؟
لهذه المهرجانات أهمية بالغة، وإن كانت تتم في شبه غياب للإنتاج السينمائي، خصوصا في منطقة الخليج، ولكن من خلالها يتمكن المخرجون أمثالي من عرض أفلامهم التي لا يمكن مشاهدتها في مكان آخر، لأنها ليست أفلاما تجارية. كما يشاهد الفيلم من قبل جمهور واسع، بفضل المهرجانات، لقد عرض فيلمي في كوريا الجنوبية، ذلك ما كان ليحدث لولا المهرجانات السينمائية. كما أن المهرجانات تشكل حافزا للتجارب السينمائية، فمثلا إقامة مهرجان الخليج الأول، شجعت العديد من الشبان على صناعة أفلام للمشاركة في السنة التالية، بالإضافة إلى التفاعل بين السينمائيين والاطلاع على التجارب الأخرى الأكثر تقدما مما يساهم في زيادة الخبرات ورفع مستوى ما يقدم من أعمال سينمائية

رحاب أبو هوشر
القدس العربي2009/08/01


العدسات مفتوحة على العراق

a-l-aube-du-monde-2009-18640-1183362133
مشهد من الفيلم العراقي: فجر العالم

من بين خمسة أفلام روائية طويلة، مشاركة في المسابقة الرسمية لهذه الفئة في مهرجان الخليجالسينمائي، يأتي فيلم المخرج العراقي عباس فاضل «فجر العالم» دعوة للبحث عنه، أي هذا الفجر، الذي سيكون رابضاً في ما خلف الفيلم، مادامت الغلبة فيه لظلمة العالم لولا الحب المصاب بدوره بحلكته، وربما البحث عّما سيأتي بعد كل الذي نشهده من وقائع لها أن تكون مأساوية بامتياز.
يبني فاضل في أول أفلامه الروائية على ثالوث متمثل بالحب والحرب والفقر، بحيث تتجاور وتتناوب في سرد قصة لها أن تجد فيها ما يدفعها لأن تواصل حتى النهاية في انتصار للحب بشكل أو آخر، والذي سيكون أيضاً متقشفاً متأثراً بكل ما حوله من أسى وبؤس.
إنه العراق، والأهوار تحديداً، إنه مستور الذي سيقاد إلى حرب الخليج الأولى بعيداً عن زهرة ولم يقطف ثمارها بعد، ولعل مقتل مستور سيمنح لرياض رفيقه في الحرب مساحة لأن يمضي إلى زهرة محمّلاً بوصيته بأن يتزوجها، الأمر الذي يتحول إلى حب يسكن رياض، وعلى شيء من الالتصاق بعالم زهرة، وفي استعداد منه لأن يهجر بغداد ويعيش في قريتها التي يحيط بها البؤس من كل جانب.
يتبع ذلك إبادة جماعية يتعرض لها سكان تلك القرية، دون أن يبقى منهم سوى زهرة (حفصية حرزي) وأم مستور(هيام عباس) وفتى صغير ورياض (كريم صالح) والضفادع والمطر وصورة صدام حسين وبالتأكيد الحب.
فيلم عباس فاضل متسق ومتناغم مع عوالمه، وعلى عناية خاصة باللقطة التي تستثمر موقع التصوير المبني على ما يحاكي الأهوار ربما! ولعل عناصر المكان تتخطى فعل الحب الغائب، بحيث القسوة تطغى وتأتي اللقطات محملة بجماليات تلك القسوة، وفي بيت حجي ما يحيلنا إلى ذلك، في المطر الذي يأتي بعد المجزرة كما صار عرفاً، في الضفادع التي تتقافز هنا وهناك وغيرهما من لقطات

زياد عبدالله – دبي التاريخ: الإثنين, أبريل 13,2009


 


Leave a comment